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Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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Giacomi me voyant dans les pleurs,
l’enfantelet dans les bras, et mon pourpoint gâté par le sang.
    — L’enterrer
dans ce jardinet que voilà pour non pas que les chiens le dévorent, pensement
qui me fait mal. Fröhlich, je te prie, brise-moi cette clôture !
    Ce que fit
Fröhlich en un tournemain, et creusa l’humus ensuite de sa pertuisane pour y
enfouir le petit mort, le recouvrant de terre et d’une grosse pierre de
surcroît pour qu’il ne fût pas défoui. De tout ce temps, le logis derrière quoi
nous étions à ce triste labour resta les paupières closes, ses manants courant
encore les rues aux besognes que l’on a vues ou peut-être dormant comme plomb
pour la fatigue d’avoir tant tué.
    Nous arrivâmes
trop tard au logis de la Tête Noire, lequel était jà éventré, le toit à demi
brûlé, les meubles hors, et dedans sur le degré, le corps de Taverny gisant,
l’épée à peine échappée de la main, et trois ou quatre marauds épars sans vie à
l’alentour, preuve que le Lieutenant de robe courte s’était comme un vaillant
défendu.
    Dans la salle
basse, nous surprîmes une dizaine de pilleurs à leur bel ouvrage, lesquels
étaient, à ce que je cuide, des crocheteurs, gagne-deniers et mazeliers du
proche quartier de l’Écorcherie. Ces vaunéants, voyant que nous n’étions que
quatre, et croyant que nous avions appétit à leur disputer leur picorée, nous
voulurent assaillir à l’avantage, ce dont ces fols qui n’avaient ni corselet ni
morion n’eurent même pas le temps de se repentir, Giacomi, d’entrée de jeu en
étendant trois sur le carreau de sa bonne épée, Fröhlich faisant tel carnage de
sa pertuisane que derechef il en brisa le manche, et moi et Miroul dépêchant le
reste à la chaude, hormis un seul qui eut l’esprit de s’ensauver.
    — Ha !
Fröhlich ! dis-je, te voilà derechef sans pertuisane !
    — Mon
gentilhomme, voilà qui me suffit ! dit le bon Suisse, ramassant à terre un
marelin, lequel est une grosse masse en fer qu’un de ces mazeliers avait
abandonnée, et qui leur sert à l’accoutumée, à assommer les bœufs. Et balançant
comme plume le pesant outil au bout de son bras musculeux, Fröhlich en fit tout
de gob des moulinets qui ne laissèrent pas de nous ébahir.
    On trouva en
la cuisine du pain et du fromage que ces picoreurs avaient dédaignés (cherchant
denrées moins périssables) et après que j’eus divisé par quatre ce maigre
butin, nous le happâmes et gloutîmes comme chiens dévorants, sans prendre
souffle ni mot piper. Sur quoi, Miroul furetant comme fouine en poulailler,
encontra un flacon de vin que c’était bien miracle qu’il eût échappé au nez des
pilleurs. Et de ce miracle-là nous fîmes prompte justice à la régalade, étant
tout desséchés par notre longue course en cette chaude nuit.
    Cependant,
Giacomi jetant un œil par les verrières crevées, le jour étant pour lors levé
et clair, vit que notre fuyard s’en revenait avec des manants de sa farine, au
nombre de quarante au moins, tous hérissés de piques et d’épieux, tant est
qu’on eût dit qu’une bonne part du quartier de l’Écorcherie, avec ses bouchers,
mazeliers et crocheteurs allait nous tomber sus pour se revancher de ses morts.
On se mit donc à la fuite dans un petit viret de tourelle, Fröhlich montant le
premier par la bonne heure, car le viret étant obscur, et sa marche
précipiteuse, il alla donner du crâne contre une trappe de fer qui sous le choc
s’entrouvrit, mais sans le navrer prou, tant ces bons Suisses de Berne ont la
tête dure. S’aidant alors du marelin, il ouvrit la trappe tout à plein, et par
cette échappée, nous passâmes sur le toit, nos manants dans le logis faisant
une vacarme d’enfer et hurlant « À la cause ! » tandis que nous
marchions sur le toit à demi brûlé à grand risque de nous rompre le col ou
d’être arquebusés.
    Ainsi
cahin-caha cheminant, on atteignit une lucarne de toiture qu’à grands coups de
marelin Fröhlich défonça pour s’ouvrir un passage, par où il se lança
bravement, mais sans dol ni dommage, y ayant là un fenil regorgeant de foin
odorant. On pensa à s’y gîter pour y passer le jour, et on se fit au plus épais
un nid où nous étendîmes nos membres recrus comme sur la plus moelleuse couche
(encore que piquante assez) et de ces aises si bienvenues nous ronronnions
quasiment quand tout soudain nous sentîmes notre lit sous nous céder. Et
Fröhlich, nous

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