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Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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l’autre versant, les S.A.S. se retournent et contemplent
    leur exploit. C’est inimaginable. Le camp est un brasier géant. Des ombres
    furtives et affolées courent dans tous les sens, pendant que s’éloignent les
    appareils de la Royal Air Force. Vingt-six avions ennemis ont été anéantis au
    sol. Du matériel divers a été en outre saboté. Bergé étreint le bras de Jellicœ :
    « Ils ont compris
    là-haut, mon vieux ! Ils savent que nous avons réussi ! Au Caire, à
    Londres, à bord des navires du convoi, dans moins d’une heure ils le sauront
    tous !
    — Indéniable !
    Et les Allemands ne paraissent pas toujours avoir réalisé. Je crois que nous
    ferions bien de parcourir le maximum de chemin avant qu’ils comprennent. Nous
    nous congratulerons plus tard. »
    Ils repartent à une
    cadence d’enfer.
    Les premières lueurs de
    l’aube commencent à poindre lorsque le commando parvient à la grotte où
    Petrakis les attend. Bergé décide alors de prendre le risque de marcher de jour.
    À travers les montagnes et les maquis ce n’est pas trop risqué. De toute façon,
    c’est une carte à jouer. Ils doivent s’éloigner. Ce n’est pas au sud qu’on ira
    les chercher.
    Pendant cinq jours et
    cinq nuits, les parachutistes vont marcher comme des robots. Au hasard de terrains
    couverts, de caches sûres, ils s’affalent pour dormir quelques heures. Les
    points d’eau sont rares ; la soif, la faim, la fatigue les tenaillent, les
    obligent à prendre le risque de mendier quelque nourriture à des paysans qui
    les prennent pour des Allemands.
    À l’aube du 19 juin, leur
    but est enfin atteint. Depuis la veille, Bergé et Jellicœ ont pu déterminer
    avec certitude leur position. Le commando se trouve à moins de dix kilomètres
    du village de Vassilika-Anoya, point de contact prévu avec un résistant grec
    qui doit les conduire sur la grève près de laquelle les attend le sous-marin
    dans le courant de la nuit.
    Bergé estime qu’il
    serait imprudent de gagner le village en groupe. Il désigne Jellicœ et Petrakis
    en avant-garde. Dès qu’ils auront établi le contact, l’un d’eux reviendra
    prévenir les quatre autres. Tous feront alors mouvement à la nuit tombée.
    Bergé, Mouhot, Sibard et
    Léostic commencent leur attente à l’abri d’un petit mur de pierres grossières. Leurs
    provisions sont totalement épuisées. Ils n’ont rien bu, rien mangé depuis
    vingt-quatre heures. Barbus, les yeux exorbités par l’effort et la fatigue, les
    lèvres boursouflées, crevassées, rongées par le soleil et l’air brûlant, les
    battle-dress en lambeaux, les chaussures déchiquetées, les mains couvertes de
    plaies vives, les genoux et les cuisses égratignées, les quatre parachutistes
    restent prostrés, amorphes, ne parvenant même pas à se réjouir de la proche délivrance
    qu’ils escomptent.
    Ils sont dans un tel
    état d’épuisement et de relâchement qu’ils n’entendent pas arriver l’homme qui
    débouche sur eux. L’arrivant est vêtu plutôt comme un villageois que comme un
    paysan, et ne semble pas surpris par leur présence. Il se veut jovial, amical ;
    en souriant, en faisant des gestes, il répète sur un ton interrogatif le seul
    mot d’anglais qu’il semble connaître : « Paratroop, paratroop !… »
    L’homme s’accompagne d’un
    geste tendant à désigner un corps qui tombe du ciel. Bergé s’est levé, a jeté
    un regard circulaire, a constaté que le Grec semble seul.
    « Il a compris, mon
    commandant, grince Sibard entre ses dents.
    — Sans aucun doute,
    réplique Bergé, et nous n’avons plus d’interprète. »
    Il dégaine son Colt, l’applique
    sur la panse opulente du Grec. De la main gauche il lui intime l’ordre de s’asseoir.
    L’homme ne semble pas effrayé ; il conserve son sang-froid, se lance dans
    un charabia inintelligible, mais, par gestes, parvient à faire comprendre qu’il
    est un ami, qu’il se propose pour aller chercher du ravitaillement.
    Bergé hésite longuement.
    C’est l’état de ses hommes qui le décide à faire confiance au Crétois. Après
    une nouvelle journée passée à attendre dans cette fournaise, auront-ils la
    force de reprendre la route ? Il leur reste une quinzaine de kilomètres à
    parcourir.
    L’homme explique l’heure
    de son retour sur le chronomètre de Bergé. Il étreint la main des parachutistes
    et s’éloigne. Il revient vers 10 heures du matin ; il apporte des
    courgettes, deux litres

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