Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Qui étaient nos ancêtres ?

Qui étaient nos ancêtres ?

Titel: Qui étaient nos ancêtres ? Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Louis Beaucarnot
Vom Netzwerk:
Saint-Roch, n’épouseront que des enfants d’autres maîtres rôtisseurs-traiteurs, et tous de la rive droite. À Laas, près de Pithiviers, les Dauvois, que l’on y voit se transmettre la profession de charron, sur dix générations, n’épouseront que des filles de charrons. Le mariage homogène est la règle, l’hétérogène, l’exception.
    Mieux, on n’hésite pas à chercher sa femme au sein du cercle familial. Un adage l’énonce clairement : « Si tu le peux, marie-toi dans ton village, et si tu le peux, dans ta rue, et si tu le peux dans ta maison. » En Bourgogne, en 1822, le maire des Bizots unit ainsi Joseph Duverne et Marie-Catherine Duverne, dont les deux pères et les deux mères sont tous quatre des Duverne. En Poitou, Pierre Bouquet, qui naît à Coulombiers en 1843, a quatre grands-parents homonymes, ses deux grands-mères – Radegonde Bouquet et Madeleine Bouquet – étant même carrément sœurs ! Et l’on ne finirait pas de trouver de tels exemples dans les archives des régions où prospéraient les communautés taisibles…
    Les seules considérations qui retiennent sur cette voie sont, un peu, la peur et le tabou de l’inceste, et plus encore la perspective de la dispense que M. le Curé exigera, et fera payer, après s’être parfois livré à une enquête publique pour démontrer une parenté que l’on espérait pouvoir lui cacher. De ce fait, on préférera rechercher les mariages avec des familles déjà alliées et connues. Entre 1689 et 1734, une chaîne de six mariages uniront successivement les familles de muletiers des villages de Saint André-des-Alpes et de Barrème. À Haveluy, Martin Delsaut épousera Remfroye Dubus, qui est la sœur de l’épouse du fils de la sœur de son père et la filleule de la sœur de son parrain : des liens multiples, mais pas de parenté, et donc pas de dispense ! Quel que soit leur milieu social, toute la stratégie de nos ancêtres consiste donc à faire des mariages appareillés. Les vieillards y consacrent toute leur science, et dans un cortège de noce un cavalier ne reçoit jamais une cavalière au hasard. Il sait que cette cavalière est épousable, c’est-à-dire non seulement qu’elle n’est pas interdite par l’Église, mais encore qu’elle lui est recommandée par la communauté. « Qui va à la noce, dit-on en Alsace, va chercher une fiancée. »
    Mariages préparés et tabou de l’inceste
     
    Se marier ni trop loin ni trop près : tel était l’idéal que les anciens ne perdaient jamais de vue lorsqu’ils faisaient – comme l’on disait – « l’amour pour les jeunes ». C’est ainsi que l’on appelait les stratégies, souvent complexes, déployées par les parents, s’appuyant volontiers, avec l’aide de la mémoire des anciens, sur le principe de « rotation des dots » rencontré en Gévaudan, et qui fonctionnait dans nombre de régions pour arranger un bon et beau mariage. Mariage préparé, programmé, mais qui n’en était que plus sûr de réussir s’il n’avait pas l’air d’être recherché. Les jeunes ignoraient le projet tramé, ou faisaient mine de l’ignorer, afin peut-être de donner à la communauté – et à eux-mêmes – l’impression que le choix avait bel et bien été le leur. En fait, pour peu que le candidat ou la candidate ne soit pas trop laid, ce genre de mariage, souhaité par les deux familles, était déjà séduisant comme gage de paix quotidienne…
    La plupart des mariages ainsi préparés l’étaient donc en étroite union avec les vieillards, détenteurs d’une mémoire plus ancienne, et mieux à même d’éviter les mariages consanguins que le curé aurait été ravi de taxer. Dès lors, ceux-ci se livraient à des équations compliquées mais qu’ils maîtrisaient parfaitement pour, à l’occasion d’un mariage, distribuer ainsi les jeunes gens à marier parmi les cavaliers et les cavalières du cortège. Les frères du marié avec les sœurs de la mariée, les cousins germains de l’un avec ceux de l’autre (à condition qu’ils ne soient pas eux-mêmes cousins entre eux par une autre branche), tout cela en ayant soin d’appareiller les âges et les conditions sociales, quitte à ce que ces choix aient parfois été suggérés (on ne se serait pas permis de les demander) par tel ou tel parent à la recherche d’un gendre ou d’une bru. Ensuite, on laissait faire les choses, mais l’expérience avait montré que la formule était

Weitere Kostenlose Bücher