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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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traite des Noirs se poursuit, et le Nord n'est pas étranger à cet odieux commerce. C'est de New York, de Boston et de Portland que partent les bâtiments employés à ce genre de transports. Nous savons que plus de quarante navires négriers sortent chaque année des ports que je vous ai cités. Ces bâtiments, de cent à cinq cents tonneaux, que nous tentons d'arraisonner, comptent de quinze à vingt hommes d'équipage et peuvent transporter, chacun, de quatre cents à six cents Noirs, précisa le commandant Maitland 2 .
     
    – Soyez impitoyable quand vous rencontrerez un de ces négriers. Ils méritent l'universelle opprobre ! lança Charles, aussitôt approuvé par ses amis.
     
    Quand John Maitland quitta le club pour regagner son bord, Mark Tilloy confia en aparté à Charles qu'il embarquait le lendemain pour New York sur le Centaur . De New York, il se rendrait à Liverpool sur un paquebot de la Cunard.
     
    – Un courrier des chantiers de Birkenhead a appris à lord Simon que son vapeur est prêt à naviguer. Je vais en prendre livraison, expliqua-t-il.
     
    – Ce bateau a-t-il déjà un nom ?
     
    – Pour le moment, il n'a qu'un numéro, mais je ne crois pas commettre une indiscrétion en vous disant que lord Simon a l'intention de le nommer Arawak , et de demander à votre épouse d'en être la marraine.
     
    – Elle sera enchantée de ce choix, capitaine, dit Desteyrac.
     
    Au moment de la séparation, Tilloy revint sur ses pas.
     
    – J'ai oublié de vous dire que lady Ottilia embarquera avec moi sur le Centaur . Elle se rend à New York pour choisir un nouveau piano et, surtout, je crois, pour consoler son amie Susan Brownell Anthony, la présidente d'une ligue féministe qui réclame le droit de vote pour les femmes. Les Bloomers se sont fait sérieusement chahuter par une foule masculine, lors de la Huitième Convention pour les droits des femmes qui s'est tenue au Mozart Hall, à New York, les 13 et 14 mai derniers.
     
    Charles rentra chez lui un peu penaud. Otti, croisée la veille à Cornfield Manor, ne l'avait pas informé de ce voyage, et quand il annonça ce départ imprévu à Ounca Lou, sa femme révéla qu'elle l'avait elle-même appris dans l'après-midi de la bouche de l'intéressée.
     
    – Elle m'a dit : « J'ai besoin de changer d'air, d'aller au théâtre, au concert, de voir des gens, des devantures pleines de jolies choses. Et puis, je veux aussi acheter un Steinway, c'est le meilleur piano américain. » Je l'ai trouvée un peu nerveuse, un peu bizarre. Peut-être est-elle excédée par l'attitude de Malcolm qui n'en finit pas de retarder leur installation à Exile House, puisque c'est ainsi qu'il a décidé d'appeler leur maison.
     
    – Exile House ! Ce nom traduit une rancœur que Malcolm tente cependant de dissimuler, commenta Charles.
     
    Le lendemain, tôt dans la matinée, sous prétexte de demander à Philip Rodney, commandant du Centaur , s'il pourrait prendre à son bord, à New York, pour le conduire à Soledad, l'ingénieur Robert Lowell, de Pittsburgh, Desteyrac se rendit au port occidental. Il communiqua à l'officier l'adresse de Lowell pour qu'il se mît en relation avec lui et arrangeât, si possible, son passage.
     
    – Il est prévu que nous resterons à New York une bonne quinzaine de jours. Si votre ami est prêt au voyage, nous le prendrons à bord, assura Rodney.
     
    Mark Tilloy, se présentant à l'embarquement, fut étonné de trouver Charles à bord. Ce dernier, tout en guettant l'apparition d'Ottilia, donna la raison de sa présence, mais, quand il vit approcher sur le quai la calèche de la jeune femme, il fit de brefs adieux à l'officier et descendit l'échelle de coupée avant qu'Otti eût quitté sa voiture. Elle en sortait, accompagnée de Gertrude Lanterbach, quand il l'aborda.
     
    – Embarque sans plus tarder, dit Ottilia à sa suivante.
     
    Gertrude s'éloigna aussitôt, laissant sa maîtresse seule face à Charles.
     
    – Vous partez comme si vous aviez dérobé les bijoux de la Couronne ! dit-il, s'efforçant au mode plaisant.
     
    – C'est un peu ça. J'ai soutiré à mon père de quoi m'offrir un grand Steinway, et aussi des lampes de Tiffany pour mon salon... quand la maison sera terminée, dit-elle sur le même ton.
     
    – J'ai le sentiment que ce départ ressemble à une fuite, reprit-il, cette fois sérieux, presque grave.
     
    – C'est un peu ça aussi ! répliqua-t-elle, désinvolte,

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