No Angel

restés des rebelles américains incompris alors que nous avons été présentés, nous qui luttions pour l’ordre et l’honnêteté, comme des flics trop zélés qui avaient jeté la prudence et l’éthique aux orties. Les Hells Angels ont gagné sur presque tous les plans.
    Pendant deux années entières, l’aspect de ma personnalité connu sous le surnom de Bird s’était développé dans le tréfonds de mon être. Bird était celui sur qui je pouvais toujours compter. En le rabaissant, les Hells Angels m’ont également volé ce succès.
    Je l’ai dit, j’ai traversé des jours sombres. Je me suis tourné vers ce qui me restait : Dieu, les amis, la famille. Je ne méritais pas leur fidélité et je ne comprendrai jamais pourquoi ils ne m’ont pas abandonné. Mais ils étaient là. Je me suis tourné vers eux et ai regardé ma vie d’un œil neuf. J’ai compris que je ne devais ces bienfaits qu’à la grâce de Dieu. J’ai fini par admettre que j’étais responsable de ce qui avait mal tourné dans mon existence. Ce ne sont ni mon travail, ni l’ATF, ni les Hells Angels qui ont attiré à la surface ce qu’il y avait de pire en moi. Je suis seul responsable.
    Je ne sais pas quand exactement j’ai pris conscience de tout cela, mais à partir de ce moment tout a changé.
    Je me souviens qu’un matin, au réveil, je me suis aperçu que la mort et la vengeance ne m’inquiétaient plus. Les Hells Angels voulaient s’en prendre à moi et je ne pouvais qu’être prêt. Si l’ATF voulait me traiter en banni, je ne pouvais que refuser opiniâtrement. Au cours de ma vie, j’ai supporté une balle dans la poitrine et d’innombrables passages à tabac ; j’ai eu entre les mains des bombes à retardement et on a braqué des douzaines de fois une arme sur ma tête ; j’ai été infiltré parmi des meurtriers, des violeurs, des voleurs, et j’ai passé une bonne partie de mon temps en compagnie des éléments les plus méprisables de la société. J’ai mené une existence étrange mais bien remplie. Ce jour-là j’ai compris que, malgré sa bureaucratie, j’aimais l’ATF et sa noble mission. J’aimais mes collègues, qui se sacrifient en silence. J’ai compris que ma vie, émaillée d’expériences étranges, était véritablement merveilleuse et satisfaisante.
    Ce matin-là, je me suis réveillé prêt à échanger ma juste colère contre un peu de paix. Cela aussi fut une révélation. Ma détermination – quelques-uns parleront peut-être d’arrogance – m’a permis de relever des défis que d’autres ne peuvent ou ne veulent affronter. J’ai compris que j’étais fier de ma propension à la bagarre. J’ai commencé de m’accepter tel que j’étais. Bird ne me définissait plus, mais il vivait en moi ; il ne sera plus jamais l’acteur principal, mais demeure une part de moi-même qui m’est chère.
    J’ai pris conscience de ce qui m’avait été le plus précieux : l’honneur et le privilège d’affronter les difficultés aux côtés des agents des forces de l’ordre et d’une famille plus courageuse que tout ce qu’on peut imaginer ou espérer.
    Au moment d’achever ce témoignage, je veux redire mon amour et mon respect à ceux qui m’ont guidé, encouragé, accepté et soutenu… en m’adressant directement à eux : vous n’êtes pas seulement mes amis et ma famille. Vous êtes beaucoup plus. Vous êtes mes héros.
    Cela en valait-il la peine ? Recommencerais-je ?
    Si j’avais pu voir l’avenir et la vie dont je jouis aujourd’hui…
    OUI, ABSOLUMENT.
     

 
 
 
 
Illustrations



 
     
    De l’innocence à l’expérience
    Portraits de Jay Dobyns, devenu Jay « Bird » Davis
    Qui aurait pu prévoir qu’un jeune Américain ordinaire coffrerait un jour de très nombreux trafiquants d’armes et de drogue ?
     

     

     

     



Je ne me suis jamais fait tatouer pour favoriser mon travail d’infiltration… mais les tatouages ont assurément été un avantage. À mesure que l’enquête sur les Hells Angels progressait, et que je m’investissais de plus en plus dans le rôle du motard hors la loi, mon amour des tatouages a atteint un niveau supérieur.
     



Même les enfants qui habitaient près de notre maison de Phoenix avaient droit à Jay « Bird » Davis.
     



Au lieu de tenter de nous insinuer individuellement dans les bonnes grâces des Hells Angels, nous avons créé un chapitre légitime des Solo Angeles, club de motards