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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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d’En-Haut embarrassée.
    Informé par la cuisinière, Axel estima qu’Alexandra était en
âge de savoir pourquoi et comment venaient au monde les enfants. Il conseilla à
Élise de ne pas esquiver le sujet et de donner à sa filleule les explications
qu’une mère doit à une fille proche de la puberté.
    — Surtout, ne lui racontez pas que les enfants viennent
dans les choux ou les courges, sont apportés par les cigognes qui nichent à
Avenches, ou sortent un beau matin des brouillards du Rhône. Alexandra en sait
déjà suffisamment, à mon avis, pour entendre la vérité.
    Ce jour-là Élise prit la fillette à part, au jardin, et s’exécuta
avec tact.
    — J’ai remarqué, depuis quelque temps, que tu me
regardes souvent du coin de l’œil, ma petite.
    — J’ai vu que votre ventre a grossi, dit la fillette.
    — C’est parce que j’attends un bébé, Alexandra.
    — Je sais, marraine. La maman d’Alice était comme vous
avant qu’Alice ait deux petits frères d’un coup. On les appelle des jumeaux. Alice
m’a dit que les enfants sont dans le ventre de leur maman, comme des petits pois
dans leur gousse verte. Souvent, il n’y en a qu’un, mais il peut y en avoir
plusieurs. Ils grossissent et quand ils sont assez forts, ils crèvent la gousse
et sortent. Alice m’a dit que ça fait très mal à la maman quand le bébé sort, commenta
Alexandra avec plus de malice que d’apitoiement.
    — Eh bien, c’est une heureuse comparaison, Alexandra. Je
n’ai plus grand-chose à t’apprendre, dit Élise, un peu pincée.
    La fillette, qui se dandinait d’un pied sur l’autre en ayant
l’air de s’intéresser au babillage d’un jeune merleau perché sur un muret, n’entendait
pas en rester là.
    — Alice et moi, on sait comment les bébés sortent mais
on sait pas comment ils entrent, observa-t-elle, timide.
    — C’est l’amour du papa et de la maman qui fait les
bébés. Tu n’es pas sans savoir que le Bon Dieu a fait l’homme et la femme
différents, pourvus d’organes différents et qui, si je puis dire, ainsi, se
complètent, Alexandra.
    — Je sais, marraine, j’ai vu des garçons se baigner
tout nus, à La Tour-de-Peilz. Ils ont comme un robinet pour faire pipi. Alice m’a
dit que ça s’appelle bisôle mais qu’il faut pas regarder, qu’ils font un péché
en se baignant sans maillot et que ceux qui les regardent font un péché aussi, rapporta
Alexandra.
    — Bisôle est un mot très vulgaire, un mot de patois de
garnement, que tu ne dois pas utiliser, Alexandra. Cet organe des garçons s’appelle
sexe mais il vaut mieux ne jamais en parler, n’est-ce pas.
    — Bien sûr, marraine, mais Alice m’a dit que ça sert
aussi à faire les bébés… c’est dégoûtant !
    — Allons, ne t’occupe pas de ces choses pour le moment,
ma chérie. Retiens seulement que les bébés sont le fruit de l’amour entre une
femme et son époux. Et c’est parce que nous nous aimons très fort, ton parrain
et moi, que nous aurons un enfant, si Dieu le veut, avant la fin de l’année. Es-tu
contente ?
    — Je serai plus contente si c’est un garçon, marraine.
    — Eh bien, prie le Bon Dieu, qu’il me fasse la grâce de
donner un fils à ton parrain.
    Cet été-là fut marqué par une catastrophe naturelle, qui
affecta surtout les cantons méridionaux de la Suisse, Grisons, Tessin, Uri et
Valais. De très violents orages, suivis de fortes chutes de pluie, ajoutèrent
une impressionnante quantité d’eau à celle émanant de la fonte exagérée des
glaciers, qui ne résistaient pas à l’été le plus chaud qu’on ait depuis
longtemps connu. Au cours de la nuit du 21 au 22 août, la pluie redoubla d’intensité.
« Du haut des montagnes se précipitent des quantité d’eau inouïes, ruisseaux,
torrents, rivières, fleuves débordent dans les vallées, entraînant des masses
de pierres, graviers, terre, arbres déracinés. Des routes sont coupées et même
en partie détruites, des maisons effondrées. Une grande quantité de bétail a
péri noyée ainsi que quelques hommes et enfants », écrivit un journaliste
valaisan, pour qui la vie d’un homme comptait moins que l’existence d’une vache !
Car c’est dans le Valais que les eaux avaient fait le plus de ravages, à partir
d’Obervvald à l’issue de la vallée supérieure du Rhône. On avait mesuré trente
pieds d’eau dans le val d’Anniviers. Les premières estimations laissaient prévoir
plus d’un

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