Sachso
par le temps. La débâcle est proche et ces hommes d’expérience la pressentent, tel l’amiral Jozan : « Nous sommes évidemment parmi les premiers à être informés mais c’est là, dans ce kommando, que nous avons un jour la certitude de la défaite allemande : quand des S. S. commencent à prendre leurs précautions et apportent des costumes civils pour leur fuite… »
Comment la rigueur mathématique peut-elle s’accommoder des approximations douteuses de la chiromancie et autres pratiques qualifiées de « sciences occultes » ? Cela semble pourtant aller de soi chez les nazis et Sachsenhausen fournit un curieux exemple du recours des plus hautes autorités du III e Reich aux « devins » du camp.
Dans les premiers jours d’août 1943, à l’appel du matin, le commandant de Sachsenhausen demande à tous les adeptes de l’occultisme, voyants, tireurs de cartes, radiesthésistes, de se faire connaître à leurs chefs de block. Une mission importante pour la sécurité du Reich pourra leur être confiée et être éventuellement d’un bon rapport pour eux. Près de deux cents se présentent, mais une quarantaine seulement sont retenus, dont un Français, l’abbé Le Moing, de l’église Notre-Dame-de-Lorette à Paris, qui manie le pendule avec beaucoup d’assurance.
Quelques jours après, le « kommando des devins » est habillé de neuf et embarqué dans un car pour Wannsee, où les S. S. possèdent une luxueuse propriété. Himmler est là avec des officiers de son état-major ; ils cherchent à savoir où se trouve une importante personnalité qui a disparu. Chacun comprend vite qu’il s’agit de Mussolini, renversé par son ex-complice, le maréchal Badoglio, et séquestré dans un lieu inconnu.
Sur une grande carte d’Italie, l’abbé Le Moing promène son pendule, qui reste aussi imprécis que les déductions avancées par ses compagnons. Il reçoit néanmoins trois cigares et tous partagent un plantureux repas avant de revenir au camp. C’est un autre familier de Sachsenhausen, du côté des maîtres et non pas des esclaves (le colonel S. S. Skorzeny) qui libérera, le 16 août 1943, Mussolini de sa prison du Grand Sasso.
Dans l’utilisation des spécialistes en tous genres détenus dans les camps, Himmler s’intéresse très vite, après le déclenchement de la guerre, aux tueurs et pilleurs professionnels qui portent le triangle vert des « droit commun » . En Russie notamment, derrière la ligne du front, les S. S. ont besoin d’unités spéciales pour nettoyer par le feu et le sang les territoires conquis. Plusieurs de ces unités se rendent tristement célèbres sous le nom de leur chef Oskar Dirlewanger, qui a bientôt une base de recrutement et d’entraînement au camp même d’Oranienburg-Sachsenhausen.
Bien que nazi de la première heure, Dirlewanger est resté longtemps dans l’ombre. C’est un débauché peu recommandable. Il a été condamné en 1934 à deux ans de prison pour viol. Dès sa sortie il a récidivé et a été interné en camp de concentration. Il n’en est sorti que sur l’intervention de son compagnon de combat de la guerre 1914-1918, Gottlieb Berger, devenu officier supérieur S. S. En compensation, il a dû s’engager dans la Légion Condor aux côtés des fascistes de Franco.
Maintenant, toujours soutenu par Berger, Dirlewanger pavoise. En août 1943, il recrute trois cents « verts » de Sachsenhausen qui sont entraînés de manière impitoyable sur les terrains de manœuvre des S. S. dans le Wald. Les « Dirlewanger » ne sont pas épargnés par les châtiments corporels ; par contre, ils sont assurés du droit de pillage et de viol dans leurs exploits futurs. Quelques centaines d’autres sont enrôlés au printemps 1944. Au début de l’automne, sur proposition de Dirlewanger à Himmler le 7 octobre 1944, le recrutement est élargi aux détenus politiques allemands. Mais peu consentent à revêtir l’uniforme S. S. et ceux qui le font dans l’intention de passer chez les Soviétiques à la première occasion le paieront souvent très cher. Ils peuvent difficilement prouver la véracité de leurs professions de foi antifascistes alors que les crimes des « Dirlewanger », eux, sont bien connus des Soviétiques.
Les S. S. ont des émules dans tous les pays qu’ils occupent, des traîtres qui s’enrégimentent volontairement comme les fascistes français de la « division Charlemagne ». Mais,
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