Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
Vom Netzwerk:
Diable, lieutenant,
    excusez ma méprise. De nos jours, les armées de terre de toutes les nations s’affublent
    curieusement de ces mêmes vêtements bariolés bizarres… »
    Alors seulement l’amiral
    de Boisanger semble réaliser. Son masque tombe, son monocle s’échappe de son
    orbite, il reste muet un instant contemplant le jeune officier, enfin il
    reprend sur un ton naturel qui ne laisse plus percer que l’émotion :
    « Nom de Dieu, mon
    vieux, nom de Dieu ! » L’amiral descend les trois marches qui le
    séparent de Thomé qu’il étreint, puis il s’écarte, conservant ses mains sur les
    épaules du parachutiste, le dévisageant avec une joie et une passion muettes. Enfin
    il le lâche, hoche la tête et répète : « Nom de Dieu ! »
    Le lieutenant Thomé a
    pris un bain, s’est rasé, déguste l’omelette confectionnée par la vieille
    servante. L’amiral de Boisanger a téléphoné à la poste de Daoulas. Il a chargé
    le facteur de prévenir deux hommes. L’amiral et le lieutenant les attendent. L’amiral
    explique :
    « Ferdinand est l’un
    des responsables des Francs-Tireurs et Partisans ; il a sous ses ordres
    une centaine d’hommes de bonne volonté, mais pratiquement aucun n’est armé. Le
    second, Paul Lehir, est garagiste à Daoulas, c’est un remarquable mécano. Lui, appartient
    aux Forces françaises de l’Intérieur, ils sont également une centaine sur
    lesquels vous pourrez compter. Mais, d’après ce que je crois savoir, eux non
    plus ne possèdent pas la moindre arme valable.
    — Francs-Tireurs et
    Partisans ? Forces françaises de l’Intérieur ?
    — On dit F. T. P et
    F.F.I. Pour moi ce sont tous des patriotes, mais il faut admettre que, dans l’ensemble,
    les F.T.P. forment une troupe mieux organisée et plus disciplinée. Ils
    combattent sous une étiquette politique d’extrême gauche. Ils sont issus des
    communistes persécutés par les nazis. »
    Ferdinand, le F.T.P., arrive
    le premier. D’emblée il déplaît souverainement à Thomé. Malgré son extrême
    jeunesse, il adopte un ton suffisant et arrogant.
    « Ils se sont quand
    même décidés à vous envoyer ! dit-il. Je suppose que vous avez des armes à
    nous remettre ? »
    Thomé fait la sourde
    oreille. Il a attaqué un gros morceau de fromage, coupe une tranche de pain à l’aide
    de sa dague de commando. Il ne répond pas, ne semble préoccupé que par la
    succulence de son repas.
    « Malgré mes
    vêtements civils, je vous signale, lieutenant, que mon grade est capitaine, que
    par ce fait, vous et vos hommes vous trouvez sous mon commandement. Il y a une
    semaine que l’état-major du général Kœnig nous a fait part de l’imminence de
    votre arrivée. Une dernière fois, je vous somme de me répondre : Quand
    comptez-vous nous distribuer les armes qui nous sont destinées ?
    — Si vous m’y
    autorisez, amiral, je reprendrai volontiers un peu de votre délicieux fromage
    de chèvre, susurre Thomé sur un ton mondain, en se servant un verre de cidre.
    — Mais je vous en
    prie, lieutenant, réplique Boisanger, qui entre dans le jeu. Ils n’ont plus, hélas !
    la même teneur en matière grasse qu’avant le conflit, mais la saveur demeure.
    — Vous vous foutez
    de moi, écume le F.T.P. Vous n’avez pas encore les deux pieds sur le sol de
    France et déjà vous redevenez les laquais de la noblesse et de la bourgeoisie. »
    Thomé se lève. Il essuie
    et rengaine sa dague. Sans élever la voix, plongeant son regard noir vers
    Ferdinand, il déclare :
    « Écoute, mon
    bonhomme, comme je ne pense pas qu’un con soit nécessairement un mauvais soldat,
    si j’avais des armes, je te les distribuerais. Mais pour l’instant, si tu ne
    fermes pas ta grande gueule, tout ce que je vais te distribuer c’est un coup de
    pied au cul qui va t’envoyer valser jusqu’à Moscou. »
    Pendant que Thomé
    parlait, Paul Lehir, le mécano, est entré. Le chef des F.F.I. n’a rien perdu de
    la réplique, il est souriant, presque hilare. Il applique une grande claque dans
    le dos de Ferdinand, va serrer chaleureusement la main de Thomé, plus
    respectueusement celle de l’amiral, puis en quelques mots habiles, il arrondit
    les angles.
    « Allons, Ferdinand,
    c’est pas un curé… C’est même peut-être pas un aristocrate… C’est un parachutiste
    français qui vient combattre à nos côtés. (Se tournant vers Thomé ; il
    poursuit :) Ne mésestimez ni Ferdinand ni ses hommes, mon lieutenant.

Weitere Kostenlose Bücher