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Remède pour un charlatan

Remède pour un charlatan

Titel: Remède pour un charlatan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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s’était résolue en secret à accepter son enfermement dans le Call et même à admettre les inquiétudes paternelles relatives à sa tenue et à son comportement. Mais cette résolution ne l’aidait en rien à supporter l’atmosphère de cette journée.
    Elle prit son aiguille et un ouvrage depuis longtemps négligé, fit quelques points assez maladroits et reposa le tout. Elle était trop distraite pour coudre et préférait penser à ce qu’il convenait de décider. Avec un remords de conscience, elle se rappela que son père lui avait demandé d’effectuer des recherches. Dès qu’elle entendit partir Salomó, le tuteur, elle gagna en toute hâte la bibliothèque et prit deux gros ouvrages de médecine : l’un d’eux avait pour auteur Isaac Israeli et l’autre était le Speculum medicin æ d’Arnau de Vilanova. Elle leur consacrerait toute sa journée pour tenter d’y trouver quelles maladies ou substances pouvaient avoir déclenché les étranges symptômes que les trois jeunes gens avaient présentés avant de mourir.
     
    Dans la cour, Isaac arrêta sa femme alors qu’elle sortait précipitamment de la réserve pour accomplir des tâches domestiques qui ne sauraient attendre, et peu importait ce qui se passait en dehors du quartier juif !
    — Judith, mon amour, dit Isaac, je dois vous parler un instant. Quelque part où Raquel ne risque pas de nous entendre.
    — Elle est près du feu, dans la bibliothèque. Quand le soleil réchauffera la cour, elle y descendra sans aucun doute avec ses livres.
    — Nous n’en aurons pas pour longtemps. Venez dans mon cabinet.
    Judith s’installa près de la table et regarda son mari déambuler dans la pièce, soulever des objets pour les reposer aussitôt.
    — Qu’y a-t-il, Isaac, que vous hésitiez à me dire ? fit-elle, incapable de supporter plus longtemps ce silence.
    — Je n’hésite pas, répondit-il en se tournant vers elle, le sourire aux lèvres. Je ne fais que rassembler mes pensées. Hier, je vous ai parlé de deux malheureuses tuées au cours de l’émeute. Ce que je ne vous ai pas dit – ce que je ne pouvais dire, même à vous, en cet instant –, c’est qu’une troisième femme a été prise à partie par cette horrible foule d’ivrognes et de braillards. Au lieu de fuir, comme les autres avaient tenté de le faire, elle les a affrontés avec beaucoup de courage et les a priés de la laisser tranquille. Nous devons supposer qu’ils furent surpris par son refus de céder à la peur, car ils reculèrent et cherchèrent même à se justifier. Ce fut une véritable chance pour cette jeune femme, car cela permit à la garde de voler à son secours. Elle a été effrayée, mais elle n’a pas été blessée.
    Sur ce, Isaac s’arrêta de parler et reprit sa déambulation.
    — Pourquoi me dire cela ? murmura Judith.
    — Elle était avec son enfant, un garçon de deux ans. Ils ont fondu sur elle alors qu’elle rentrait à la maison. Elle croyait que la foule s’en était allée. J’ai appris cela en partie lors de la réunion qui s’est tenue hier soir, et le reste dans un message que m’a fait porter l’évêque.
    — Pourquoi l’évêque vous a-t-il envoyé ce message, Isaac ? demanda Judith d’une voix où perçait la peur.
    — Parce que cette jeune mère n’est autre que Rebecca, Judith. Comprenez-vous ? La femme qui a affronté si bravement les émeutiers était Rebecca. Notre première-née. Et elle était avec notre petit-fils. Ils cherchaient une corde pour la pendre quand la garde est intervenue.
    Judith éclata en sanglots.
     
    Par-delà les murs du Call, un vague murmure retentit, premier signe que le procès était terminé et la vie reprenait en ville. Mossé ouvrit sa porte avec d’infinies précautions, vit quelques personnes d’allure pacifique vaquer à leurs occupations et décida de sortir ses paniers. Le commerce fut bientôt aussi animé que d’habitude, car l’homme doit avoir du pain à manger, même en période d’émeutes et de pendaisons, et c’est chez le boulanger qu’il s’attend à le trouver.
    Les tavernes ouvrirent également avec prudence, l’une après l’autre. Les jongleurs et les musiciens, même les diseurs de bonne aventure, quittèrent leur campement pour venir en ville. Lentement, l’esprit de fête revint. En fin d’après-midi, la foire avait retrouvé toute son animation.
     
    Yusuf avait passé la journée en proie à la plus grande indécision. Quelque

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