Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Titel: Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Reynaert
Vom Netzwerk:
Mazarin, qui fut, selon l’historien André Zysberg 2 « le plus grand voleur de toute l’histoire de la monarchie ». Le bon Colbert n’oubliera jamais les leçons apprises comme secrétaire trésorier du cardinal : il mourra fort riche. Il ne s’agit pas pour autant d’en faire le type même du fripon. Il s’agit juste de rappeler que dans ce régime, la notion de service public et ce qu’elle implique d’honnêteté personnelle n’existe pas. Le roi demande qu’on lui soit fidèle, à lui. Qu’on se serve au passage dans les caisses de l’État est considéré comme allant de soi. Que l’on place les siens l’est tout autant. Colbert n’aura de cesse de récompenser ses fidèles pour se constituer un clan d’obligés, de trouver des emplois à ses parents, et de marier ses filles le plus haut possible. On vante Louis XIV d’avoir su briser l’orgueil des grands en leur refusant l’accès au pouvoir qui leur revenait naguère de droit. N’exagérons pas pour autant le caractère démocratique de la manœuvre. Louis XIV ne chasse une caste qui accaparait le pouvoir que pour la remplacer par une autre, tout aussi cupide, tout aussi affairée à s’y accrocher par tous les moyens.

    La mise en scène du moi
    Principal instrument du pouvoir louis-quatorzien, la mise en scène de soi suppose, par essence, une abolition totale des frontières entre le public et le privé. Le principe n’est pas nouveau. Dans un système comme la monarchie, qui repose sur le lien du sang, les histoires de mariage, par exemple, et tout ce qui va avec (les relations sexuelles du roi et de la reine, les accouchements de la reine, etc.), appartiennent au domaine public, puisque cela implique l’avenir de la dynastie. Cela est vrai depuis très longtemps. L’accessibilité du roi est un autre trait traditionnel chez les Capétiens : on a, pour le xvi e  siècle, des textes d’ambassadeurs étrangers stupéfaits de la facilité avec laquelle n’importe qui peut entrer dans le cabinet du roi, qui est obligé de parler fort bas pour éviter que l’on n’entende ses conversations. À l’inverse, le goût de l’isolement qu’ont les souverains espagnols, par exemple, choque les Français : si un roi de France agissait ainsi, lit-on chez les chroniqueurs, on le croirait mort. Louis XIV n’abolit rien de tout cela, au contraire. Comme à son habitude, il pousse le système jusqu’à sa caricature et en fait un principe de gouvernement. Il l’explique à son fils : « Les peuples sur qui nous régnons règlent d’ordinaire leur jugement sur ce qu’ils voient au dehors. » Donc il donne à voir. Sa vie amoureuse, bien sûr : nul n’ignore la succession des favorites, la Vallière, la Montespan, la Maintenon – et toutes les autres – et seuls quelques esprits étroits se scandalisent de ce fait plus rare : le premier, il légitime tous ses bâtards.
    Mais aussi le roi offre à « ses peuples » le spectacle de son quotidien. Du matin au soir, sa vie est réglée selon la fameuse étiquette, et se passe au su et au vu de tous ceux qui veulent, la Cour bien sûr, mais aussi le tout-venant du public. Non. Le « petit lever » échappe à cette loi. Il est réservé à la famille et aux médecins – ce qui fait déjà environ une vingtaine de personnes. Quelques instants plus tard, le roi, toujours dans son lit, dit à son valet d’appeler « la grande entrée », réservée à d’autres importants, et il pourra ainsi faire sa toilette (c’est-à-dire se frotter les mains sous un peu d’esprit-de-vin) et sa prière, devant quelques intimes, grands dignitaires, chambellans, premiers gentilshommes de la chambre, etc. – on doit tourner à la cinquantaine de personnes. Et ainsi de suite, en faisant grossir le nombre de spectateurs, pour le déjeuner, pour la messe, pour la promenade, etc., jusqu’au soir – jeux d’argent, spectacle, bals quelquefois –, jusqu’au coucher, avec la même litanie, le grand, puis le petit. Le roi reçoit dans son bain, le roi reçoit sur sa chaise percée. Tout ce qui touche le roi n’est-il pas si important ? Jusqu’à ses maladies. Il en a sans cesse, c’est la loi du temps. L’une d’entre elles est restée célèbre : une fistule anale qui le fait fort souffrir. On est en 1686. Ses chirurgiens décident de l’opérer, entreprise hardie. De nombreux essais sont faits sur des cobayes que l’on va chercher dans les hospices. L’opération est

Weitere Kostenlose Bücher