No Angel
service. Presque tous croyaient que j’étais aux stups ou à la brigade criminelle. Aucun ne savait que j’effectuais des missions d’infiltration depuis quinze ans. Cela créait quelques tensions familiales. Grâce aux demi-vérités et aux allusions, Gwen et moi nous éludions les questions liées à mon travail. J’effectuais des recherches sur un réseau de trafiquants de drogue, je traquais des armes illégales, je participais à une enquête sur un trafic impliquant plusieurs États. J’étais très occupé. Aucune précision. Rien sur ma blessure par balle, rien sur les types sur qui j’enquêtais, rien sur les dizaines d’occasions où l’on m’avait braqué une arme sur la tête. L’orgueil que je tirais de ces événements était privé… limité du moins à la compagnie de mes collègues.
Cette discrétion ne me coûtait pas beaucoup… je vivais dans un univers de flics. Je pouvais raconter mes expériences, devant la machine à café, jusqu’à la fin des temps. Les psys de l’ATF, ainsi que de vieux amis et équipiers tel que Chris Bayless, s’assuraient régulièrement de mon équilibre psychologique. Je pouvais m’exprimer.
Le fardeau de Gwen était plus lourd que le mien. D’une certaine façon elle devait vivre, elle aussi, comme si elle était infiltrée. Elle ne pouvait pas parler de mes activités, parce que cela aurait risqué de compromettre ma sécurité ainsi que celle de mes équipiers et collègues. Elle savait depuis longtemps qu’elle devait en dire le moins possible sur mon travail. Nos amis proches y étaient habitués. Il ne pouvait en être autrement et je souhaitais qu’il en fût ainsi.
C’était généralement plus facile quand je ne la mettais pas dans une situation où elle était obligée de mentir. Au fil des années, j’avais pris l’habitude de lui parler de moins en moins de mes activités. Il y avait des choses qu’elle ne saurait jamais et n’avait pas besoin de connaître. De mon point de vue, il était inutile de l’informer des complexités de ma vie. Bien entendu, c’était un leurre. Je n’avais pas encore perdu sa confiance, mais j’avais perdu la proximité dont nous avions joui autrefois. Lui parler davantage de mon travail ne l’aurait peut-être pas rassurée et n’aurait sans doute pas atténué son inquiétude, mais peut-être se serait-elle sentie moins exclue.
En ce qui concernait les tatouages, il y avait des années que je lui faisais part de mon envie de me faire tatouer les bras… elle avait autrefois dessiné les fleurs que Mac avait reproduites. Elle aimait ce que mes tatouages disaient sur moi… que je n’étais pas un mari ordinaire. Mais, alors qu’elle comprenait que j’aie envie de me faire tatouer, elle ne comprenait pas que je tienne à ressembler à un gangster. Je dis que je ne pourrais pas avoir l’air d’un affreux si j’étais couvert de Sam le pirate, de Taz ou de Bugs Bunny. Je savais que ce n’était pas ce qu’elle voulait dire, mais c’était ainsi que je voyais les choses. J’aimais le look tatouage de prison. Je suppose que, sur le plan des tatouages, je n’étais guère différent des gens que je tentais de faire tomber.
Gwen ne fut pas étonnée quand elle vit mes bras, mais elle fut un peu déçue.
— Je suppose que tu n’es plus qu’un motard, maintenant, hein ?
Nous étions dans notre chambre et nous nous préparions pour aller au barbecue. J’étais fatigué mais je repris le dessus en buvant un Red Bull.
Je lui frappai les côtes du bout de l’index.
— Tu blagues ? Tu sais que je n’aime pas les motos.
— Ce n’est pas drôle.
— Je trouve que ça l’est.
Elle garda le silence. Elle alla dans la salle de bains. Je m’assis sur le lit avec une envie terrible de cigarette. Quand elle revint, elle était formidable. Et, montrant mes tatouages :
— Qu’est-ce qu’elle en pense ? Je parie qu’elle les adore, hein ?
— Qui elle ?
— Cette femme avec qui tu travailles. Jenna.
— Je ne vais même pas…
— Je sais ce qui se passe, Jay.
— Gwen, il ne se passe rien. Même si j’en avais envie, et je n’en ai pas envie, putain, je n’en aurais pas l’énergie.
— Non, putain, tu n’en aurais pas l’énergie, hein ?
Je soupirai et levai peut-être un peu trop ostensiblement les yeux au ciel. Gwen ajouta :
— Non, bien sûr.
Puis elle retourna dans la salle de bains.
Ce n’était pas nouveau. Gwen faisait des allusions
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