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Sachso

Sachso

Titel: Sachso Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Amicale D'Oranienburg-Sachsenhausen
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en temps, il y a cependant des imprévus. Une nuit, alors que la cuisson fonctionnait bien et qu’une vapeur abondante sortait du pied du tour, surgissent des officiers S. S. en visite. Vite, je barbouille d’huile la pièce en cours d’usinage et je force la pression sur l’outil de travail : ça fume abondamment. À un officier qui s’en inquiète, je réponds dans mon charabia que, ma pompe à eau étant en panne, je m’arrange pour que le tour continue de marcher… »
    Mais, en ce début de 1943, le recours important de la solidarité est encore la cuisine du grand camp, sur laquelle règne en maître incontesté le « rouge » allemand Fritz Eickemeyer avec un solide détachement de ses camarades anciens combattants des Brigades internationales en Espagne. Les « verts », à maintes reprises, ont dénoncé et fait exterminer les « rouges » pour prendre la direction du camp, mais malgré leurs ardentes convoitises, ils n’ont jamais pu déloger Fritz et son équipe, qui se battent farouchement et habilement afin de conserver à leurs camarades cette possibilité de survie dont ont bénéficié, entre autres, les mineurs français.
    Vingt-cinq Espagnols dirigés par Juan Mestres, Jaime Marco et José Carabasa font partie du convoi français de janvier 1943. Par Fritz, qui parle leur langue, ils établissent une nouvelle liaison avec le comité international. Par son intermédiaire, certains postes sont attribués à des Français ou des Espagnols, certaines distributions de « soupe blanche » nourrissante et sucrée vont à des malades du Revier ou à des compatriotes à bout de forces. Par cette filière, le coiffeur Bernado Garcia, qui aidera au regroupement des Espagnols restés au grand camp, est d’abord affecté, dans sa profession, au block 52 :
    « Comme coiffeur, je me maintiens trois mois à ce block d’anciens dont les matricules s’échelonnent de 10 à 38 000. Mais le Blockführer S. S. reproche un jour au Blockältester “ce luxe qui n’est pas permis au camp”. Je suis alors muté à l’ Entlausung, le service de l’épouillage et de la désinfection, où les détenus qui ont tous des matricules très bas (le Vorarbeiter a le n° 3) commencent par me regarder en chien de faïence, moi, le 58 520. Mais j’y resterai jusqu’en 1945 et j’y apprends à connaître l’organisation secrète de Sachsenhausen.
    « Comme tous ceux qui ont un poste dans l’administration du camp, j’ai mes entrées partout. Je peux aller quand je veux au Revier voir les malades, porter des messages, du ravitaillement…
    « C’est à l’ Entlausung que je vois arriver un jour Largo Cabarello, l’ancien président du Conseil de la République espagnole. Il sort des cachots berlinois de l’Alexanderplatz. À soixante-dix ans, tout maigre, il est dans un état pitoyable. On me prend comme interprète pour lui parler. Je lui évite la fouille, le rasage, la douche et je suis chargé de l’accompagner à la Schreibstube pour prendre son matricule puis le conduire au Revier. Là le Vorarbeiter se moque de lui et me dit : “C’est un imposteur !” J’insiste : “Ce sont les instructions de la Kommandantur, vérifiez !” Il va se renseigner et, au retour, confirme en m’enjoignant d’emmener Largo Cabarello au Revier III, où les docteurs polonais, luxembourgeois et belges le soigneront du mieux possible. »
    L’atmosphère fraternelle patiemment créée entre les Français gagne les autres nationalités. Elle n’est plus restreinte à des petits cercles mais s’étend à l’ensemble. Elle émousse les aspérités, huile les frictions suscitées par les S. S. et facilite la vie au camp pour ceux qui ont besoin d’être soutenus et se sentent parfois isolés. Louis Péarron, gaulliste, connaît une de ces mauvaises passes : « C’est mon copain communiste allemand Robert Ullrich qui m’a sauvé la vie en me donnant sa soupe à une époque où j’étais délaissé par les camarades français. » En réalité, Ullrich, membre du comité clandestin allemand, n’agit pas seulement par sympathie personnelle mais en accord avec l’organisation française.
    Au block 8, Gaston Bernard a des ennuis avec son voisin de placard, le schlagueur officiel du camp, dont le brassard porte la lettre Z : « Prétextant que je le gêne, il m’attrape et me projette plus loin. Aussitôt les politiques allemands le prennent à partie et désormais il me laissera tranquille.

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