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Richelieu ou la quête d'Europe

Richelieu ou la quête d'Europe

Titel: Richelieu ou la quête d'Europe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie-Catherine Vignal Souleyreau
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Louis XIII et Richelieu s’essaient à une délicate manoeuvre de manipulation, dont l’instrument n’est autre que Marguerite de Gonzague. Sa maladresse a précipité la succession des événements et accéléré l’exécution du projet dynastique des Vaudémont. Devant le danger représenté par l’affirmation, à la frontière orientale du royaume, de souverains si proches des Habsbourg d’ Autriche , le roi de France et son ministre agissent. Courant 1625, Louis XIII et Richelieu transmettent à la duchesse douairière une série de propositions et d’arguments pour lui permettre de défendre sa position et celle des princesses Nicole et [25] Claude. Ils choisissent l’ingérence dans les affaires d’une principauté souveraine et forgent un raisonnement qui souligne l’incompatibilité du coup d’État perpétré par François II et Charles IV avec les intérêts de la couronne de France . Rappelant que la princesse Nicole a été reconnue héritière légitime de son père par les états généraux de Lorraine , et prenant officiellement fait et cause pour les filles d’Henri le Bon, au nom de la solidarité familiale (la mère des princesses est aussi la nièce de Marie de Médicis), Louis XIII énonce ses propres prétentions à la couronne ducale et fourbit des arguments qui pourraient justifier une annexion au royaume : l’argument dynastique, par la succession au sein de la maison d’Anjou à laquelle prétend le roi très chrétien ; l’argument juridique concernant la souveraineté du duché de Bar , qui ne saurait être aliénée sans bafouer les prérogatives royales et les lois fondamentales du royaume et des duchés. Le roi de France précise qu’il s’estime redevable de l’hommage lige pour le duché de Bar. Il prétend y exercer, et non pas seulement sur le Barrois mouvant, un droit de suzeraineté supérieur à celui qu’exerce l’empereur sur le duché de Lorraine. Au xv e  siècle, Sigismond est intervenu dans la succession du duché de Lorraine pour imposer une héritière. A fortiori , le roi de France, au xvii e  siècle, peut-il intervenir pour défendre le principe coutumier de la succession en ligne féminine au duché de Bar !
    La mère des princesses spoliées semble se conformer aux recommandations qui lui sont transmises par les agents de Richelieu. Au début de l’année 1626, Marguerite de Gonzague engage une procédure judiciaire visant à prouver que le testament de René II exhumé dans les archives de la maison de Guise est un faux [26] . Outre le vice de forme, l’inaliénabilité des États lorrains et de leurs coutumes est invoquée. La duchesse douairière récuse également toute légitimité ou valeur à une décision des états généraux touchant au principe de souveraineté. Elle donne commission pour faire valoir les droits de ses filles et dénoncer la confiscation de pouvoir et de souveraineté opérée par les princes de Vaudémont. Mais séquestrée dans le duché de Lorraine , où les officiers refusent de recevoir ses plaintes, et dans l’impossibilité de se rendre en France ou dans un État voisin et ami, elle ne peut que charger Justiniano Priandi, résident du duc de Mantoue à Paris , de faire rendre la justice [27] . Elle ne sollicite cependant ni l’intervention directe du roi de France en tant que suzerain des ducs de Bar , ni celle de l’empereur en tant que suzerain des ducs de Lorraine. Marguerite de Gonzague perçoit-elle le danger auquel seraient exposés les duchés si elle appelait directement à son secours un souverain voisin ? Elle se borne à solliciter une assistance juridique, non un secours armé : Louis XIII et Richelieu voient leur procédé circonvenu.
    Le 1 er  mars 1626, après la cession de François II, le jeune duc de Lorraine renouvelle son entrée solennelle à Nancy . Il jure de maintenir les gens d’Église, la noblesse et le tiers état en leurs droits, privilèges et usages. Le lendemain, Charles IV réunit une nouvelle fois l’assemblée dans sa capitale pour faire ratifier le transfert de pouvoir et demander des subsides. Les ordres sont d’autant mieux disposés à reconnaître la confiscation opérée par les princes de Vaudémont que la coutume lorraine n’oblige en rien les ducs à les consulter sur leur légitimité. La démarche de Charles IV est flatteuse et est assimilée à un gage de reconnaissance et de respect. Les états votent non seulement les subsides réclamés

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