Paris, 1199
mon tour de te raconter maintenant ce que
m’a appris Cadoc… Cela te fera considérer la mort de Richard Cœur de Lion sous
un autre jour.
Locksley resta en effet abasourdi quand Guilhem
parla de l’archer envoyé par le prince Jean. Un archer qui ne ratait jamais sa
cible !
— C’est incroyable ! fit-il. Jean veut
faire assassiner le roi de France après avoir fait tuer son frère ! Qui
aurait imaginé que sa malfaisance puisse aller si loin ?
— L’archer est à Paris et se cache quelque
part, dit Guilhem. Cadoc est persuadé qu’il est chez les cathares, mais
connaissant désormais le rôle de tes amis Templiers, il ne peut être que chez
eux.
— Qui pourrait être cet archer, et comment
va-t-il s’y prendre ? s’interrogea Locksley à voix haute. Il ne pourra
tirer que de loin pour ne pas se faire prendre, et donc être sacrément bon.
— Tu m’as dit que Bracy est désormais au
service de Philippe Auguste. Il pourrait avoir préparé une embuscade en forêt.
— C’est bien possible… Mais avec cette
révélation, le guet-apens contre moi s’explique moins bien. Certes, Beaumanoir,
Malvoisin et Bracy voulaient s’approprier la statuette d’or, mais s’ils
préparent une si formidable entreprise, ils auraient dû éviter de se faire
remarquer.
— L’appât du gain a été le plus fort, soupira
Guilhem en haussant les épaules.
— Et s’ils voulaient vous capturer pour une
autre raison, seigneur comte ? suggéra Bartolomeo.
— Laquelle ?
— Cadoc vous accuse déjà d’être l’archer qui
doit tuer le roi. Pourquoi les Templiers n’auraient-ils pas décidé de vous
livrer après l’assassinat ? Vous feriez un coupable idéal et ainsi
personne ne pourrait les suspecter.
— Ce serait bien retors.
— Mais pas fol, reconnut Guilhem après un
instant de réflexion.
— Quel embrouillamini ! Mais Dieu soit
loué, nous n’avons pas à nous en mêler. Une seule chose importe à mes
yeux : Beaumanoir, Malvoisin et Bracy ont tué Richard et je vais leur
faire payer ce crime.
— Quel est ton plan ?
— M’installer dans une chambre en face du
manoir du Temple et leur décocher une flèche à chacun dès que je les verrai.
Guilhem approuva de la tête.
— As-tu trouvé cette chambre ?
— Non, j’ai besoin de toi pour cela. Il y a
une rue Putigneux, un peu plus haut que le manoir. Amaury m’a dit qu’il
pourrait m’y trouver un bouge d’où je pourrais tirer. Mais comme il ne connaît
rien au tir à l’arc, je n’ai pas voulu qu’il le choisisse seul. Il pourrait
prendre un endroit qui ne me convienne pas. Quant à y aller moi-même, ce serait
courir le risque d’être reconnu par Malvoisin ou Beaumanoir. Il n’y a donc que
toi qui puisses le faire, tu es le seul à avoir l’expérience nécessaire pour
trouver le meilleur emplacement.
— J’irai donc avec Amaury. Où est-il ?
Locksley grimaça.
— Justement, il a disparu depuis quelques
jours !
— Est-ce inquiétant ?
— Non ! Ce n’est qu’une querelle
d’amoureux ! Amaury aime Sanceline et ils se sont disputés.
Locksley ne remarqua pas que Guilhem pâlissait.
— Elle l’aime ? s’enquit-il
négligemment.
— Même si elle l’aimait, elle ne l’épouserait
pas. Le père de Sanceline est Parfait. Sais-tu ce que cela veut dire ?
Guilhem hocha la tête.
— Elle veut devenir Parfait, comme lui. Elle
réprouve l’amour charnel et le mariage. Amaury doit partir à Albi avec son père
et il souhaite qu’elle l’accompagne, mais elle a refusé.
— C’est pour cela qu’ils se sont
disputés ? demanda Bartolomeo.
— Pas seulement. Amaury reste un voleur, même
s’il respecte vaguement quelques préceptes cathares, aussi elle lui a dit
qu’elle ne voulait plus qu’il lui parle de mariage. Je pense qu’il est fâché et
qu’il boude quelque part. Je sais où il habite, mais je ne peux pas envoyer
Sanceline chez lui. Quant aux autres cathares, ils ne l’estiment guère et je ne
veux pas les embarrasser. Mais maintenant que Bartolomeo est là, il pourrait
aller le chercher.
De nouveau Guilhem hocha la tête. Ce que venait de
lui dire son ami l’avait perturbé et il s’efforçait de dissimuler son trouble.
— Seulement tu pourras attendre longtemps à
surveiller le manoir. Qui te dit que Bracy y vient souvent ?
— Il y loge. Le syndic des tisserands, Noël
de Champeaux s’est renseigné pour moi.
— D’accord, mais il faudra
Weitere Kostenlose Bücher