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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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intérêts
communs. Gardons cette alliance éternelle, qui n’a besoin d’autre révision ni d’autre
garantie que celle de notre bonne volonté, de notre courage, qui nous unit plus
étroitement qu’une alliance écrite. »
    C’était une pierre dans le jardin des radicaux qui
réclamaient, depuis longtemps, la révision de la Constitution fédérale. C’était
aussi, deux ans après, une réplique au Zougois Sidler qui, lors du tir de
Zurich, avait provoqué des pugilats en réclamant ouvertement une révision du
Pacte fédéral.
    Après avoir rendu hommage aux carabiniers qui ne devaient
avoir « d’autre ambition que conquérir le laurier vert du patriotisme »,
le comité zurichois remit au comité vaudois, qui en aurait la garde jusqu’au
tir fédéral suivant, la bannière de la Société suisse des carabiniers [77] .
    À Henri Druey, président de la Société vaudoise des
carabiniers, fonction adroitement soufflée au général de La Harpe, qui eût été
plus qualifié, estimaient Fontsalte et Ribeyre, avait donc échu l’organisation
du huitième tir fédéral. Sa réussite devait beaucoup à l’activité du lieutenant-colonel
Louis-Marc Begoz, instructeur en chef des milices vaudoises depuis 1819 et
fondateur de la Société des carabiniers vaudois en 1825. Begoz, qui avait servi
dans plusieurs régiments suisses de l’armée napoléonienne pendant la campagne
de Russie, partageait, disait-on, les idées politiques de Druey.
    Le meneur radical, membre du Conseil d’État, paraissait fort
satisfait de ses prérogatives temporaires. On avait constaté, depuis la
création des tirs fédéraux, que ceux-ci offraient aux politiciens une
incomparable tribune. De là, ils pouvaient s’adresser à une foule de citoyens
venus de tous les cantons, y compris de ceux où la liberté d’expression restait
encore aléatoire, et développer publiquement leurs idées. Druey n’était pas
loin de considérer que le tir fédéral constituait le véritable parlement du
peuple. Et puis ses sympathisants vaudois, lecteurs du Nouvelliste, journal
que Druey avait accaparé, pourraient constater que les discours de leur maître
à penser, souvent imprimés in extenso dans son journal, étaient plus
audibles que lisibles !
    Après avoir remercié les Zurichois, Druey gravit la tribune
et se prépara à prendre la parole. Avant même qu’il eût ouvert la bouche, Flora
se mit à souffler comme une chatte en colère. Pour elle, tout radical était un
révolutionnaire dangereux, un athée sectaire, un fossoyeur des vertus
helvétiques. Druey ne répétait-il pas, depuis quelque temps, que le parti
radical devait combattre aristocrates et libéraux comme le bien doit combattre
le mal !
    Claude Ribeyre de Béran, sans partager les outrances de sa
femme, savait, comme Blaise de Fontsalte, quelles étaient les ambitions de
Druey et connaissait ses méthodes. Le chef radical présidait une société de son
cru, l’Association nationale, née d’une scission qu’il avait provoquée au sein
de l’Association de sûreté fédérale, dont la mission politique était, à l’origine,
d’interdire le retour au pouvoir des conservateurs dans les cantons dits régénérés.
Organe de combat des radicaux, la section vaudoise de l’Association nationale, fondée
par Druey et Jean-Louis Leresche, un pasteur sans paroisse, révolutionnaire
plus anarchiste que socialiste [78] passait pour alliée privilégiée des mouvements Jeune Europe, créé à Berne en
1834, et Jeune Suisse, plus récemment fondé à Nyon, par le révolutionnaire
professionnel Giuseppe Mazzini. Bien que l’expédition des Polonais contre la
Savoie, montée deux ans plus tôt par l’italien, eût été un complet fiasco, le
carbonaro dissident poursuivait son rêve : une confédération alpine centrée
sur la Suisse.
    Sans jamais prendre parti ni répondre aux sollicitations des
politiciens de tous bords, les deux généraux français se tenaient informés, peut-être
par réflexe d’anciens des Affaires secrètes de l’Empire, de l’évolution
politique du canton de Vaud. Ils savaient comment Henri Druey avait accueilli, avec
bienveillance disait-on, le 19 juin précédent, lors d’une réunion de l’Association
nationale, l’idée lancée par un certain Ernest Schüler [79] , révolutionnaire
allemand naturalisé suisse. Cet activiste du mouvement Jeune Suisse, avait
proposé que l’on profitât du tir fédéral de Lausanne pour faire

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