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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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autre, observa Martin entre deux tirs, pendant que le canon de la carabine d’Axel refroidissait.
     
    – Certes, mais j’aimerais lui faire la surprise de me présenter devant elle en vainqueur, répliqua le Vaudois.
     
    Chantenoz, très excité par l’épreuve à laquelle il prêtait, en poète, une implication mystique, souhaitait ardemment que son ancien élève l’emportât, ce qui lui permettrait de connaître, enfin, celle qu’il nommait la Circé au regard vairon.
     
    Porté par le désir farouche d’étonner Adrienne, sûr de lui comme si un viseur infaillible pointait son arme dont la pierre à feu n’eut pas un raté, le jeune homme rassembla, en peu de temps, vingt-cinq cartons en vingt-cinq balles.
     
    – Courons au pavillon des prix, car ce que j’ai réussi, d’autres ont pu le réussir. Il faut absolument me présenter le premier, s’écria-t-il.
     
    Martin Chantenoz, fendant la foule sans ménagement, fit le chemin pour Axel, mais les Vaudois, atteignant le pavillon des prix, découvrirent qu’ils avaient été devancés. Un barbu des Grisons, brandissant des cartons, interpellait les juges.
     
    – Vingt-cinq cartons en vingt-six coups, comme c’est demandé ! annonça fièrement le paysan, qu’entourait un groupe d’amis, aussi barbus et hilares que lui.
     
    – J’ai fait mieux, dit Axel en avançant d’un pas. Vingt-cinq cartons en vingt-cinq coups, voici la vingt-sixième balle. Je n’ai pas eu besoin de la tirer.
     
    – Hem ! faut voir ça ! T’aurais pas acheté un ou deux cartons pas hasard ? grogna le tireur.
     
    – Encore une insulte de ce genre et je vais savoir où placer ma dernière balle, mon gaillard, répliqua Axel, irrité par un tel soupçon.
     
    Le ton montait déjà chez les amis du Grison, et les badauds, pressentant une querelle, peut-être une bagarre, s’agglutinaient autour du pavillon. Les juges examinèrent les cartons du Veveysan et confirmèrent sa victoire. Puis ils tentèrent de calmer les paysans, dont plusieurs semblaient pris de boisson. Regard vague et verbe haut, les Grisons n’acceptaient pas que le meilleur fusil du canton fût dépossédé d’une coupe aussi précieuse. On risquait d’en venir aux mains, quand un sombre géant, coiffé d’un feutre étrange, enfoncé jusqu’aux yeux, écarta les braillards de ses énormes mains velues et s’adressa aux juges.
     
    – J’ai surveillé ce monsieur à la carabine. Il n’a pas perdu une balle. Ceux qui disent le contraire sont des grands fripons, lança-t-il en français, avec un accent guttural qui impressionna l’auditoire.
     
    Axel avait tout de suite reconnu Lazlo.
     
    Les gens du comité et deux miliciens, appelés en renfort, invitèrent les Grisons à se taire et à se disperser. Les montagnards obéirent à contrecœur, maugréant, les uns en romanche, les autres en italien. Axel, qui comprenait cette dernière langue, eut le sentiment qu’ils comptaient prendre leur revanche d’une façon ou de l’autre.
     
    – Où est la baronne, Lazlo ? demanda Axel.
     
    Le Tsigane émit un borborygme et s’éloigna.
     
    – Mais il ne t’a pas répondu, ce barbare ! s’insurgea Martin.
     
    Fort des confidences passées d’Axel, le professeur avait compris que l’homme était un serviteur de la baronne von Fernberg.
     
    – Il va chercher Adrienne, dit Axel, redoutant de voir apparaître Fontsalte et Charlotte.
     
    Pour rendre discrète sa rencontre avec Adrienne, il comptait sur la foule et les arrivées incessantes, au pavillon des prix, de tireurs qui venaient retirer leur lot en joyeuse compagnie. C’était ignorer qu’une nouvelle se répand dans la foule comme l’encre imprègne un buvard. Axel et Martin virent d’abord arriver la bruyante cohorte des carabiniers de Vevey, informés par la rumeur de l’étonnante performance d’un des leurs. Respectueux du cérémonial des tirages, ils venaient congratuler leur champion avant de l’escorter, avec sa coupe, en bon ordre, derrière fanfare et bannière, jusqu’à la pinte où l’exploit serait arrosé.
     
    Accablé de félicitations, Axel fut bientôt soulevé de terre, hissé sur les épaules d’un vigneron et porté en triomphe.
     
    – Attendez, au moins, qu’on lui ait remis le prix. La donatrice est en route, intervint à tout hasard Chantenoz, pour calmer les admirateurs de son ancien élève.
     
    De la position élevée où il se trouvait juché, Axel Métaz vit avec

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