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Ridicule

Ridicule

Titel: Ridicule Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Remi Waterhouse
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déshonneur.
    Ponceludon, désarçonné par le tendre sourire de la comtesse, restait flottant, comme apaisé par l’immensité de sa déconfiture.
    — N’eussiez-vous appris que cela ce soir, vous n’auriez pas perdu votre temps, murmura-t-elle à son oreille avant de l’autoriser d’un geste à prendre congé.
    Les jours passants, la honte que cette leçon avait occasionnée à Ponceludon se changea en fierté. La comtesse ne l’avait-elle pas seulement « différé » ?
    Avec Mathilde, il veilla à ne plus dépasser les limites de la tendresse amicale. Le baiser prometteur de la comtesse l’aidait à ne plus convoiter un coeur déjà engagé ailleurs par contrat. Mathilde s’agaçait de cette désinvolture où pointait plus que jamais l’ironie. Ponceludon s’était maintenant persuadé qu’il ne l’aimait pas, et que le trouble qui avait si fort affolé la boussole de ses sentiments n’avait d’autre cause que la chaleur et la promiscuité d’une serre.
    Mathilde n’avait pas tort, pensait-il, tout empêtrée qu’elle fût dans ses dogmes matérialistes. C’était bien « le feu vital qui parcourt les nerfs » qui les avait rapprochés.
    À peine eut-il arrêté sa position que cet échafaudage de raison s’effondra en un instant au moment où Bellegarde lui annonça la mort de Mme de Montalieri. Ponceludon sentit soudain le poids de l’inéluctable l’accabler, et il aurait pleuré sans la nécessité de faire bonne figure devant le marquis. Bellegarde était, quant à lui, résolu à rester digne devant son disciple malgré le chagrin.
    — Elle travaille, la pauvre petite, je le lui annoncerai au souper.
    Ponceludon prit le cheval de son hôte et galopa jusqu’à la Bièvre. Il resta longtemps à méditer sur la méconnaissance de son propre coeur, mais une longue contemplation de la rivière le conduisit à la conclusion qu’il était tout aussi trompeur de considérer comme vrai le dernier reflet de son âme, que d’avoir prêté foi au précédent. Muni de cette philosophie bancale, il revint mal consolé vers la maison, tenant le cheval par la bride.
    Il était occupé à panser le cheval quand Paul arriva, courant et gesticulant, poussant des gémissements de bête blessée. Il tira Ponceludon par la manche en montrant la direction du puits. Pressentant un drame, Grégoire abandonna son ouvrage et courut du plus vite qu’il put vers la margelle d’où dépassaient les deux tuyaux, pareils à de
    monstrueuses antennes cassées. Le sifflet qu’il avait adapté au tuyau d’expiration était silencieux, signe que personne ne respirait au fond du puits.
    — Mathilde !
    Ponceludon s’était emparé de la manivelle et pesait de tout son poids. Paul y ajouta le sien, et le treuil se mit en branle.
    Au prix d’efforts considérables, les deux jeunes gens parvinrent à hisser l’habit gonflé et ruisselant, jusqu’à la poulie. La forme humaine était inerte, chargée d’eau et formidablement pesante. Ils l’arrachèrent à l’attraction du sinistre tunnel vertical dont on n’apercevait pas le fond, et l’allongèrent dans l’herbe. Ponceludon fit sauter les attaches du casque et découvrit la tête de Mathilde, sans vie, les cheveux trempés, collés sur le crâne. Il la gifla. Elle ouvrit alors les yeux comme on se réveille d’un doux rêve, un sourire extatique aux lèvres.
    — Mathilde ! Grâce au ciel vous respirez !
    Et il la serra dans ses bras. La jeune femme repoussa d’un geste mal assuré son sauveteur pour reprendre son souffle plus librement. Ponceludon fit comprendre par des signes à Paul d’aller chercher un linge pour sécher sa maîtresse.
    — Pierre Rémy de Beauve avait atteint quatorze minutes. Nous allons faire mieux.
    — Ne comptez plus sur moi ! dit-il. Sans Paul, vous étiez morte !
    Elle grelottait et Ponceludon l’aida à défaire les sangles de l’habit.
    — Je vous avais interdit de descendre !
    Mathilde se tourna vivement vers lui.
    — « Interdit » ? Qui êtes-vous pour interdire ? Mon père n’a jamais prononcé ce mot-là !
    Les mâchoires de Ponceludon se contractèrent La gifle qu’il administra à la rescapée ne serait pas partie si vite et si fort si son bras n’avait déjà répété le mouvement. Mais les deux mêmes trajectoires traduisaient des gestes bien différents, le premier d’angoisse, l’autre, de rage. Mathilde tremblait d’indignation et de froid, les larmes lui montaient aux

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