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Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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incendiée. L’air est irrespirable. Le véhicule
    approche dangereusement des flammes. Les hommes toussent, pleurent, enfouissent
    leurs têtes dans leurs bras et cherchent un filet d’air filtré à travers les
    manches de leurs vareuses. Au bord de l’asphyxie, le chauffeur emprunte
    derrière la ferme le sentier qui s’engage dans la forêt. Il a juste le temps de
    respirer trois bouffées d’air avant de tomber dans la seconde embuscade, celle
    du sergent Litzler.
    Pour Litzler et ses
    hommes, ça va être un jeu, un véritable tir aux pigeons : un seul camion
    chargé de soldats aveuglés par leurs larmes, handicapés par les quintes de toux
    qui les secouent.
    Alors, c’est le drame. Du
    camion parvient un hurlement « Arrêtez, nom de Dieu ! On est là, arrêtez !
    Arrêtez ! »
    Aussitôt Litzler ordonne
    le « cessez-le-feu ». Les Allemands en profitent. Ils sautent du
    camion et gagnent le bois, entraînant Ruelle avec eux. Il n’est plus question
    de chasseurs et de proie, mais de deux groupes bien armés, disposant des mêmes
    ressources, des mêmes abris.
    Il est trop tard lorsque
    Litzler réalise son erreur, et il n’a même pas sauvé la vie des prisonniers. La
    faiblesse provoquée par sa blessure empêche Ruelle de suivre. Un soldat s’en
    débarrasse en l’achevant d’une balle dans la nuque.
    Au cours de l’accrochage
    qui suit, deux parachutistes sont tués sur le coup. Litzler est atteint d’une
    balle dans la poitrine. Le sergent paiera de sa vie son réflexe d’humanité et
    de camaraderie.
    Personne ne s’est aperçu
    que deux hommes n’ont pas évacué le camion : Bourdon, le parachutiste
    français que sa blessure au flanc paralyse, et un Allemand – un tout jeune
    garçon, seize ans, peut-être quinze.
    L’effroi a déclenché
    chez l’adolescent une crise nerveuse. Depuis plusieurs minutes, il vibre, les
    yeux exorbités, les membres figés. Assis sur la banquette de bois, il fixe
    Bourdon couché à ses pieds. Brusquement le jeune garçon se détend, dégaine son
    poignard et tranche la gorge du parachutiste. Debout, il reste prostré, contemplant
    son œuvre, horrifié. Alors, comme un automate, il se saisit de son fusil qui
    est resté sur le banc – un lourd Mauser à cinq coups dont, au fil des mois, la
    bretelle a marqué son épaule d’une meurtrissure bleuâtre. Il s’assoit sur le
    banc, cale la crosse sur le sol, laisse peser sa tête sur le canon de l’arme qu’il
    déclenche d’une pression du pouce. La balle traverse son crâne proprement ;
    il meurt dans cette position.
     

17
    En lisière de forêt, Botella
    est persuadé que le groupe Litzler a exterminé le troisième camion. Il s’apprête
    à donner l’ordre de décrocher lorsqu’une estafette arrive, porteuse d’un
    message du capitaine Leblond. Les postes d’observation signalent que des
    renforts massifs d’Allemands s’apprêtent à pénétrer dans le bois : des
    positions de combat doivent être trouvées. À son tour, Botella désigne un homme
    chargé de transmettre les consignes aux groupes Metz et Litzler (dont il ignore
    la blessure) et Lasserre.
    De nouveaux points d’embuscade
    sont mis en place, les armes sont rechargées, les munitions acheminées en hâte
    et, de nouveau, l’attente commence.
    Botella s’est embusqué
    dans un fossé providentiel. Les fusils mitrailleurs sont masqués par de hauts
    herbages ; derrière lui, il y a la forêt qui permettrait un éventuel repli ;
    devant, dans son axe de tir, un immense champ nu.
    Le lieutenant Botella ne
    croit en rien à l’utilité de sa position. Aucun militaire ne songerait à
    progresser dans un espace aussi découvert ; pourtant on ne peut négliger l’endroit,
    en faire un trou dans le dispositif.
    Les parachutistes sont
    décontractés ; ils fument tranquillement ; ils ne risquent rien, il
    faudrait un quart d’heure à un coureur à pied pour franchir l’espace vide qui s’étend
    devant eux.
    Et pourtant l’inimaginable
    se produit. Botella n’en croit pas ses yeux. À l’horizon, à l’autre bout du
    champ, une rangée de camions amène la Wehrmacht. Cent cinquante hommes, peut-être
    deux cents, évalue le lieutenant, les jumelles vissées aux yeux. Les Allemands
    se disposent en ligne, forment un long chapelet, avancent lentement, gênés par
    la lourdeur du terrain. On dirait une troupe de rabatteurs de gibier un matin d’ouverture
    de chasse en Sologne.
    La lenteur de la
    progression allemande

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