Paris, 1199

proposa Bartolomeo.
    C’était la cage d’écureuil d’une grande grue à
roue installée devant un arc-boutant. Contre elle se dressait un mât formé d’un
énorme tronc d’arbre avec une potence à poulie à son extrémité. Une grosse
corde allait de la roue à la potence et redescendait jusqu’à une plateforme en
planches. En faisant tourner la roue, la corde s’enroulait autour du tambour et
soulevait le plateau, permettant de monter des pierres et du mortier.
    — Mettez-vous dans la roue, seigneurs, et que
le sire de Locksley se mette sur le plateau ! proposa Bartolomeo à Guilhem
et Bracy. En faisant tourner la cage d’écureuil, vous le monterez jusqu’au
sommet des arcs-boutants.
    — Mais je serai encore loin de la galerie,
remarqua Robert de Locksley. Devrais-je sauter comme un singe ?
    — Je vais grimper au sommet de l’échafaudage.
J’y aperçois des cordages. J’en prendrais un et, de la petite galerie, je vous
en jetterai une extrémité. Vous avez remarqué que la potence pivote autour du
mât grâce à un anneau de fer ? Quand vous serez en haut, je tirerai la
corde et votre plateau s’approchera du plancher de l’échafaudage. Vous n’aurez
qu’à passer dessus et me rejoindre à pied.
    Tout en parlant, il désignait du doigt les
différents endroits que Locksley suivait du regard. Brusquement, un éclair
déchira le ciel et le tonnerre gronda.
    — Vrai Dieu ! Ça me convient !
lança le Saxon, mais pressons-nous, car l’orage gronde. Compagnons, êtes-vous
prêts à jouer à l’écureuil ? demanda-t-il d’une voix joyeuse.
     

Chapitre 31
    B racy
et Guilhem entrèrent dans la cage ronde pendant que Bartolomeo grimpait sur les
perches comme un singe. Locksley, lui, s’installa sur la plateforme et attrapa
fermement le gros cordage qui la soulèverait.
    Se balançant à bout de bras, Bartolomeo était déjà
arrivé en haut. Il lança l’extrémité d’une cordelette au Saxon avant de gagner
la galerie, s’accrochant aux morceaux de bois tel un équilibriste.
Immédiatement les deux hommes dans la cage commencèrent à marcher lentement.
    Peu à peu, le cordage s’enroula et Robert de
Locksley sentit la plateforme bouger. Habituellement un ouvrier utilisait un
frein à l’arrière de la roue pour la bloquer, mais, comme ils n’étaient pas
assez nombreux, ce serait aux deux marcheurs d’éviter que la roue ne tourne en
arrière. Pour y parvenir, ils faisaient des pas très courts et très lents en se
cramponnant solidement aux côtés de la grue.
    Peu à peu, Locksley commença à monter, tenant arc
et flèches d’une main et le cordage de l’autre. En même temps, Bartolomeo
tirait sur la cordelette et, dans un grincement plaintif et monotone, la potence
se tourna lentement vers la galerie supérieure. L’élévation était très lente.
Dans la roue, Guilhem s’inquiétait. Si des gens arrivaient, ils
s’interrogeraient sur ce qu’ils faisaient et pourraient bien prévenir les
gardes. Robert de Locksley et Bartolomeo n’auraient alors jamais le temps de
fuir.
    Au fur et à mesure que la corde se tendait, les
deux marcheurs faisaient un effort de plus en plus important pour que le
plateau monte. De nouveau, des cloches retentirent et les hourras éclatèrent.
Le roi arrivait-il ?
    Finalement, la plateforme se trouva à quelques pas
d’un plancher d’échafaudage qui surmontait l’arc-boutant. Lâchant la corde et
s’agrippant à une tête grimaçante de chimère, Robert de Locksley sauta et
rejoignit facilement Bartolomeo qui l’aida pour passer sur l’étroite galerie.
    — Attends-moi là, ordonna Locksley.
    Il s’élança en courant vers la façade de la
cathédrale. La galerie à colonnettes se terminait par un parapet d’où il avait
une vue somptueuse sur le parvis et la rue Notre-Dame. Toutes les maisons
étaient pavoisées, tapissées de haut en bas de draps camelotés aux armes de
France. Partout le populaire s’entassait sur les toits et aux fenêtres en
criant : « Noël ! Noël ! »
    En bas, la foule était innombrable, à peine
contenue par des sergents qui la repoussaient à coups de boulaie [63] . Au bout de la rue,
le cortège royal approchait lentement, précédé d’une procession de religieux
portant de saintes reliques et chantant le Benedictus qui venit.
    Examinant le toit, Locksley passa en revue les têtes
de tarasques et les gargouilles qui le dévisageaient, mais il n’y avait aucune
trace d’un être