Qui étaient nos ancêtres ?
d’impôt que pour constituer les dossiers de demande de retraite…
Dans ce château (ou sa maison dite « de maître »), le propriétaire est proche de ses fermiers et métayers. La visite qu’on lui fait, généralement à la tombée de la nuit, une fois les travaux terminés à l’étable et à l’écurie, en prenant la précaution d’ôter ses sabots sur le seuil – comme on le fait pour entrer chez soi –, mais sans pour autant quitter ses vêtements de travail imprégnés des odeurs d’étable, a un caractère « bon enfant » et est empreinte à la fois de confiance et d’estime.
Il en va tout différemment à l’égard du régisseur, considéré avec beaucoup plus de défiance, généralement perçu comme un homme dur et avide, dont l’ambition première serait de profiter à la fois du faible, qu’il asservit, et du fort dont il cherche à abuser de la confiance par tous les moyens. « J’ay commencé de faire valoir le domaine de Martigny à la saint Martin 1757, note dans ses livres de comptes l’Autunois Jacques Desplaces, avec pour fermier Lazare Chevalier, un des plus grands coquins que j’ai connus. »
Lorsque le maître est absent ou vit au loin, ou encore lorsqu’il est « faible » ou dépendant, notamment lorsque c’est d’une femme (souvent une veuve) que notre régisseur tient son mandat, une de ses tactiques favorites sera le sabotage. De mauvais résultats réduiront peu à peu les revenus de la terre et pousseront son employeur à la vente. Notre homme se proposera alors comme acquéreur, à bas prix, allant parfois jusqu’à proposer une aide matérielle ou, mieux, un mariage, par exemple entre sa propre fille et le fils du propriétaire, pour sortir l’infortunée famille de la mauvaise passe où sa perverse stratégie l’aura placée.
Tel un curé sondant les âmes, le régisseur inspectait inlassablement intérieurs et extérieurs, cours et basses-cours, étables et terres, débarquant à tout moment, aux labours comme aux moissons, exigeant des explications, dépliant, le jour dit, un relevé de comptes rarement équilibré et présenté si rapidement que les malheureux métayers illettrés et lents au calcul mental ne pouvaient que l’approuver. Émile Guillaumin nous dresse ainsi le portrait sans complaisance d’un certain Fauconnet qui, au moindre désaccord, se piquait de susceptibilité, et se disait toujours prêt à poursuivre en justice pour « injures et atteintes à l’honneur », menace alors plus redoutée que celle d’un congé.
Cette fonction de régisseur s’est dégagée dès le XVII e siècle, consécutivement à la reconstitution, par les bourgeois des villes, des grands ensembles fonciers qui s’étaient effrités à la fin du Moyen Âge. Elle est alors généralement tombée entre les mains des « marchands-fermiers » et des laboureurs aisés, dont les familles, solidement unies par des liens de parenté et d’alliance, se sont partagé le monopole des régies. Dans les arbres généalogiques de ces lignées, on va naturellement rencontrer nombre de curés, de maires, de notaires ainsi que d’autres notables et coqs de villages, s’entendant tous pour tisser les savantes et épaisses toiles d’araignées quadrillant l’ancien monde.
Autres notables : les héritiers de Diafoirus
À ceux qui s’attendraient à trouver le médecin au rang de nos notables, disons tout de suite que le cas était rare.
Ce n’est qu’au milieu du XX e siècle, à la faveur du remboursement de ses visites et des médicaments par la Sécurité sociale, que s’est développée l’habitude du recours au médecin et que l’on a vu les médecins de campagne faire fortune.
Des siècles durant, l’héritier du mire du Moyen Âge et du Diafoirus de Molière, la tête pleine d’une science souvent aussi vaine qu’impuissante, n’a occupé qu’une place très discrète, ce qui ne saurait étonner quand on lit sous la plume de Montesquieu que « ce ne sont pas les médecins qui manquent, mais la médecine ». À la science et au latin du serviteur d’Hippocrate, que l’on appelle à la fin du XVIII e siècle « officier de santé », on a longtemps préféré les intercessions du curé et des saints, les prières des rebouteux pour conjurer les maladies, comme les herbes magiques des sorciers ou les drogues proposées par les colporteurs.
La « bouteille magique » qu’utilisaient les « herboristes » ambulants pour
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