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Septentrion

Septentrion

Titel: Septentrion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Calaferte
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vulgaire putain, que c’en est fait, qu’il n’y a plus d’hymen et que le désastre se complique d’une vieille vérole inguérissable. M’en payer une tranche. Acte gratuit. Tout le charme. Girondes leurs poulettes qui s’engouffrent sous les grands porches des grands immeubles. Bien roulées. Bien fraîches. Jeunesse qui n’a souffert de rien. Prend la vie en gants blancs. Grille en un soir ce que je gagnais en un mois. Depuis que nous batifolons, Nora et moi, de boîte en boîte, au moins deux nuits par semaine, je commence à voir plus clair. On vit bien. On se goberge. Le fric coule à flots. Ça danse. Ça boit. Ça s’amuse. Retour à l’aube. Complètement givrés. Ça roule bagnole. On rentre se coucher à l’heure où moi et mes pairs nous trottions au turbin, honnêtes travailleurs, juste un café dans le bide, avachis. Les petits matins coupants d’hiver. Le vent en biseau qui vous coince à la gorge. Sur nos vélos dans la brume grasse. Les pieds glacés. Tous les doigts gourds. À pédaler comme des connauds. Des fend-la-bise. Toujours marrons. Toujours refaits. Notre boulot, ça paie leurs nuits enchanteresses. Leurs petits démons. Le vice coûte cher. C’est hors de prix. Je m’aperçois de bien des choses à présent que je suis en place.
    Je disais donc pour les donzelles… Mirobolantes… Sans aller plus loin, il doit y en avoir une bonne tapée qui habitent l’immeuble de l’autre côté. Je les ai repérées. Je les vois qui entrent, qui sortent. Et puis aussi sur les balcons quand il fait beau. À leur fenêtre. Qui ouvre de plain-pied sur le salon. C’est comme chez Nora. Ça miroite. Bien meublé. Il y a des tentures. Des lampadaires. Des gros fauteuils. Elles sont nanties. Elles se pavanent à mes regards, mine de rien, c’est bien de leur âge. Je bigle les gambettes, cambrées, nouveau, chair jeune. Elles se laissent faire, on dirait qu’elles ne me voient pas, mais si je me tire, elles disparaissent.
    De chez Nora, on a une vue enviable sur un balcon en face, un étage plus haut. Là, c’est une brune, adolescente. En me donnant la peine, j’entrevois sous la coupole des jupes. Vous n’allez pas me dire qu’elle ne le sait pas. Elle ne le sait que trop au contraire. Fait des virevoltes de ses jupons, et moi en dessous. Elle se retourne, d’un grand mouvement, de temps à autre, comme si on l’appelait de l’intérieur. Ça la découvre à moitié cuisses quand elle pivote. Par les soirées de grosses chaleurs, c’est le transat, la jupette blanche. Comme un tutu. Elle prend des poses, se gonfle le buste, elle a besoin de s’étirer, se masse les cuisses dans ses deux mains, et puis les jambes. Jamais un regard de mon côté, bien entendu. Je suis simplement en faction, fumant une cigarette à la fenêtre de Mlle Van Hoeck, et elle, là-haut, elle prend l’air sur son balcon, un point c’est tout, quoi de mal à cela ? De tous formats. La grande allure. Débarquent de leur bagnole comme si ça coulait de source. La candeur même sur coussin de velours, c’est ce que je disais. Mais l’œil qui pige quand on les détaille dans la rue, qu’on les voit marcher, qu’on les prend aux chevilles pour remonter sur les cuisses, sur le sexe, à la taille, aux petits seins fermes, qu’on fixe les lèvres, arrivant aux yeux à l’instant précis où on les croise. Malgré l’indifférence qu’elles affectent, il y a le regard. Ça les trahit. Elles sont dans le coup. Connaissent le manège. Se sentent violées. Déshabillées. Tripatouillées. Ça les révolte et ça les trouble. Un peu des deux. Elles savent aussi qu’on se retourne. Pour voir leur cul. Qu’il s’agit là de désir brut. De viande à viande. La chasse des rues. Et comme trophée, le cul des femmes.
    Ainsi va le fil de ma pensée, tandis que dans mon dos les deux perroquets vocifèrent.
    Désœuvré, je demande une cigarette, oubliant que Nora ne fume qu’une saloperie de tabac oriental. Les gauloises ne feront leur apparition que plus tard dans la maison, lorsque je m’y serai moi-même affermi. J’ai d’ailleurs remarqué qu’à mon égard Nora progressait avec circonspection. Si l’on excepte la plupart des soirées que nous passons évidemment dans sa chambre, il ne me semble pas qu’elle veuille me voir m’incruster chez elle trop rapidement. Cessant de hurler, elle me fait signe de prendre une cigarette dans le coffret. Le briquet d’or monogrammé est encastré à

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