Sachso
Après une courte marche, nous rencontrons le premier soldat américain. Il appartient à la VIII e armée U. S. qui s’est battue au Luxembourg, à Ehelbruch et Diekrich. Nous lui demandons s’il peut nous donner à manger. Il nous offre une cigarette et nous conseille de fouiller dans les camions allemands qui sont là, abandonnés. Le quatrième (ou le cinquième) que nous visitons est en effet un camion de ravitaillement. Nous nous servons, sous les yeux de l’Américain réjoui. Nous prenons même une auto pour terminer notre route. »
Antoine Thumerelle a la chance d’être parmi les premiers libérés le 2 mai, de ce côté : « Cela me vaut d’être hospitalisé par les Anglo-Canadiens à leur Elisabeth-Hospital qu’ils ont installé dans les locaux du Kinder Seminar de Schwerin. Les fenêtres de derrière donnent sur le lac. C’est reposant, mais nous perdons là trois de nos camarades, dont l’inhumation a lieu en notre présence au cimetière de Schwerin dans trois fosses creusées à gauche tout près de l’entrée. »
Ce matin-là du 2 mai, dans les colonnes de tête, mais un peu plus à l’arrière, Jean Poilane et ses compagnons de colonne (il n’en reste plus que deux cents sur cinq cents) ont du mal à avancer. Jean Poilane a encore les jambes et les chevilles enflées. Damestoy est encore plus mal en point et Armand Bouffenie, de La Rochelle, doit le soutenir. Jean Poilane remarque que les S. S. sont moins nombreux à les garder. « Vers onze heures, nous faisons halte dans un petit bois. Une heure, deux heures s’écoulent et nous ne repartons pas. Des camions de la Croix-Rouge suédoise s’arrêtent. Avant qu’ils ne redémarrent, les S. S. s’entretiennent un long moment avec leurs convoyeurs. Puis nos gardes discutent entre eux et finalement s’en vont, nous laissant seuls. Il ne reste que l’adjudant S. S. Il nous conduit vers un petit pont distant d’un kilomètre et près duquel on aperçoit un officier à cheval. Bientôt nous pouvons distinguer qu’il s’agit d’un capitaine français.
« L’adjudant S. S. nous fait stopper, s’avance vers l’officier français, le salue, lui remet son ceinturon et son revolver. Le capitaine vient alors vers notre groupe. Nous sommes libres ! Nous nous jetons dans les bras les uns des autres. Mais pourquoi, ici, cet officier français, puis ces soldats français qui nous guident jusqu’à l’arsenal de Schwerin ? Ce sont des prisonniers de guerre qui ont pris la ville en charge quelques heures avant l’entrée des troupes américaines ! »
Le 2 mai également, Raoul Abadie, qui s’est arrêté avec sa colonne de 12 à 13 heures, stoppe à nouveau à 13 h 30 : « À ce moment-là, nous nous apercevons que les S. S. partent chacun de son côté. Bientôt nous nous retrouvons seuls. Un vieux civil allemand descend de sa bicyclette à notre hauteur. Nous l’interrogeons. Il nous dit que la guerre est finie, que les Américains sont à Schwerin… Peu après nous découvrons la première jeep. Tout le monde s’embrasse… »
Plusieurs Bretons, Jean Ansquer, Charles Cadiou, Jean Jannin, tous de Brest, et Jean Cuguen, de Saint-Cyr-l’Ecole, font fête au soldat U. S. de 2 e classe Woods. Avec Jean Chalais, de Bordeaux, et Georges Zouzac, de Saint-Mammès, ils lui dédicacent une lettre-souvenir que le soldat américain fera publier plus tard, avec le récit d’un libéré de Sachso, dans The Rainy Lake Chronicle, le journal de sa ville, Raniere Kooch County.
Entre le 1 er et le 2 mai, Schwerin a en effet changé de mains. M. Pfister, délégué du C. I. C. R., en est le témoin. Le 1 er mai au soir, venant de Below, il couche à Schwerin chez le pharmacien du Stalag II E. Le 2 mai au matin, il tente de gagner Lübeck, mais une violente attaque aérienne lui fait faire demi-tour. Il rentre au Stalag où il est accueilli par des cris de joie. Les prisonniers de guerre viennent d’apprendre que dans deux heures les Américains seront là. Une réunion a lieu avec les hommes de confiance et les doyens du camp pour constituer les troupes qui assureront les tâches de police. Le rapport du délégué du C. I. C. R. indique : « À cette occasion, une organisation de gaullistes formée sous l’influence et la direction d’un officier français du Stalag Neubrandenburg qui a reçu pleins pouvoirs du général de Gaulle, me rend les plus grands services.
« Chaque nation constitue sa
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