Révolution française Tome 2
pudeur ou de l’innocence mais du désagrément d’être découverte. »
« Ses flatteurs n’en ont même pas été dupés. »
Alors qu’elle meure !
« Seuls quelques esprits faibles parurent
douloureusement affectés de l’exécution de la veuve Capet, en ne la considérant
que sous le titre de mère et de femme malheureuse, lit-on dans Les
Révolutions de Paris. Mais comme reine de France, tout le monde s’accordait
à convenir de la justice du trop doux châtiment qu’elle subissait. »
Et Hébert, qui a assisté à l’exécution, au pied de l’échafaud,
exulte, exprime les sentiments de ces sans-culottes, de ces patriotes enragés, que
la passion révolutionnaire emporte.
« J’ai vu tomber dans le sac la tête de Veto femelle, écrit
Hébert dans Le Père Duchesne.
« Je voudrais, foutre, pouvoir vous exprimer la
satisfaction des sans-culottes quand l’archi-tigresse a traversé Paris dans la
voiture à trente-six portières. Ses beaux chevaux blancs si bien empanachés, si
bien enharnachés ne la conduisaient pas, mais deux rossinantes étaient attelées
au vis-à-vis de maître Samson et elles paraissaient si satisfaites de
contribuer à la délivrance de la République qu’elles semblaient avoir envie de
galoper pour arriver au plus tôt au lieu fatal.
« La garce au surplus a été audacieuse et insolente
jusqu’au bout.
« Cependant les jambes lui ont manqué au moment de
faire la bascule pour jouer à la main chaude, dans la crainte sans doute, de trouver
après sa mort un supplice plus terrible que celui qu’elle allait subir.
« Sa tête maudite fut enfin séparée de son col de grue
et l’air retentissait des cris de “Vive la République !”. »
« Qu’elle ait été seule dans ses derniers moments, sans
consolation, sans personne à qui parler, à qui donner ses dernières volontés, cela
fait horreur, écrit quelques jours plus tard le comte de Fersen. Les monstres d’enfer !
Non ! Sans la vengeance, jamais mon cœur ne sera content. »
La douleur de Fersen est d’autant plus grande qu’il sait
bien que parmi les rois et les princes, les émigrés et les royalistes restés en
France, personne n’a tout tenté pour sauver la reine. Danton lui y a songé, mais
très vite, il a mesuré les risques immenses qu’il courrait.
Les hébertistes le rangent parmi les « pourris »
de la Convention.
On découvre que certains de ses proches ont, l’un – Robert
-vendu du « rhum accaparé », et l’autre – Perrin – trafiqué dans les
fournitures de guerre.
On accuse l’entourage de Danton d’être composé non seulement
de corrompus mais d’« endormeurs ». En somme, les dantonistes sont de
nouveaux Girondins.
Et Vincent, l’hébertiste, ne cesse de répéter ses attaques
contre Danton, accusé de s’être abouché avec « Dumouriez dans l’affaire de
la Belgique ». Et Danton comprend que cette accusation peut conduire à l’échafaud.
Le général Houchard, vainqueur à Hondschoote, a été arrêté, jugé,
condamné à mort, parce qu’il n’a pas su exploiter sa victoire et que dès lors
on le soupçonne sans preuve d’avoir ouvert des pourparlers avec l’ennemi.
On va juger Philippe Égalité et Danton fut proche du
ci-devant duc d’Orléans.
Alors, Danton préfère quitter Paris. Il prétend qu’il est
malade et se retire dans sa propriété d’Arcis-sur-Aube.
Danton est sans illusion.
« En conduisant Marie-Antoinette à l’échafaud, dit-il, on
a détruit l’espoir de traiter avec les puissances étrangères. »
Mais le plus grave, le plus dangereux n’est pas dans cette
exécution, mais dans le procès qui s’ouvre, contre les députés girondins, devant
le Tribunal révolutionnaire.
Ils sont vingt et un, qui comparaissent à compter du 24
octobre.
Robespierre a fait écarter un décret qui renvoyait devant
les juges soixante-treize députés qui avaient protesté contre les
manifestations des journées des 31 mai et 2 juin. Générosité de sa part ? Ou
bien habileté ? Maximilien veut que les « chefs de la faction »
soient condamnés à mort, et ce sera d’autant plus aisé qu’ils seront isolés, promis
à la guillotine puisque la Convention a décidé de raccourcir la durée des débats
en les limitant à trois jours.
Danton, à Arcis-sur-Aube, est sombre.
« Des factieux, les girondins ? s’interroge-t-il. Est-ce
que nous ne sommes pas tous des factieux ? Nous méritons tous
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