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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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ne livrât pas le bon cru promis par le grain,
à moins qu’elle ne ridiculisât les Cassandre en donnant plus de meilleur vin
que n’en peuvent contenir leurs tonneaux !
    Plus que la modicité de la récolte, un malaise subit de
Charlotte attiédit la joie des vendangeurs, lors du ressat traditionnel à
Rive-Reine. M me  de Fontsalte, qui avait tenu à danser le picoulet,
ronde endiablée qui demande du souffle et des jambes, quitta brusquement la farandole
sur la place du Marché, fit trois pas vers un banc et s’effondra, sans
connaissance. Alexandra, dont Charlotte venait de lâcher la main, ne perdit pas
son sang-froid et courut prévenir Louis Vuippens qui bavardait avec Zélia, assise
sur les marches de la Grenette.
    Avant que le médecin fût près d’elle, Charlotte avait repris
conscience et se plaignait d’une égratignure au coude, qu’elle s’était faite en
tombant. Déjà, une servante de l’hôtel de Londres lui tendait un petit verre de
lie, tandis qu’on l’aidait à s’asseoir.
    Vuippens demanda aux gens de s’écarter, tâta le pouls de M me  de Fontsalte,
lui demanda si elle respirait aisément, lui fit étendre le bras et voulut encore
savoir si elle se sentait assez gaillarde pour marcher jusqu’à la maison de son
fils.
    Charlotte, ayant répondu qu’elle se sentait tout à fait bien
et mettait son malaise sur le compte de la danse trop rapide pour elle, déclara
qu’elle n’entendait pas quitter la fête.
    — Très bien, dit Louis, mais restez tranquille. Le
picoulet n’est plus de votre âge. Et allez, au moins, jusqu’à l’hôtel pour
desserrer votre corset.
    — Voyez-vous ce garçon, que j’ai vu naître et qui se
mêle de mon corset ! lança Charlotte en riant.
    Blaise de Fontsalte et Axel, qui se trouvaient de l’autre
côté de la place, arrivèrent, eux aussi prévenus par Alexandra. La vue de sa
mère plaisantant avec ceux qui l’entouraient rassura Axel mais non le général.
    — C’est la troisième fois, depuis cet été, que votre
mère perd connaissance après un effort. Vuippens lui a conseillé de ménager son
cœur mais elle se croit inusable et n’en fait qu’à sa tête.
    Comme le médecin approchait, Axel l’interpella :
    — Pourquoi ne m’as-tu pas parlé des malaises de ma mère ?
demanda-t-il, un peu sèchement.
    — Parce qu’elle ne veut pas que l’on s’inquiète pour
elle. Elle m’a défendu d’en parler à quiconque, dit le médecin.
    En questionnant le général, Vuippens et Flora – elle
avait été témoin de la première syncope de son amie –, Axel apprit que sa
mère, peu après le voyage en Angleterre, s’était trouvée mal, à Lausanne, en
arrivant sur l’esplanade de la cathédrale, en haut de la série des escaliers du
Marché. Elle avait été victime d’un nouvel évanouissement après la conférence
qu’elle avait donnée au Cercle des Dames de la rue de Bourg.
    — Ton diagnostic ? demanda Axel, se tournant vers
son ami.
    — Usure du cœur, mon vieux. Ta mère est âgée de
cinquante-sept ans. On lui accorde dix ans de moins et, comme tu sais, elle
veille à ça. Mais son organisation interne est bien celle d’une femme de
cinquante-sept ans qui ne veut rien céder à la vieillesse. Étant parfaitement
ingambe, elle entend vivre comme à trente ans et, de surcroît, se sentirait déshonorée
de reconnaître la fatigue inhérente à son activité mondaine. Lausanne est une
cité faite de rues fortement pentues et d’escaliers qui éprouvent les cœurs
faiblissants, expliqua Vuippens.
    — Mais ces syncopes, ne peut-on les prévenir ? demanda
Axel.
    Blaise, qui dissimulait son inquiétude, intervint :
    — Ces syncopes, elle ne les sent pas venir et, quand
elle reprend conscience, elle trouve toujours de quoi expliquer ce qu’elle nomme
ses vapeurs ! Le fait est que ces malaises ne laissent pas de trace, sinon
une grande fatigue, qu’elle ne prend pas non plus en considération. J’essaie
par tous les moyens de la forcer au repos mais elle n’est pas dupe de mes initiatives
et me dit : « Les gens sont vieux quand on les traite comme des vieux ! »
C’est sa phrase, conclut Blaise.
    — Que peut-on craindre ? Ne me cache rien, ordonna
Axel à Louis, dès que Fontsalte se fut éloigné pour rejoindre sa femme.
    — Je crois que son cas relève assez exactement de ce
que nous nommons, depuis peu entre médecins, le syndrome d’Adams-Stokes. C’est
un ralentissement du pouls

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