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Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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balance des vacheries, alors que ça fait un
    quart d’heure que tu essaies de me saper le moral avec tes conneries. Tu crois
    que c’est marrant ? Depuis dix jours, on se crève le cul comme des damnés,
    aujourd’hui je décide de t’offrir un après-midi de détente, une promenade à la
    campagne en décapotable, et qu’est-ce que j’entends ! « Les Boches
    ont des fusils mitrailleurs… Et il y a des S.S. à Landerneau… Et ma Mercedes, elle
    braque pas… » Avoue qu’il y a de quoi s’énerver !
    — Oh ! ça va, allons
    nous détendre chez les S.S., concède Klein.
    — Vous m’emmenez, mon
    lieutenant ? lance Guichard, qui a assisté à la « prise de gueule »
    de ses supérieurs. Moi j’ai pas peur !
    — Continue sur ce
    ton, Guichard, balance Klein, hargneux, et attends que je te coince seul à seul.
    Tu regretteras de ne pas être tombé dans les mains de la Gestapo.
    — Il a raison, Guichard,
    tranche Thomé. Dans l’armée, l’esprit est le privilège des gradés. Les
    subordonnés doivent se contenter de rire des plaisanteries de leurs supérieurs,
    même si elles ne les amusent pas. C’est fondamental.
    — En attendant, va
    chercher une caisse de grenades, interrompt Klein. J’en veux plein les sièges. Je
    sais bien qu’on va se promener, qu’on va se détendre, mais on ne sait jamais. »
    La puissante voiture
    avale la route. Thomé a le pied au plancher, l’aiguille de l’indicateur oscille
    entre 150 et 160. Les trois parachutistes sont enivrés par le vent qui frappe
    leurs visages. Klein regarde loin devant pour découvrir à temps le virage ;
    il ignore que les Allemands ont refait la route, que la courbe n’existe plus.
    Le poste de garde des S.S.
    est installé juste à l’entrée de la ville. Les trois parachutistes se
    retrouvent à sa hauteur à près de 120 kilomètres à l’heure. Les sentinelles ne
    reconnaissent pas les uniformes. Elles saluent la voiture au passage.
    « Merde ! gueule
    Thomé. On est dans la ville ! Si on fait demi-tour, les mitrailleurs
    risquent de se réveiller.
    — Ça m’étonnerait
    qu’ils saluent une seconde fois, fait remarquer Klein.
    — On va essayer de
    trouver une autre sortie.
    — Ben, voyons, mon
    lieutenant, c’est enfantin », raille Klein, en dégoupillant deux grenades
    qu’il serre dans chacune de ses mains.
    Il se retourne vers
    Guichard pour lui signifier de l’imiter, mais c’est superflu : Guichard, vautré
    nonchalamment à l’arrière, a déjà, lui aussi, une grenade dégoupillée dans
    chaque main.
    « Un après-midi de
    détente… Une promenade à la campagne… maugrée Klein. Et en plus, j’en étais sûr…
    — Oh ! ta
    gueule, tu veux ! C’est pas le moment de pleurnicher, même si tu as raison. »
    La Mercedes glisse
    majestueusement dans un dédale de ruelles étroites. Thomé est d’un calme
    olympien. Il conduit avec sûreté, il a rétrogradé en troisième, il passe en
    seconde. Sa main, d’un geste naturel, s’est saisi d’une grenade qu’il porte et
    conserve à sa bouche, serrant ses dents sur la cuiller.
    Les ruelles deviennent
    de plus en plus étroites. Enfin la Mercedes s’engage dans une artère pentue
    dans laquelle elle a juste la place de se faufiler. À deux cents mètres devant
    eux, légèrement en contrebas, les trois parachutistes aperçoivent la grande
    place de Landerneau. Elle grouille de soldats allemands ; plusieurs d’entre
    eux regardent, intrigués, la voiture qui s’approche.
    « Je crois qu’on
    est arrivés, déclare calmement Thomé, en arrêtant le véhicule en souplesse.
    — On fait marche
    arrière, mon lieutenant ? »
    Thomé ne répond pas. Il
    porte la main au rétroviseur et l’axe dans le champ visuel du sergent. Klein
    découvre dans le miroir une vingtaine de soldats qui s’avancent vers eux, l’arme
    à la bretelle. Entre ses dents, Klein siffle, admiratif.
    « Tenez-vous bien, on
    y va », annonce le lieutenant.
    Il emballe le moteur, embraye
    d’un coup sec, parvient à passer la seconde avant la place sur laquelle la Mercedes
    débouche comme une fusée.
    Surpris, un Allemand est
    happé par l’aile ; soulevé, il va s’écraser à trois mètres.
    Klein et Guichard ont
    simultanément jeté quatre grenades. Malgré la vitesse du véhicule et la force
    centrifuge qui les a plaqués pendant le virage à angle droit, aucune n’a été
    lancée au hasard. Les engins ont atterri et explosé au cœur de groupes compacts.
    Les S.S.

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