Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Sépulcre

Sépulcre

Titel: Sépulcre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Kate Mosse
Vom Netzwerk:
voix par-dessus le cliquetis des harnais et le martèlement des sabots.
    — Elle doit s’occuper des affaires du domaine.
    — Mais le souper est bien prévu pour samedi soir ?
    — Oui, répliqua Anatole en tapotant la poche de son veston. J’ai même promis que nous ferions les messagers. J’ai ici les invitations à remettre aux intéressés.
    Malgré les rafales de vent qui avaient secoué les hêtres pendant la nuit en faisant tomber des feuilles et des branches, l’allée qui partait du Domaine était dégagée et ils avançaient vite. Les chevaux équipés d’œillères gardaient une allure régulière, mais quand ils s’engagèrent dans la descente, les lanternes se cognèrent contre les flancs de la voiture, et ce bruit rappela à Léonie l’orage de la nuit.
    — Tu as entendu le tonnerre cette nuit ? s’enquit Léonie. C’était étrange. Des roulements, puis de soudains éclats, avec sans arrêt les hurlements du vent. Tout ça sans une seule goutte de pluie.
    — Apparemment, ces orages sont fréquents par ici, confirma son frère, surtout en été, où ils peuvent s’enchaîner sans répit.
    — On aurait dit que le tonnerre était piégé dans la vallée, entre les collines. Comme s’il était en colère.
    — Sans doute l’effet de la blanquette ! lui lança Anatole, moqueur, et Léonie lui tira la langue.
    — J’ai parlé avec le jardinier, reprit-elle après un court silence. Il m’a dit qu’ici, les gens croient que les orages viennent quand les fantômes se promènent. Ou bien est-ce le contraire ? Je ne sais plus très bien.
    — Quel dommage ! s’exclama Anatole, ironique.
    Piquée au vif, Léonie se retourna pour s’adresser au cocher assis sur son banc.
    — Connaissez-vous un endroit appelé le lac de Barrenc ? demanda-t-elle en portant la voix.
    — Oc, madomaisèla.
    — Est-ce loin d’ici ?
    — Pas luènh. Pour les toristas, c’est un lieu à visiter, mais moi, je n’irais pas m’aventurer là-bas.
    De son fouet, il désigna au milieu de bois épais une clairière où trois ou quatre mégalithes étaient plantés en terre, comme par la main d’un géant.
    — Là-haut se trouve le Fauteuil du Diable. Et, à guère plus d’une matinée de marche, l’étang du Diable et la montagne des Cornes.
    Si Léonie parlait de ce qui l’avait inquiétée, c’était justement pour mieux dominer sa peur, elle le savait. Pourtant, elle se retourna vers Anatole d’un air triomphal.
    — Tu vois, dit-elle. Ici, ça grouille de démons et de fantômes. On en voit les signes partout.
    — Les signes qu’en ce pays règne la superstition, oui, lui rétorqua Anatole en riant. Ne confondons pas, sœurette.
     
    Le cabriolet les déposa place du Pérou.
    Anatole trouva un garçonnet qui voulut bien distribuer les invitations d’Isolde pour un sou, puis ils entamèrent leur petit tour de la ville. Ils prirent la grand-rue en direction de l’établissement thermal et firent une halte à un café avec terrasse, où Léonie but un bon arabica bien noir et Anatole un verre d’absinthe. Des dames et messieurs passaient devant eux, habillés pour la promenade. Une nounou, poussant une voiture d’enfant. Des jeunes filles aux longs cheveux ornés de rubans de soie rouges et bleus, et un petit garçon en culottes courtes, qui jouait à faire rouler son cerceau avec un bâton.
    Ils se rendirent ensuite aux Magasins Bousquet, le commerce le plus important et le mieux approvisionné de la ville. On y trouvait toutes sortes d’articles, depuis la mercerie et les batteries de cuisine jusqu’aux pièges, filets et fusils de chasse. Anatole confia à Léonie la liste de commissions écrite par tante Isolde et lui permit de passer les commandes, qui seraient livrées au Domaine de la Cade le samedi.
    Léonie s’amusa beaucoup.
    Ensuite ils admirèrent l’architecture de la ville. Beaucoup d’immeubles de la rive gauche étaient plus imposants qu’ils ne le paraissaient de la route ; certains s’élevaient de la gorge de la rivière et comptaient un nombre d’étages impressionnant. Il y en avait de plus modestes, bien entretenus. Et d’autres un peu délabrés, aux murs disjoints et affaissés, comme sous le poids des années.
    Du coude de la rivière, Léonie avait une vue excellente sur les terrasses de la station thermale et les balcons situés à l’arrière de l’hôtel de la Reine. De là aussi, l’établissement semblait plus imposant, avec ses

Weitere Kostenlose Bücher