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Requiem sous le Rialto

Requiem sous le Rialto

Titel: Requiem sous le Rialto Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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commandant en frappant les photographies du plat de la main. Or un fou n’est pas responsable devant la loi .
    Ah, enfin ! Tron respira avec soulagement. Voilà la deuxième expression qu’il attendait.
    — Vous rendez-vous compte de ce que cela signifie, commissaire ?
    Spaur jeta un regard guilleret aux clichés. Son subalterne soupçonna qu’il était sur le point de lui offrir une praline.
    — Quoi qu’il en soit, d’un point de vue pratique, cela ne change rien pour nous, dit Tron. Même s’il est fou, nous devons l’arrêter au plus vite. La suite regarde les tribunaux.
    — Qui le déclareront irresponsable dès qu’ils auront vu ces photographies. Par conséquent, il ne s’agit pas d’un meurtre. Et toute cette affaire n’est rien d’autre qu’un…
    Le commandant de police laissa la phrase en suspens. À l’évidence, il ne trouvait pas de comparaison appropriée. Tron lui vint en aide.
    — Un accident ? suggéra-t-il d’une voix hésitante. Comme quand on dégringole d’une échelle ? Ou qu’une tuile tombe d’un toit ?
    Une lueur brilla dans les yeux de son supérieur.
    — Un accident ! C’est tout à fait cela, commissaire. Et vous feriez bien de le signaler en toutes lettres dans votre rapport. Reprenez donc votre comparaison de la tuile qui tombe d’un toit !
    Spaur plongea la main dans la bonbonnière et finit par y trouver ce qu’il cherchait. Il tendit le bras au-dessus de son bureau et dit avec un grand sourire :
    — Une praline, commissaire ?
    Il s’agissait d’un nougat. Spaur détestait le nougat. Tron s’apprêtait à le remercier quand on frappa. La porte s’ouvrit et le sergent Kranzler entra. Il salua, s’approcha du bureau d’un pas rapide, posa un billet sous les yeux du commandant et s’éclipsa.
    Spaur prit le papier, le parcourut des yeux et plissa le front.
    — Vous avez de la visite, commissaire.
    Tron lui adressa un regard interrogateur.
    — Votre ami Stumm von Bordwehr vous attend dans votre bureau.
    — Que veut-il ?
    Après avoir relu le billet, le commandant releva la tête et répondit :
    — Il prétend savoir qui a tué la femme dans la gondole.

13
    Tron n’aurait pas reconnu le colonel, s’il l’avait croisé dans la rue. Il n’y avait en effet aucun rapport entre le civil agressif auquel il avait défoncé le nez l’avant-veille et l’officier courtois qui se leva de manière aimable au moment où Bossi et lui entrèrent dans le bureau. Au lieu d’une redingote, Stumm von Bordwehr portait un uniforme impeccable qui mettait en valeur sa stature imposante et ses larges épaules. Le pansement qui lui barrait le nez renforçait son apparence virile et guerrière. Il évoquait de sanglants duels au sabre ou des scènes de batailles héroïques. Vous avez devant vous, semblait-il dire, un homme qui n’hésite pas à risquer sa vie quand son honneur ou celui de son souverain est en jeu. Il valait mieux que n’importe quelle médaille. Le commissaire se demanda quelle histoire il racontait à ceux qui l’interrogeaient sur l’origine de sa blessure.
    Il lui serra la main et le pria de se rasseoir. Bossi s’installa sur une des chaises placées devant les classeurs, prêt à prendre des notes. Après avoir rejoint le fauteuil derrière son bureau, Tron lança :
    — Vous souhaitez faire une déclaration sur la mort de Mlle Calatafimi, colonel ?
    Stumm von Bordwehr inclina le menton d’un geste poli.
    — C’est exact.
    — Pourriez-vous nous révéler comment vous avez eu connaissance de ce crime ?
    — J’avais rendez-vous avec elle hier soir.
    — Pardon ?
    Tron ne se donna pas la peine de cacher sa surprise.
    — Vous aviez… ?
    — Rendez-vous avec elle, confirma le militaire. Comme elle n’est pas venue, j’ai entrepris des recherches et appris qu’elle avait été assassinée dans des circonstances sordides.
    Tron se demanda comment il avait fait pour entreprendre des recherches et qui, au commissariat, ouvrait grand les oreilles pour le compte de l’armée autrichienne. Même s’il n’avait jamais réussi à savoir qui, il soupçonnait depuis toujours la Kommandantur d’avoir des indicateurs dans leurs services. Par ailleurs, il se demanda pour quelle raison Mlle Calatafimi avait rendez-vous avec le colonel.
    — Il paraît, lâcha-t-il sur un ton anodin, que la victime avait noué une relation particulière avec deux hommes différents.
    Il fixa le militaire.
    — Se peut-il que

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