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Requiem sous le Rialto

Requiem sous le Rialto

Titel: Requiem sous le Rialto Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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s’interrompaient de manière brutale. Il se rappelait avoir vu trente-six chandelles dans la fraction de seconde qui avait suivi le coup à la tempe. Après, ce fut le noir complet. Il était revenu à lui environ une demi-heure plus tard, sans doute plus à cause du froid glacial qu’à cause du sergent et de l’officier, accourus en urgence, qui lui secouaient l’épaule en hurlant, ne sachant manifestement pas ce qu’ils devaient faire.
    Qu’était-il arrivé ? Après l’avoir assommé, Julien avait enfilé son manteau, emprunté son haut-de-forme et gagné la sortie à l’aide de son laissez-passer. Quant à lui, le sergent l’avait découvert au cours de sa ronde. Une fois que le médecin de garde du Danieli , appelé en renfort, eut donné son aval, une gondole militaire l’avait ramené chez la princesse qui n’en avait pas cru ses yeux. Au matin, Bossi était passé au palais Balbi-Valier où son supérieur lui avait dicté un rapport du fond de son lit. Ce fut seulement vers midi qu’il avait décidé, malgré les protestations de Maria, de se rendre au bureau pour s’entretenir avec Spaur.
    Comment le colonel Stumm von Bordwehr avait-il réagi aux événements de la veille ? La fuite de l’homme qu’il tenait pour l’assassin et le laissez-passer accordé à Tron dans son dos ? Le commandant de police dut réfléchir un instant avant de pouvoir répondre, à moins qu’il ne s’amusât à faire languir son interlocuteur. Il but une gorgée de café, posa une praline à moitié entamée sur le rapport ouvert devant lui et l’étudia telle une pièce en trop dans un jeu de patience.
    — Je pense, finit-il par dire, que le colonel prend la fuite de Sorelli avec sang-froid.
    — Et l’histoire du laissez-passer ?
    Spaur ramassa la demi-praline et la déposa sur sa langue. Il n’avait jamais eu de mal à parler la bouche pleine.
    — Oubliée ! annonça-t-il en mâchant. Le colonel s’est entretenu avec le commandant de place. À l’évidence, ils préfèrent ne pas donner suite à cette affaire.
    — A-t-on la moindre trace de Julien Sorelli ?
    — On suppose qu’il a pris le bateau de minuit.
    — Et a-t-on envoyé un télégramme à Trieste ?
    — Oui, mais trop tard, hélas. Tous les passagers étaient déjà descendus.
    — Dans ce cas, j’imagine qu’on va s’efforcer de mettre la main sur lui en France ?
    — Vous n’avez pas trop mal à la tête ?
    — Julien Sorelli aurait pu taper plus fort. Je ne pense pas qu’il ait eu l’intention de me blesser grièvement. Il voulait juste m’écarter de son chemin pendant un petit moment. La bouteille ne s’est même pas cassée.
    Les sourcils de Spaur entreprirent une excursion vers le haut de son crâne.
    — Que voulez-vous dire par là, commissaire ?
    — Je m’étonne qu’un prétendu tueur hésite à blesser grièvement le policier lancé à ses trousses.
    —  Prétendu  ?
    — Je ne crois pas que Julien soit l’homme que nous recherchons.
    — Et que faites-vous des preuves ? Des rasoirs et des lanières ?
    — On pourrait les avoir introduits dans sa chambre.
    — Qui ?
    — Le colonel en personne.
    — C’est ridicule, commissaire ! décréta Spaur.
    Et pour démontrer à quel point ce l’était, il émit un petit rire tout en se servant une nouvelle tasse de café. Tron haussa les épaules.
    — L’enquête piétine parce que l’éventreur mène une double vie, parce qu’un monstre se cache derrière la façade d’une existence tout ce qu’il y a de plus normale. Le sang-froid avec lequel le colonel accepte la fuite de Julien Sorelli m’étonne malgré tout.
    — Je ne comprends pas.
    — S’il est vraiment parti pour Trieste, Julien va tenter de rejoindre la France où il sera en sécurité. Stumm ne peut que se réjouir d’une telle issue.
    — Pourquoi cela ?
    — Parce qu’on ne pourra pas engager de procédure. Même devant un tribunal militaire, on ne sait jamais ce qui peut ressortir d’un procès.
    La voix de Spaur se fit bourrue.
    — Eh bien, on n’engagera pas de procédure, que voulez-vous ? En tout cas, pour les autorités militaires, l’affaire est bouclée. Et la garde civile n’a de toute façon rien à voir avec cette affaire. Donc, où est le problème ?
    Tron soupira.
    — Le problème est que Julien Sorelli est peut-être innocent. Et dans ce cas, les meurtres vont se poursuivre.
    Spaur secoua la tête.
    — En admettant que votre théorie

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