Sépulcre
quelqu’un, qui vous retient, vous tire en arrière.
— Comme Le Pagad ?
— C’est possible, mais…, hésita Laura, comme pour prendre le temps de choisir ses mots. D’un côté, il y a l’aboutissement imminent d’un projet important, qui touche au travail, à la vie personnelle, ou peut-être aux deux. C’est le cas ? demanda-t-elle en levant la tête.
Meredith se rembrunit.
— Continuez, dit-elle sans rien ajouter.
— D’un autre côté, en parallèle, il y a les signes d’un voyage ou d’un changement de circonstances.
— Cela correspond assez bien, mais…
— Je sens autre chose, affirma Laura en l’interrompant. Ce n’est pas très clair, mais je le sens. Cette dernière carte… elle parle d’un élément que vous allez découvrir, ou mettre en lumière.
Le regard de Meredith se fit plus pénétrant. Depuis le début, elle ne cessait de se rabâcher que ce n’était qu’une expérience amusante, sans conséquences et qui ne signifiait rien. Alors pourquoi son cœur battait-il si fort, sur un rythme si désordonné ?
— Rappelez-vous, Meredith, lui dit Laura d’un ton pressant, l’art de la divination par l’interprétation des cartes ne prétend pas prédire ce qui va ou non se produire. Il explore les possibilités, découvre les motivations et désirs inconscients susceptibles d’influencer un comportement donné.
— Je sais.
Un jeu amusant et inoffensif, c’est tout, se répéta-t-elle.
Mais il y avait une telle intensité chez Laura, sur son visage tendu par la concentration, que l’atmosphère, au lieu de légèreté, était empreinte d’une extrême gravité.
— Une lecture de tarot devrait accroître le libre arbitre, non le diminuer, pour la simple raison qu’elle nous en dit plus sur nous-mêmes et sur les problèmes auxquels nous sommes confrontés. Nous sommes libres de prendre les décisions que nous pensons les meilleures. D’emprunter tel ou tel chemin.
— Je comprends, acquiesça Meredith.
Soudain, elle n’eut plus qu’une envie, en finir. Tirer la dernière carte, entendre ce que Laura avait à lui dire, puis sortir d’ici.
— Du moment que vous vous en souvenez, ajouta Laura.
C’était une mise en garde sans ambiguïté. Meredith dut lutter contre son envie de se lever pour partir sur-le-champ.
— Cette dernière carte, la dix, complétera le tirage. Elle se place en haut, du côté droit.
Un moment, la main de Meredith sembla planer au-dessus du jeu. C’était comme si des lignes invisibles reliaient sa paume aux dos vert, or et argent des cartes.
Alors elle prit la dernière et la retourna.
Un petit cri s’échappa de ses lèvres. De l’autre côté de la table, elle s’aperçut que Laura serrait les poings.
— La Justice, dit Meredith d’une voix égale. Celle qui me ressemble, d’après votre fille.
Laura ne releva pas la tête.
— La pierre associée à La Justice est l’opale, récita-t-elle comme elle aurait lu la page d’un livre. Les couleurs sont bleu saphir, jaune topaze. Il y a aussi un signe astrologique lié à cette carte. La Balance.
Meredith eut un petit rire, qui sonna creux.
— Je suis Balance, dit-elle. Je suis née un 8 octobre.
Laura ne réagit pas, comme si rien ne la surprenait dans ce nouvel élément d’information.
— Dans le tarot Bousquet, La Justice est une carte puissante, continua-t-elle. Si vous acceptez l’idée que les arcanes majeurs sont le voyage du Fou allant d’une bienheureuse ignorance à l’illumination, La Justice se trouve au point médian de ce voyage.
— Ce qui veut dire ?
— Généralement, quand cette carte sort lors d’un tirage, elle incite à conserver un point de vue équilibré. Le consultant doit prendre garde de ne pas s’égarer, de parvenir à une compréhension juste et appropriée de la situation.
Meredith sourit.
— Mais elle est à l’envers, remarqua-t-elle, surprise du calme de sa propre voix. Cela change la donne, n’est-ce pas ?
Laura resta silencieuse.
— Alors ? insista Meredith.
— Inversée, la carte avertit de quelque injustice. Peut-être d’un préjudice, d’une distorsion, d’une erreur judiciaire. Elle contient aussi de la colère, inspirée justement par un sentiment d’injustice, celui d’être jugé ou méjugé à tort.
— Et d’après vous, cette carte me représente-t-elle ?
— Oui, je le crois, conclut Laura après un petit temps. Pas seulement parce qu’elle est sortie en
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