Paris, 1199
traversèrent
et sortirent par le cloître. Là, ils attendirent quelques instants, et,
constatant qu’ils n’étaient pas suivis, ils prirent la direction de la place de
Grève. Entretemps Bartolomeo avait raconté qu’il avait suivi le couple jusqu’à
une échoppe de tisserand. Il s’était renseigné. L’homme s’appelait Enguerrand,
c’était l’ancien syndic de la guilde. La fille était son enfant et se nommait
Sanceline.
En ce dimanche, les rues étaient presque désertes
et les boutiques closes mais la place n’était pas vide, car si la bourdonnante
activité du port était en sommeil, les familles se rendaient au bord de la
rivière pour jouer à la balle ou pêcher.
Ce fut Sanceline qui les aborda en passant près
d’eux pour leur glisser un discret : « Suivez-moi. »
Sans se retourner, elle descendit jusqu’à la grève
qu’elle longea jusqu’à une bâtisse de pierre à deux tourelles d’angle sans
ouverture sinon d’étroites archères ; une ancienne fortification jugea
Guilhem. Sanceline emprunta une rampe de bois menant à une profonde voûte
fermée par des grilles. Elle en ouvrit une avec une clef, poussa une porte
intérieure et entra. Ils la suivirent avec prudence, craignant un traquenard,
mais elle les attendait au milieu d’une salle obscure, vide de toute présence
humaine.
C’était un entrepôt, car des ballots étaient
empilés le long des murs et contre les piliers. Guilhem aperçut un escalier qui
devait conduire à une salle supérieure. Était-ce là que Robert se
cachait ?
— Vous m’avez suivie ce matin, dit la jeune
femme à Bartolomeo, donc vous savez qui je suis. Je me nomme Sanceline, mon
père est tisserand et vous êtes dans l’entrepôt de la guilde.
— C’est ici que se trouve ma sœur ?
demanda agressivement Bartolomeo.
— Non, elle n’est pas ici, nous allons passer
par la cave pour la rejoindre.
Elle alla à la porte, referma la grille à clef,
puis la porte de bois. La salle n’était plus éclairée que par deux archères.
Elle prit une lanterne dans une niche et un briquet de fer à amadou qu’elle
battit pour en allumer la chandelle.
Un autre escalier descendait vers une salle
identique à celle où étaient entreposés les ballots. Celle-là était vide et
humide. Sanceline se dirigea vers une extrémité et passa entre deux gros
piliers. Ils découvrirent une seconde salle à quatre arcs d’ogive avec une
grille de fer. Elle l’ouvrit avec une autre clef et leur dit :
— Nous allons suivre un long passage
souterrain, faites attention à vos têtes.
— Pour aller où ? s’enquit Guilhem avec
méfiance.
— Là où se trouvent vos amis.
Le souterrain était étroit et grimpait légèrement.
Guilhem sentait un sol sablonneux sous ses pieds, puis ce fut de la roche. Il
regardait attentivement autour de lui, se doutant que le prévôt de Paris
ignorait l’existence de ce passage utilisé certainement pour de la contrebande.
Comment Robert s’était-il trouvé mêlé à une telle histoire ? Plusieurs
fois, Guilhem heurta douloureusement la voûte et, finalement, il avança tête
rentrée dans les épaules.
Au bout d’un moment, ils débouchèrent dans une
salle basse aux voûtes soutenues par des piliers droits, sans chapiteaux. Ils
la traversèrent et distinguèrent un lit de planches avec une paillasse et des
couvertures.
— C’est là que se cachait le seigneur de
Locksley ? demanda Guilhem.
— Durant quelques jours, oui. Il y avait
aussi un de nos amis qui est recherché.
— Un cathare ?
— Qui vous l’a dit ? demanda-t-elle
d’une voix blanche.
— Je le sais, répondit Guilhem évasivement.
Elle s’était arrêtée. À nouveau, il perçut l’odeur
du romarin et pensa à Constance. Cette fois il chassa facilement son image et
sourit à la jeune fille dont il ne voyait que le visage éclairé par la
lanterne.
— Vous êtes des cathares, n’est-ce pas ?
affirma-t-il avec bienveillance.
— Comment le savez-vous ? demanda-t-elle
avec agressivité.
— Parce qu’on accuse Robert de Locksley
d’avoir aidé un tisserand cathare.
— Que savez-vous des cathares ?
— Je viens de Toulouse. Anna Maria vous l’a
peut-être dit, les cathares y sont nombreux.
— On dit qu’ils n’ont pas à se cacher,
là-bas, fit-elle, un peu rassérénée.
— Non, ils ont même des évêques. Où
sommes-nous ici ? questionna-t-il, désignant la salle d’un geste vague.
— Sous
Weitere Kostenlose Bücher