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Prophétie

Prophétie

Titel: Prophétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom , Georges-Michel Sarotte
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réfléchissant à mes dossiers, notamment à celui d’Adam Kite, dont l’audience était fixée au mardi. Je passai le pavillon d’entrée, fis un signe de tête au portier, puis traversai la cour couverte de neige boueuse pour gagner mon étude.
    Il ne faisait pas encore grand jour. Rares étaient les fenêtres déjà éclairées, mais, à ma grande surprise, je vis une lumière briller dans mon cabinet. Barak avait dû venir directement de l’endroit où il avait passé la nuit, sans rentrer d’abord chez lui. Le misérable ! pensai-je.
    Un cri me fit sursauter. Un homme hurlait de terreur. Près de la fontaine, deux personnes fixaient l’eau. « Seigneur Dieu ! » criait l’une d’elles.
    Je traversai la cour pour les rejoindre. Sous la glace brisée en plusieurs morceaux, l’eau était rouge, d’un vermillon éclatant. Mon cœur se mit à cogner comme un fou.
    À leurs courtes robes noires je compris que les deux jeunes gens qui ne détachaient pas leur regard de la fontaine étaient des étudiants. L’unétait petit et râblé, l’autre grand et mince. Les yeux rougis, ils devaient rentrer à leur résidence après une nuit de foire.
    « De quoi s’agit-il ? lançai-je d’un ton brusque. Que se passe-t-il ? »
    L’étudiant râblé se tourna vers moi. « Il y a… Il y a un homme dans la fontaine », déclara-t-il d’une voix tremblante.
    L’autre étudiant désigna quelque chose pointant hors de l’eau. « Ça… ça c’est un pied. »
    Je scrutai leur visage, me demandant s’il s’agissait de quelque farce. Mais en avançant plus près j’aperçus dans la lumière croissante une jambe d’homme bottée dressée entre des morceaux de glace. Prenant une profonde inspiration, je me penchai en avant et discernai la forme d’une longue robe sombre gonflée de cette eau rouge vif. Il s’agissait donc d’un avocat. Après un bref vertige, je me ressaisis et m’adressai aux étudiants. « Aidez-moi à le tirer de là ! » m’écriai-je. Celui qui m’avait parlé recula tandis que l’étudiant grand et mince s’approchait de la fontaine.
    « Il vous faudra tirer sur la jambe, dis-je. Et ensuite je l’empoignerai. »
    L’étudiant se signa, agrippa la cheville, prit son souffle et tira. De gros morceaux de glace se soulevèrent au moment où émergea la jambe, puis le corps. L’autre étudiant m’aida à attraper le cadavre glacial.
    Nous le sortîmes de l’eau, puis le déposâmes sur le sol couvert de neige boueuse. La robe était passée par-dessus la tête, dissimulant le visage du malheureux. Le corps était celui d’un petit homme svelte.
    « Regardez cette eau ! » chuchota le grand étudiant. La lumière du jour révélait une étendue circulaire rouge vif.
    « C’est plein de sang, déclara l’autre. Grand Dieu ! »
    Je me retournai vers le corps. Je tremblais, et pas seulement à cause de l’eau glaciale qui m’avait trempé au moment où nous avions sorti le corps de l’eau. Je m’accroupis, saisis le bas de la robe et dégageai le visage.
    « Dieu du ciel ! » s’écria l’un des étudiants. Il se détourna et j’entendis un vomissement. Je demeurai médusé par ce qui était pour moi doublement horrible. Il y avait d’abord la grande blessure ouverte dans la gorge de l’homme, écarlate sur la peau blanche et s’étendant presque d’une oreille à l’autre. Et ensuite, le visage. Celui de Roger.

6
    J e restai quelques instants interdit , fixant cet horrible cadavre, sa terrible blessure à la gorge. Roger avait les yeux fermés et son visage d’albâtre semblait paisible. Ses traits, pensai-je, auraient dû être tordus de douleur, étant donné l’atroce façon dont il était mort. L’espace d’une seconde j’eus le fol espoir que ce corps gisant sur le sol ne fût pas celui de Roger, mais une figure de plâtre fabriquée par quelque artiste dément pour faire une plaisanterie macabre. Hélas ! j’aperçus alors un filet de sang sombre jaillir du cou et couler sur la neige.
    « Je vous en prie, monsieur, recouvrez-le ! » s’écria l’étudiant râblé d’une voix suraiguë. J’enlevai mon manteau et me penchai au-dessus du corps. L’émotion eut soudain raison de moi. « Oh, mon pauvre ami ! » m’écriai-je, les larmes me montant aux yeux comme je frôlais des doigts son visage. Il était glacial. Je le recouvris de mon manteau et m’agenouillai à son côté, sans chercher à retenir mes larmes.
    Une main

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