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Nord et sud

Nord et sud

Titel: Nord et sud Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elizabeth Gaskell
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mortifié un être humain.
    « Que pouvais-je faire d’autre ? se demanda-t-elle.
Cet homme m’a toujours déplu. J’ai été polie, mais je n’ai pas cherché à déguiser
mon indifférence. En effet, je n’ai pensé ni à lui ni à moi, aussi mon attitude
a-t-elle dû révéler la vérité. Il a pu mal interpréter tout ce qui s’est passé hier.
Mais c’était sa faute, non la mienne. Je referais la même chose si besoin était,
même si cela devait encore me causer autant de honte et d’embarras. »

 
     
     
     
     
     
     
     
     
    CHAPITRE
XXV
     
    Frederick
     
     
     
    «   La
vengeance demande à faire valoir ses droits
    La discipline
outrée met leur cause hors la loi
    Et la
marine offensée veut être vengée. »
    Byron [56] .
     
     
    Margaret se demanda si toutes les demandes en mariage étaient
aussi inattendues, aussi pénibles à entendre que celles qu’elle avait reçues à deux
reprises. Une comparaison involontaire entre Mr Lennox et Mr Thornton
se fit dans son esprit. Elle avait été désolée que Mr Lennox eût pu se laisser
suffisamment leurrer par les circonstances pour exprimer un sentiment autre que
l’amitié. C’est ce sentiment de regret qui prédominait, pour cette première demande
en mariage. Elle ne s’était pas sentie aussi stupéfaite, aussi abasourdie qu’aujourd’hui,
alors que résonnait encore dans la pièce l’écho des paroles de Mr Thornton.
Lennox semblait avoir glissé involontairement, l’espace d’un instant, sur les limites
entre amitié et amour, et aussitôt après, l’avoir regretté presque autant qu’elle,
quoique pour des raisons différentes. Avec Mr Thornton, il n’y avait pas eu
ce stade intermédiaire d’amitié, à la connaissance de Margaret. Leur relation n’avait
été qu’une suite de désaccords. Leurs opinions s’opposaient ; au reste, elle
n’avait jamais eu le sentiment qu’il se souciât de voir en elles l’expression de
sa personnalité. Dans la mesure où les convictions de Margaret constituaient un
défi pour lui, avec son caractère taillé dans le roc et ses propres convictions
fougueuses, il les écartait avec dédain, jusqu’à ce qu’elle sente l’inutilité de
ses protestations puisque le jeu n’en valait pas l’effort ; or voilà qu’il
venait lui déclarer son amour de cette manière étrange et passionnée ! De prime
abord, elle avait cru qu’il avait fait sa déclaration contraint et forcé par la
vive compassion que lui inspirait un geste qui l’avait publiquement exposée, et
qui avait pu prêter à confusion, pour lui comme pour les autres ; toutefois
il ne fallut pas cinq minutes à Margaret pour comprendre avec une certitude aveuglante
ce qui avait commencé à lui apparaître avant même qu’il eût quitté la pièce, à savoir
qu’il l’aimait vraiment ; qu’il l’aimait depuis longtemps et continuerait à
l’aimer. Elle eut un mouvement de recul et frémit, comme fascinée et rebutée par
quelque grand pouvoir, qui était en opposition avec toute sa vie passée. Elle essaya
de repousser cette idée, de la faire taire. En vain. Pour parodier un vers du Tasse :
« Sa forte présence s’imposa à ses pensées [57] . » Il lui déplaisait
d’autant plus qu’il avait fait fi de sa volonté à elle. Comment osait-il dire qu’il
continuerait à l’aimer alors même qu’elle l’avait repoussé avec dédain ? Elle
regrettait de ne pas s’être exprimée avec plus de... plus fermement. Des propos
tranchants et sans réplique lui venaient en foule à l’esprit, maintenant qu’il était
trop tard pour les tenir. L’impression profonde qu’avait produite sur elle cet entretien
ressemblait à ce que nous ressentons après avoir rêvé à une créature monstrueuse,
dont la vision horrible refuse de quitter la pièce même lorsque nous nous éveillons,
frottons nos yeux et grimaçons un sourire contraint. Elle reste là – là, tapie dans
un coin de la chambre, à émettre des sons inarticulés et à nous regarder d’un œil
fixe et terrifiant, elle écoute pour savoir si nous osons parler de sa présence
à qui que ce soit. Et nous n’osons pas, pauvres lâches que nous sommes !
    Margaret frissonna, essayant d’écarter le spectre de cet amour
persistant. Qu’avait-il voulu dire ? N’avait-elle pas le pouvoir de le décourager ?
Elle verrait. Il dépassait les bornes en agitant ainsi cette menace devant elle.
Qu’est-ce qui justifiait l’audace dont il faisait

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