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Nord et sud

Nord et sud

Titel: Nord et sud Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elizabeth Gaskell
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dit :
    — J’ai trouvé l’écriture bien serrée et difficile à lire.
Je n’ai pas pu la déchiffrer : auriez-vous l’obligeance de me lire ce billet ?
    Il s’exécuta.
    — Je vous remercie. Vous avez dit à Mr Thornton que
je n’étais pas là-bas ?
    — Oh, bien sûr, madame. Je regrette maintenant d’avoir agi
d’après des informations qui s’avèrent inexactes. Au début, le jeune homme était
très sûr de son fait ; or il affirme maintenant qu’il a toujours eu des doutes
et qu’il espère que son erreur ne vous a causé aucun désagrément qui risquerait
de faire perdre à ses patrons votre pratique. Bonsoir, madame.
    — Bonsoir.
    Elle sonna Dixon pour qu’elle le raccompagne.
    Comme la femme de chambre revenait dans le couloir, Margaret
passa rapidement devant elle.
    — Tout va bien, souffla-t-elle sans la regarder ; et
avant que Dixon ait pu lui poser d’autres questions, Margaret avait monté l’escalier
à la hâte, était entrée dans sa chambre et avait fermé la porte au verrou.
    Elle se jeta tout habillée sur le lit, trop épuisée pour réfléchir.
Ses sens étaient si engourdis qu’une bonne demi-heure s’écoula avant que sa position
inconfortable, le froid de la pièce et l’immense lassitude qu’elle éprouvait la
forcent à se lever. Alors la mémoire lui revint, elle commença à associer les idées
et à s’étonner. Sa première pensée fut que toutes ses inquiétudes concernant Frederick
étaient dissipées. Le danger était passé. Ensuite, elle s’efforça de se rappeler
chacune des paroles de l’inspecteur concernant Mr Thornton. Quand l’avait-il
vu ? Qu’avait-il dit ? Qu’avait fait Mr Thornton ? Quels étaient
les mots exacts du billet ? Et tant qu’elle n’eut pas réussi à se souvenir,
à la virgule près, des expressions qu’il avait utilisées, son esprit refusa d’aller
plus loin. Elle en arriva alors à une certitude très claire : Mr Thornton
l’avait vue à côté de la gare d’Outwood le soir fatal et avait appris qu’elle niait
sa présence en ce lieu. A ses yeux, elle était une menteuse. Une menteuse. Mais
elle ne songea pas à faire pénitence devant Dieu ; un seul fait terrible émergeait
dans le chaos et les ténèbres : aux yeux de Mr Thornton, elle était avilie.
Elle ne se souciait pas, même pour sa propre satisfaction, d’invoquer des circonstances
à sa décharge. Ceci était sans lien avec Mr Thornton ; jamais elle n’aurait
imaginé que le fait si naturel d’accompagner son frère à la gare pût provoquer des
soupçons, chez lui ou chez les autres ; mais il savait désormais qu’elle avait
menti et fait une fausse déclaration, et à ce titre, il avait le droit de la juger.
« Oh, Frederick ! Frederick ! que n’ai-je donc sacrifié pour toi ! »
s’écria-t-elle. Même pendant son sommeil, ses pensées continuèrent à tourner autour
du même thème, à ceci près que tous les détails étaient monstrueusement grossis
par la souffrance.
    Lorsqu’elle s’éveilla, une nouvelle idée lui apparut avec la
lumière vive du matin. Mr Thornton avait eu connaissance de son mensonge avant
d’aller voir le coroner. Elle en déduisit qu’il avait pu être poussé à agir ainsi
par le souci de lui épargner d’avoir à mentir une seconde fois. Mais elle écarta
cette pensée avec l’opiniâtreté maligne d’un enfant. Si tel était le cas, elle n’éprouvait
pas la moindre gratitude envers lui, car cela ne montrait que trop clairement qu’il
avait dû la juger coupable pour essayer d’éviter que soit à nouveau mise à l’épreuve
une franchise qui avait déjà si notoirement failli. Plutôt... oui bien plutôt que
de laisser Mr Thornton apprendre ce qui l’avait décidé à intervenir pour la
sauver, Margaret eût préféré la subir à nouveau, cette épreuve, et se fût parjurée
pour sauver Frederick. Quel malheureux hasard avait mis Mr Thornton en contact
avec l’inspecteur ? Comment se faisait-il qu’il fût justement le magistrat
appelé pour recueillir la déposition de Leonards ? Qu’avait dit celui-ci ?
Qu’avait pu y comprendre Mr Thornton qui, pour autant qu’elle pût le savoir, connaissait
peut-être déjà par le truchement de leur ami commun Mr Bell l’ancienne accusation
pesant sur Frederick ? Auquel cas, il avait agi afin de sauver le fils, venu
au mépris de la loi voir sa mère sur son lit de mort. S’il en était ainsi, il méritait
sa

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