Qui étaient nos ancêtres ?
billets ni pièces spécifiques et que vous ayez dû payer vos achats en utilisant les monnaies des douze pays de la zone euro et en vous appuyant sur les équivalences monétaires.
On mesurera, par rapport aux humbles mobiliers paysans, la richesse des meuniers d’Osny, en Île-de-France, lorsqu’on trouve, dans la maison de l’un d’eux, fauteuils, chaises, livres d’église, cols de mousseline, une robe de chambre et une glace (!) et quand on voit sa femme posséder une croix de diamant et deux bagues, une croix d’or avec cœur et un collier de grenats de quatre rangs. Quelle richesse ! Ajoutons que ce meunier a encore trois mulets, cinq chevaux, trois ânes, un bidet, neuf vaches et trois veaux, deux chèvres et un chevreau. Mais il est vrai que les baux sont chers : Claude Henry Demarquets, qui a épousé, en 1735, avec une dot de 5 000 livres, une fille de meunier lui en apportant 3 000, paie chaque année un loyer de 1 000 livres… et trois gâteaux.
Prenons un exemple moins ancien : la dot citée dans un contrat établi en 1865, quelques jours avant que ne soit célébré le mariage de deux enfants de cultivateurs beaucerons, Auguste Isidore Vathome, cultivateur à Vert, et Louise Amélie Perdriel, de Richebourg. La dot de l’époux est évaluée à « 500 F lui provenant de ses gains et épargne , en linges, meubles, ustensiles de ménage et deniers comptant, et un hectare soixante-treize ares dix-neuf centiares de terres, bois et vignes ». Celle de la mariée consiste en « la somme de treize cents francs, quelle a en sa possession, en habits, linges, hardes, vêtements, bijoux et objets mobiliers ». Sachant qu’un journalier agricole (non nourri) gagne à cette époque environ 2,50 F par jour, on voit que la dot du marié équivaut à environ deux cents jours de travail de ce salarié agricole, et celle de la mariée à environ deux ans de travail. On se risquera donc, si l’on tient à convertir, à avancer, pour les deux dots réunies, la somme actuelle de 30 000 euros… C’est beaucoup trop fort, vous récriez-vous ! Vous avez sans doute raison… En 1865, l’argent n’avait pas encore la place qu’il occupe de nos jours. Et cela fausse tout…
Mieux vaut, dès lors, transposer. Mais en quoi ? En bœufs, dont on peut trouver sans trop de difficulté le prix pour chaque époque. Mais après ? Si vingt livres était le prix d’un bœuf en 1692, comment imaginer ce que cela représenterait aujourd’hui ? Le prix d’un bœuf ? Environ 900 euros ? Mais en 1692, un bœuf constituait un des principaux actifs d’un patrimoine. Ne valait-il pas un demi-tracteur ? Doit-on, dès lors, passer à 10 000 euros ? Par quelque biais que l’on prenne le problème, on a bien du mal à trouver des références et des valeurs communes entre nos deux mondes. C’est comme si vous vouliez parler franc, dollar ou euro avec des Martiens descendus de leur soucoupe… Deux mondes différents. Deux planètes différentes.
III.
QUE PENSAIENT-ILS ?
« HEUREUX LES AFFLIGÉS ! »
1
Naïfs ou sages ?
Sur la planète de nos ancêtres, on n’était donc jamais très riche. En souffrait-on pour autant ? Hommes et femmes se sentaient-ils malheureux ? Étaient-ils gais ou tristes ? Il est clair qu’il est impossible de prétendre répondre à ces questions, et surtout d’y répondre par oui ou par non. Comme aujourd’hui, il fallait de tout pour faire un monde et chaque individu avait évidemment son propre caractère et sa propre personnalité.
Mais si l’on ne peut sonder les cœurs, on peut cependant en retrouver les clés. Si les mentalités d’hier étaient différentes des nôtres, c’est avant tout qu’elles étaient imprégnées et conditionnées par des éléments divers, des règles, des normes, des lois qui ont disparu de notre univers et qui donnaient alors tout leur fondement et toute leur portée à certains gestes qui nous paraissent aujourd’hui aberrants ou naïfs. Le fait de tremper une statue dans un puits, comme de ne pas connaître sa date de naissance ou de servir une omelette au lieu de simplement dire non, n’était ni gratuit ni improvisé, et nous devons bien nous garder de les juger selon nos valeurs sans connaître les bases sur lesquelles ils reposaient et qui leur donnaient leur portée. Tout comme le voyageur partant en 2002 à la rencontre de la civilisation amazonienne ou tibétaine, qui veut explorer valablement le monde de ses
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