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Nord et sud

Nord et sud

Titel: Nord et sud Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elizabeth Gaskell
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circonstances. D’abord, il était assez égoïste pour
ressentir un certain plaisir à l’idée que le grand amour qu’il lui portait pourrait
contribuer à la réconforter et à adoucir sa peine ; un plaisir assez proche
de ce sentiment passionné et poignant qui étreint une mère à sentir son enfant se
blottir contre elle, dans un état de dépendance complète. Mais cette vision délicieuse
de ce qui eût pu être, cette vision qu’il se fût autorisée encore deux jours plus
tôt, malgré le refus de Margaret, était malencontreusement troublée par le souvenir
de ce qu’il avait vu près de la gare de Outwood. « Malencontreusement troublée. »
Les mots étaient faibles ! Il était hanté par le souvenir du beau jeune homme
avec lequel il l’avait vue s’entretenir de façon si confiante et si familière ;
et ce souvenir le poignardait douloureusement, si fort qu’il serrait les poings
pour dominer sa souffrance. À une heure aussi tardive ! Si loin de chez elle !
Il devait faire un grand effort moral pour croire comme jadis à l’irréprochable
pureté de Margaret. Dès qu’il cessait de faire cet effort, cette confiance retombait,
anéantie et impuissante, laissant place à toutes sortes d’idées folles qui lui traversaient
l’esprit, se succédant comme des rêves. Et voilà que Dixon lui fournissait cette
misérable confirmation qui allait le ronger : « Elle supporte l’épreuve
mieux qu’on eût pu s’y attendre. » Elle avait donc quelque espoir, quelque
perspective assez heureuse pour illuminer les sombres heures de deuil d’une fille
pourtant affectueuse qui venait de perdre sa mère. Oui, il savait comment elle aimerait.
Il ne l’aimait pas sans avoir deviné d’instinct toutes les ressources cachées en
elle. Si un homme était digne d’elle, digne de gagner son cœur par la force de son
amour, l’âme de Margaret s’épanouirait dans une radieuse lumière. Même dans son
deuil, elle se reposerait avec une parfaite confiance sur sa compassion. Sa compassion !
Celle de qui ? Mais de cet autre-là. Et l’idée que ce fût un autre que lui
suffisait à rendre encore plus tendu et plus sévère le visage déjà pâle et grave
de Mr Thornton lorsqu’il entendit la réponse de Dixon. « Sans doute pourrai-je
venir présenter mes respects... à Mr Hale, j’entends, dit-il avec froideur.
Peut-être acceptera-t-il de me recevoir demain après-midi, par exemple. »
    Il prononça ces phrases comme si la réponse lui importait peu.
Ce qui n’était pas le cas. Malgré la peine qu’il ressentait, il brûlait de voir
celle qui en était la cause. Il avait beau haïr parfois Margaret, lorsqu’il repensait
à ses attitudes familières gracieuses et à tous les détails qui s’y associaient,
il éprouvait le plus vif désir de contempler à nouveau l’original de l’image gravée
dans son esprit, et l’envie de respirer le même air qu’elle. Il était pris dans
un maelstrom de passion et condamné à tourner, tourner toujours, pour se rapprocher
du centre fatal.
    — Je pense que Monsieur vous recevra, monsieur. Il était
désolé de ne pouvoir le faire l’autre jour ; mais les circonstances ne le permettaient
pas.
    Pour une raison mystérieuse, jamais Dixon ne parla à Margaret
de cet entretien avec Mr Thornton. Ce fut peut-être le jeu du hasard. Toujours
est-il que Margaret ne sut jamais qu’il avait assisté au service funèbre de sa pauvre
mère.

 
     
     
     
     
     
     
     
     
    CHAPITRE
IX
     
    Vérité et mensonges
     
     
     
    «   Jamais
la vérité ne te fera défaut !
    Même
sur un vaisseau battu par la tempête,
    Dont
les flancs éventrés de toute part font eau,
    Grâce
à elle hors des flots tu garderas la tête ! »
    Anonyme.
     
     
    Supporter l’épreuve mieux qu’on eût pu s’y attendre coûta d’énormes
efforts à Margaret. Parfois, elle se sentait prête à succomber à son chagrin et
à crier lorsque lui revenait soudain à l’esprit, même pendant une conversation paisible
avec son père, l’idée qu’elle n’avait plus de mère. Par ailleurs, elle éprouvait
les plus vives inquiétudes à propos de Frederick. Le dimanche, il n’y avait pas
de courrier et les lettres étaient retardées d’autant. Le mardi, Margaret fut à
la fois surprise et découragée en constatant qu’elle n’avait toujours aucune nouvelle.
Elle ignorait tout des projets de Frederick, et cette incertitude rendait
Mr Hale très soucieux. Cela

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