Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises
Plus tard, quand les Italiens entendent parfaire leur unité en prenant Rome, l’empereur, poussé par le parti catholique dont sa femme Eugénie est le pilier, tourne casaque. Il expédie un corps de soldats pour défendre le pape et les États pontificaux contre les amis d’hier.
Glissons sur le désastre mexicain : Napoléon III rêve d’établir là-bas un vaste empire latin et catholique qui ferait pièce à la puissance montante des États-Unis. Pourquoi pas ? Hélas pour lui, ni les Américains ni les Mexicains n’en acceptent le principe. Les Français réembarquent et l’empereur Maximilien, le protégé de la France, finit fusillé.
Reste le voisin d’outre-Rhin. Comme Victor-Emmanuel et Cavour en Italie, le roi de Prusse Guillaume et son chancelier Bismarck rêvent d’unir sous leur égide tous les Allemands, toujours éparpillés en petites principautés, duchés, royaumes ou villes libres, le Wurtemberg, le Bade, la Bavière, le Hanovre, la Saxe, etc., tous ces lointains débris du Saint Empire remodelé à l’époque napoléonienne. L’empereur d’Autriche estimait de son droit de le faire à leur place, mais les Prussiens lui ont fait la guerre et l’ont battu (1866). Reste à trouver un moyen de pousser tout le monde à accepter la suprématie de Guillaume de Prusse. Un bon conflit contre un ennemi commun est toujours un moyen efficace de souder les gens entre eux : le nouveau Napoléon qui règne à Paris semble tout indiqué. Bismarck cherche donc un prétexte pour le défier. Le trône d’Espagne est vacant. Il y pousse un candidat prussien. Vu de France, cela ferait des Allemands à l’est et d’autres au sud, c’est-à-dire beaucoup. Napoléon III s’énerve. De tous côtés, les opinions s’enflamment. Bismarck en rajoute en tripatouillant une dépêche diplomatique qu’il réussit à rendre insultante pour tout le monde : on l’appelle la « dépêche d’Ems », du nom de la ville d’eaux d’où elle est partie. Rage allemande, rage française. C’est l’étincelle qui manquait. En juillet 1870, confiante dans sa puissance, la France déclare la guerre à la Prusse, qui est vite rejointe par tous les alliés germaniques espérés. Le 20 août, une première armée française est enfermée dans Metz. Le 2 septembre, la seconde se fait piéger dans la cuvette de Sedan. Les Français sont à terre, Napoléon III fait piteusement prisonnier. Le 4 à Paris, Gambetta, leader de l’opposition, proclame la république. La Troisième, donc.
La III e République
Elle est née d’une défaite, en 1870. Elle mourra d’une défaite, en 1940. Cela fait soixante-dix ans, belle longévité. Pourtant, une fois de plus, les débuts sont difficiles.
Gambetta est un homme d’énergie, il a proclamé la république, il rêve aussi de la voir victorieuse. Mi-septembre, les Prussiens sont aux portes de Paris, dont ils commencent le siège. Dans un élan héroïque et fameux, notre républicain s’échappe de la capitale en ballon, pour aller exhorter le pays tout entier à la défense nationale. On se bat au nord, on se bat sur la Loire. Paris résiste miraculeusement à un siège impitoyable. On mange du chien, du chat, et même, raconte Victor Hugo enfin rentré d’exil, l’éléphant du Jardin des plantes. Tant d’efforts sont insuffisants. Bismarck a déjà ce qu’il veut. Le 18 janvier, dans la galerie des Glaces du château de Versailles – suprême offense pour les vaincus –, le roi de Prusse Guillaume relève la couronne millénaire d’Otton et de Charles Quint que Napoléon avait fait chuter. Tous les rois, les princes, les ducs d’un pays morcelé l’acceptent comme empereur d’Allemagne. Le « Deuxième Reich » est né. Fin janvier, la France épuisée demande l’armistice. Il conduira au traité de Francfort et à ce qui sera considéré comme un drame national : l’Alsace et une partie de la Lorraine deviennent allemandes. De notre côté du Rhin, on les appelle « les provinces perdues ». « N’en parler jamais, y penser toujours », dira-t-on pendant des années à leur propos, en ravalant de lourds sanglots patriotiques.
La guerre étrangère est finie. Place à la guerre civile. En février 1871, sous contrôle prussien, le pays effondré a organisé des élections qui ont amené à l’Assemblée nationale une majorité très conservatrice. L’inusable Adolphe Thiers en est le chef. Dans quelques grandes villes, le peuple
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