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Robin

Robin

Titel: Robin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Stephen R. Lawhead
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regardez tous ?
    — Gerald croit avoir vu la chose, la créature », lui répondit le marchand d’une voix tendue. Un silence
surnaturel les entourait. Seul restait audible le murmure nonchalant de l’eau
qui s’écoulait autour des pierres.
    « Quelle
créature ? » s’enquit le prêtre. Rien ne bougeait dans le luxuriant
feuillage des arbres, ni dans les broussailles qui poussaient à leur pied.
    « Le fantôme. » L’homme
se tourna vers Aethelfrith. « Vous n’êtes pas au courant ?
    — Je ne sais pas de quoi vous
parlez, répondit le frère. De quel genre de fantôme s’agirait-il ?
    — Eh bien, expliqua le
marchand, il prend la forme d’un oiseau géant. Les gens du coin l’ont surnommé
le Roi Corbeau.
    — Vraiment ? s’étonna le
moine, des plus intrigué. Et à quoi il ressemble, cet oiseau
géant ? »
    Le commerçant le considéra avec
incrédulité. « Par le crucifix ! Vous êtes bouché ? Il ressemble
à un énorme corbeau  !
    — La ferme ! cracha un de
leurs voisins. Vous allez attirer le démon sur nous ! »
    Avant que quiconque ait pu
répondre, un autre commerçant agita une main et s’écria : « Là-bas,
regardez ! »
    Frère Aethelfrith aperçut alors des
plumes bleu noir briller au soleil, puis vit une sorte d’immense aile sombre
sortir des broussailles sur la rive opposée, à quelques pas en aval. Deux des
marchands poussèrent des cris de surprise terrifiés, deux autres tombèrent à
genoux en joignant leurs mains pour supplier Dieu et saint Michel de les
sauver. Tous les autres s’enfuirent à toutes jambes en direction de Château
Truan, laissant leurs charrettes derrière eux.
    « Jésus-Christ, aie pitié de
nous ! » s’écria un des marchands restants quand la tête de la
créature surgit. Son visage ovale dénué de plumes laissait apparaître une
ossature noire et lisse, avec deux trous ronds là où il aurait dû avoir les
yeux. N’était-ce le long bec pointu qui l’ornait malicieusement, sa tête
ressemblait surtout à un crâne humain carbonisé.
    La chose poussa un cri perçant qui
résonna dans le silence de mort. Sans même attendre que son hurlement ne
s’éteigne, elle se fondit aussitôt dans les ombres de la forêt.
    Saisis de terreur, les marchands
bondirent sur leurs pieds et se précipitèrent sur leurs chariots. Fouettant
frénétiquement leurs mules pour les faire avancer, ils firent demi-tour et
s’enfuirent dans la vallée. De tous ceux qui s’étaient trouvés au gué, seul
Aethelfrith n’avait pas bougé, ce qu’il ne tarda pas à faire.

CHAPITRE 35
    Après avoir relevé sa robe,
Aethelfrith traversa hardiment la rivière et se mit en chasse du fantôme. Il
marqua une pause devant les broussailles où la chose avait disparu, puis, ne
voyant rien, s’y engagea. Ne trouvant aucune trace de la créature, il s’arrêta
pour réfléchir. Il entendait au loin les chariots des marchands rebondir
bruyamment sur la route défoncée. Alors qu’il se demandait s’il devait
poursuivre sa traque ou reprendre son voyage, il aperçut un faible miroitement
de plumes noires – à peine une seconde, le temps qu’elles disparaissent
dans une haie à quelques centaines de pas de lui. Il s’y précipita.
    Il finit par atteindre le sommet de
la colline. En sueur, hors d’haleine, il tomba sur une piste de gibier qui longeait
l’éminence. Ancienne et bien dessinée, elle était surplombée de gigantesques
branches de sycomores, d’ormes et de chênes qui formaient au-dessus du sentier
une voûte ne laissant traverser que quelques rayons de soleil à peine
suffisants pour l’illuminer. Il faisait aussi sombre que dans une cellule, mais
comme progresser à travers les denses broussailles serait moins facile encore,
Aethelfrith décida de la suivre. Pour bientôt se rendre compte à quel point il
était aisé pour un homme à pied de se perdre dans la forêt.
    La chaleur avait progressivement
augmenté à mesure que le soleil montait dans le ciel, et le frère se
réjouissait de l’ombre que lui procuraient les branches qui pendaient au-dessus
de lui. Il progressait tranquillement, à l’écoute des grives qui chantaient en
haut des arbres et, plus bas, de la stridulation des insectes œuvrant dans les
feuilles mortes qui tapissaient le sol. D’un instant à l’autre, se disait-il,
il allait faire demi-tour – mais le chemin était doux sous ses pieds, et
l’incitait à poursuivre.
    Au bout d’un moment, le

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