Robin
du tout. Mais le comte…
— C’est mon église, pas
la sienne. C’est moi qui dirige ici, compris* ?
— Assurément, Votre Grâce,
s’excusa le charpentier déconcerté. Que dois-je dire au maître ?
— Que je lui fournirai de
nouveaux plans dans trois jours, déclara l’abbé en commençant à s’éloigner.
Dites-lui de venir me voir pour recevoir ses instructions. »
Sur ce, l’abbé marcha jusqu’à
l’ancienne chapelle, marqua un temps d’arrêt devant, puis poussa la porte. Deux
prêtres l’accueillirent. À en croire leur apparence, ils avaient dormi dans le
sanctuaire au milieu de leurs affaires empaquetées.
« Qui a la charge de ces
lieux ? demanda Hugo d’un ton impérieux.
— Salutations dans le Christ,
frère abbé, dit l’évêque en s’avançant. Je suis Asaph, évêque de Llanelli. Nous
aurions aimé vous faire un meilleur accueil, mais comme vous le voyez, c’est
tout ce qui reste du monastère, et le comte contraint les moines à travailler
pour lui.
— Quoi qu’il en soit…»,
grimaça Hugo en considérant la chapelle plongée dans l’obscurité. L’odeur de
renfermé le fit éternuer. « Vous êtes prêts à partir, à ce que je vois. Je
ne vous retiens pas.
— Pour tout vous dire, nous
attendions de vous passer les rênes, répliqua Asaph.
— Ça ne sera pas nécessaire.
— Non ? Nous pensions que
vous aimeriez avoir quelques renseignements sur votre nouveau troupeau.
— Votre présomption vous a
détourné du droit chemin, Monseigneur. C’est le troupeau qui doit apprendre à
connaître et à suivre son berger, pas le contraire. » Hugo éternua de plus
belle et pivota en direction de la porte. « Je vous souhaite bon voyage.
— Père supérieur, s’il vous
plaît, plaida l’évêque en se précipitant à sa suite. Nous aurions tant à vous
apprendre sur l’Elfael et son peuple.
— M’apprendre ? »
L’abbé Hugo se tourna face à lui. « Tout ce que j’ai besoin de savoir, je
l’ai appris sur la selle de mon cheval en venant ici. » Il jeta un œil
torve à la structure rudimentaire, puis aux deux prêtres esseulés. « Votre
mandat ici a pris fin, Monseigneur. Dieu, dans Sa grande sagesse, a décrété un
nouveau départ pour cette vallée. Le vieux doit laisser place au neuf. Une fois
encore, laissez-moi vous souhaiter bon voyage. Je ne pense pas que nous nous
reverrons. »
En traversant la place pour
rejoindre son cheval, l’abbé passa devant le charpentier, qui s’était assis sur
une pile de planches avec une scie sur ses genoux. « Et tout ça ? lui
cria l’ouvrier en désignant l’échaudage inachevé de bois d’œuvre derrière lui,
qu’est-ce que je vais en faire ?
— C’est un entrepôt pour la
dîme, répliqua l’abbé. Il lui faudra une porte plus large. »
« Toi, Tuck, tu as la tâche la
plus importante, lui avait dit Bran en l’aidant à monter en selle. Le succès de
notre plan repose sur tes épaules.
— Oui, avait-il répondu, vous
pouvez compter sur moi ! » Porté par des vagues d’espoir et
d’optimisme, il avait quitté Cél Craidd les oreilles pleines d’applaudissements
et d’adieux joyeux.
Certes, mais la bouffée
d’enthousiasme qu’Aethelfrith avait ressentie en se sachant partie prenante du
plan ambitieux de Bran s’était transformée en pessimisme confus le temps qu’il
atteigne son petit oratoire sur la route d’Hereford. Comment, par la barbe
des apôtres, suis-je supposé découvrir le trajet du convoi de De Braose ?
Comme si ce n’était pas déjà assez
compliqué, il devait trouver ces informations longtemps à l’avance, de manière
à laisser à Bran et à son Grellon suffisamment de temps pour se préparer. À cet
effet, on lui avait confié le meilleur de leurs chevaux de sorte qu’il puisse
revenir aussi vite que possible après avoir accompli sa mission.
« Impossible »,
marmonna-t-il pour lui-même. Avec ou sans cheval. « Jamais je n’aurais dû
accepter pareille folie. »
Après tout, l’idée avait été la
sienne à l’origine. « Tuck, mon bonhomme, tu y as mis les deux pieds cette
fois-ci. »
Une fois en vue de l’oratoire, il
fut soulagé de constater que personne ne l’attendait. Des gens lui avaient
rendu visite en son absence pour lui offrir des présents. Des œufs, des
morceaux de fromage et des bougies en cire d’abeille avaient été posés en
évidence devant sa porte. Après avoir attaché sa monture
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