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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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au-dessus duquel flottait la grande bannière fédérale. On y
accueillerait, plus tard, les personnalités, et des dames émues remettraient
les prix aux champions. Axel Métaz, que les carabiniers veveysans eussent voulu
pour président, avait décliné l’honneur d’une telle charge. Il se croyait néanmoins
obligé d’accompagner la délégation de sa ville pour encourager les tireurs
sélectionnés. Et puis le cercle Fontsalte, maintenant bien intégré à la bonne
société lausannoise, se devait d’être présent, au complet, à l’ouverture du tir.
    Un calicot tendu entre deux arbres, à l’entrée d’une allée
bordée de haies de sapineaux, proclamait : « Frères d’armes soyez les
bienvenus », là encore, en deux langues seulement. Au bout de la voie, sur
un plateau herbeux fermé par un petit bois, s’étirait, sur cent cinquante
mètres, le stand de tir, un hangar de bois, équipé de tables à charger. À cent
pas de cet abri, les cibles émergeaient d’une tranchée que l’on pouvait
atteindre sans risque par un chemin couvert, ce qui évitait d’interrompre les
tirs pendant les déplacements des juges et des hommes de service.
    Tout en admirant la parfaite organisation du tir, les
Fontsalte et leurs amis s’avancèrent jusqu’aux bâtiments de réception
construits pour la circonstance. L’un d’eux, abondamment pavoisé, abritait les
prix offerts, coupes, cloches, sabres, fusils, rassemblés autour d’une pyramide
supportant les plus belles pièces d’argenterie et couronnée par un buste de
Guillaume Tell. Parmi les carabines dressées en faisceaux qui récompenseraient
les meilleurs tireurs, on remarquait celles, aux platines finement ciselées, offertes
par le gouvernement vaudois.
    Après cette visite, Axel convia parents et amis à prendre
des rafraîchissements au café, un bâtiment à galerie, d’où l’on découvrait
toute l’étendue du champ de tir et, au-delà, la cathédrale, campée sur sa
colline, le lac et au loin les Alpes. Ils parcoururent ensuite la cantine, où s’alignaient
tables et bancs, assez nombreux pour accueillir en même temps deux mille
convives. Devant l’estrade, où se relaieraient les musiques des différents
cantons chargées de saluer de flonflons héroïques les innombrables toasts que l’on
porterait lors des banquets, était dressée la table d’honneur, face à un autre
buste de Guillaume Tell.
    Ce fut encore un Guillaume Tell, cette fois-ci en chair et
en os, tout muscles et barbe, portant l’arbalète du héros et flanqué d’un joli
petit garçon encombré d’une pomme et d’une flèche, qui ouvrit, le 3 juillet,
le défilé inaugural. Parti à midi de Montbenon, après que vingt-deux coups de
canon, un par canton, eurent salué les délégations, 1 500 tireurs et
autant d’accompagnateurs, alignés derrière les porte-bannières et les musiques,
se mirent en route à travers la ville pour gagner le champ où se dérouleraient,
pendant une semaine, les épreuves du huitième tir fédéral.
    À l’arrivée, quand les délégations se rangèrent en carré
pour la cérémonie d’ouverture, les nombreux badauds purent constater, une fois
de plus, l’engouement des Suisses pour les concours de tir. Le canton de Vaud
était représenté par 887 tireurs, Berne en avait envoyé 242, Genève 219,
Fribourg 124, Appenzell 27, Saint-Gall 21, Glaris 10, Uri 4,
le Tessin 2 et Schaffhouse un seul, qui comptait bien défendre les chances
de son blason. Quand toutes les bannières des sociétés eurent été hissées aux
pignons de la maison du maître de camp, le bourgmestre Hess, président du
comité zurichois, organisateur du précédent tir fédéral, en 1834, prit le
premier la parole.
    « Nous voulons rester Suisses, confédérés, frères d’armes »,
commença-t-il, confirmant aussitôt le caractère à la fois patriotique et
politique de la manifestation. Et le bourgmestre de poursuivre avec conviction :
« Nous voulons être Suisses et non Français, Allemands ou Italiens, quelle
que soit l’estime que nous pouvons avoir pour ces peuples. Soyons et restons un
petit peuple montagnard, œuvrant tranquillement pour lui, restant neutre au
milieu de ses voisins et vivant avec eux en heureuse harmonie. »
    De la suite du discours, un peu filandreux, Axel ne retint
qu’une autre phrase : « Nous voulons aussi rester confédérés. Formons
un peuple et non une foule de petites peuplades, quand il s’agit des

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