Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Noir Tango

Noir Tango

Titel: Noir Tango Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Régine Deforges
Vom Netzwerk:
médecin ?
    — Non, elle est soûle, elle n’a pas
besoin d’un médecin, mais d’une bonne douche froide.
    — Va préparer du café.
    Daniel referma la porte avec humeur. François
entreprit de déshabiller Léa. Ce n’était pas facile. Il avait l’impression de
manipuler une poupée de chiffons. Elle était enfin nue quand Daniel revint avec
une tasse de café. Il resta sur le seuil, immobile, à contempler ce corps
abandonné.
    — Comme elle est belle ! murmura-t-il.
    D’un geste rageur, Tavernier la recouvrit.
    — Laisse-nous.
    Il redressa Léa et entreprit de la faire
boire ; du café coula sur le menton puis le long du cou ; elle gémit.
Il la rallongea, alla chercher une serviette mouillée et lui bassina le visage
et la poitrine ; ses yeux s’ouvrirent sur un brouillard tournoyant.
    — Laure…
    De lourdes larmes se mirent à glisser sur
ses joues.
    — Je sais, mon petit, pleure.
    Pendant quelques instants, il la tint serrée
contre lui, secouée de sanglots.
    Impuissant, il était impuissant à consoler
celle qu’il aimait.
    — Tante Albertine…
    — Mon amour, bois, cela va te faire du
bien.
    Léa repoussa avec violence la tasse de café
qui se renversa sur le lit.
    — Elle est morte, hurla-t-elle, tante Albertine
est morte !… Tu entends ? Morte !… comme Laure !
    Un grand découragement envahit cet homme
fort. Pourquoi tant de souffrances, tant de morts autour d’elle ? Il ne
pouvait rien faire, il la laissa pleurer. Peu après, elle se leva et, nue, se
dirigea vers la salle de bains ; il l’entendit vomir, puis ouvrir le
robinet de la douche sous laquelle elle resta longtemps. Quand elle revint, les
cheveux ruisselants, il fut effrayé de sa pâleur et des cernes qui marquaient
son visage ; ses larmes ne coulaient plus. C’était pire, il la sentait
désespérée.
    Trois jours plus
tard, ils partirent accompagner le corps de Laure. Dans le salon de Montillac, le
cercueil d’Albertine attendait. Françoise et Léa s’étreignirent, en silence, sans
pleurs. À pied, elles suivirent les corbillards jusqu’à l’église. La basilique
était pleine d’amis, de voisins, de gens du coin, venus, bouleversés par tant
de malheur, témoigner leur sympathie. Le père Henri prononça des mots d’amour
et de paix. Françoise y fut sensible, le cœur de Léa resta fermé.

18.
    Ma petite fille,
    Le départ pour Buenos Aires est fixé au
10 octobre. Je pensais pouvoir venir t ’embrasser, mais
après Londres, on m’envoie en Allemagne d’où je ne reviendrai que la veille du
10. Sarah, Samuel et Amos m’accompagnent, Daniel partira plus tard.
    J’ai revu Victoria Ocampo à Londres, elle
m’a dit qu’elle serait heureuse de te recevoir dans sa propriété de la banlieue
de Buenos Aires à San lsidro, elle doit t’écrire pour te confirmer son
invitation. Je ne souhaite pas que tu y répondes, ce pays n’est pas stable
politiquement et il y a des risques d’affrontements, je ne veux pas que tu sois
mêlée à tout cela. Reprends des forces sur cette terre que tu aimes. Plus que
jamais, ils ont besoin de toi à Montillac et c’est dans le travail que tu
trouveras l’apaisement. Si cependant tu préfères venir à Paris, l’appartement
de la rue de l’Université est le tien. J’ai déposé à ton nom à ma banque une
certaine somme. Sers-t-en sans scrupule et considère que ce qui m’appartient
est à toi. N’oublie pas que c’est toi que j’aime et que je te considère comme
ma femme. Je sais que le temps viendra où nous pourrons vivre ensemble sans
peur et sans contraintes.
    J’ai beaucoup admiré ton courage durant
ces jours pénibles ; tu as porté tout cela à bout de bras, ma vaillante. Je
t’admire autant que je t’aime.
    Écris-moi à l’ambassade de France à
Buenos Aires, l’ambassadeur est un ami.
    Tu me manques, ma chérie, chaque nuit et
chaque jour je souffre de ton absence. Pense à celui qui t’aime,
    François.
    « Je m’en
moque, qu’il m’admire et me trouve courageuse et qu’il m’aime !… Cela ne l’empêche
pas de partir avec une autre qui porte son nom… il se moque de moi… Croit-il
que je vais l’attendre patiemment au coin du feu ?… il mériterait que je
le prenne au mot et que je dépense tout son argent… Comment peut-il parler d’apaisement
alors que règne en moi un désordre total ?… Il n’a rien compris !… Ils
n’ont pas besoin de moi à Montillac, Alain et Françoise se débrouillent

Weitere Kostenlose Bücher