Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises
discréditer à jamais, on les appelle « les rois fainéants ». Ce sont des monarques inconséquents que l’on représente à jamais couchés sur des fourrures dans de lents chars à bœufs. Il paraît que c’est ainsi qu’ils entendaient visiter leurs domaines. On connaît des images plus royales.
Repères
– 632 : mort de Mahomet et début des conquêtes arabes
– 711 : victoire des Arabes sur les Wisigoths ; installation dans la péninsule Ibérique
– 717 : Charles Martel, maire du palais, devient le principal maître du royaume d’Austrasie et rêve de refaire l’unité du royaume franc
– 732 : bataille de Poitiers
– 741 : mort de Charles Martel
Un des petits royaumes issus de ces siècles de division s’appelle l’Austrasie. Il se trouve à cheval sur ce qui est actuellement l’Est de la France, l’Ouest de l’Allemagne, la Belgique et le Luxembourg. Il a Metz pour capitale et pour roi un de ces « fainéants » oubliés. L’homme fort du moment, qui a peu à peu capté à son profit tous les pouvoirs, est le « maire du palais », une sorte de Premier ministre de l’époque. Il est le fils d’une des familles montantes de l’aristocratie franque. Son ambition est sans limites. Il gère l’Austrasie d’une main de fer, rêve en outre de restaurer à son profit l’unité perdue du puissant Empire franc de jadis, ne cesse de livrer des batailles à ses rivaux des royaumes voisins, et les gagne presque toujours. Il s’appelle Charles.
Arrivée des Arabes
En ce même début du viii e siècle, au sud, un nouveau peuple, hier encore inconnu, n’en finit plus de faire parler de lui. Sorti des déserts lointains, il a déjà remodelé à son profit la carte du monde, comme le firent les Barbares germains deux cents ans plus tôt avec la carte de l’Europe. Mais contrairement à eux, ces guerriers-là ne viennent pas embrasser la foi des vaincus. Ils veulent convertir le monde à la leur, telle qu’elle leur fut enseignée par Dieu et son prophète : ce sont les Arabes. Depuis un siècle, ils sont aussi musulmans.
Mahomet est mort en 632, il aurait dit à ses guerriers : « Allez de l’avant, l’enfer est derrière vous. » Montés sur leurs petits chevaux, le cimeterre à la main, un Coran dans les sacoches, et au cœur ce courage immense que donne la certitude d’obéir aux injonctions de Dieu, ils y sont allés. Côté levant, comme les soldats d’Alexandre le Grand longtemps avant eux, ils ont pris la Perse, se sont élancés en Asie centrale, bientôt ils iront se baigner dans l’Indus. Côté couchant (en arabe, on dit « Maghreb »), ils ont pris
l’Égypte, puis l’Afrique du Nord. Là, des Berbères convertis à leur culte se sont mêlés à eux pour passer le détroit de Gibraltar, défaire le dernier roi wisigoth d’Espagne (en 711) et s’installer jusqu’au-delà des Pyrénées. Désormais, leur empire s’étend jusqu’à Narbonne et la province de Septimanie (c’est-à-dire l’actuel Languedoc).
Les riches abbayes du Nord dont ils entendent parler titillent leur gourmandise. En suivant le Rhône, ils remontent jusqu’à Autun, qu’ils mettent à sac. Côté Atlantique, ils dévastent l’Aquitaine. Son duc, Eudes, n’arrive plus à la protéger. Il appelle à son secours le nouveau héros du monde franc : Charles.
En octobre 732, non loin de Poitiers, a lieu la rencontre. Les Francs, couverts de lourdes armures, opposent aux cavaliers maures et à leur chef l’émir Abd al-Rahman un « mur infranchissable » comme on l’écrira dans les chroniques. Les musulmans sont défaits et refluent. Ils n’avanceront plus jamais aussi loin au nord. Le chef austrasien – si l’on en croit la tradition – s’est tant déchaîné en agitant son « marteau d’armes » qu’il y a gagné le surnom sous lequel on le connaît toujours : « Charles Martel ». L’histoire de France à l’ancienne vient d’hériter d’un de ces chromos dont elle a le secret. Essayons d’en gratter le vernis.
La première chose qui frappe, lorsqu’on lit les spécialistes actuels à propos de la rencontre entre Charles et Abd al-Rahman, est la façon dont ils s’entendent tous pour la réévaluer à sa juste place : elle est très modeste. « Aujourd’hui, écrit une excellente Histoire du monde médiéval 1 , la bataille de Poitiers est considérée comme un fait militaire secondaire. » Les Arabes, estime-t-on désormais,
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