Spartacus
trouver un refuge dès les premières heures du jour. Cependant, l’alerte est rapidement donnée dans la cité. La fuite de 70 ou 80 gladiateurs ne passe pas inaperçue et constitue un dangereux exemple pour les centaines d’autres enfermés dans les villes de Campanie. La piste des fugitifs est facile à retrouver car ils laissent derrière eux les corps ensanglantés de leurs premières victimes. Ces hommes se sont attaqués aux voyageurs qu’ils ont croisés en chemin, et doivent aussi piller les habitations isolées afin de trouver de la nourriture et des vêtements. On découvre rapidement la disparition des armes, un détail qui n’a pas dû rassurer les hommes chargés de ramener les fugitifs.
Les premiers succès
D’après Plutarque, Spartacus et ses hommes parviennent à repousser quelques troupes envoyées contre eux depuis la cité de Capoue. Il ne s’agit pas alors de soldats romains mais de milices urbaines. Ces troupes organisées par les villes pour faire le guet aux remparts et assurer la police des marchés de la ville sont de piètre qualité. Sans chef militaire véritable, elles doivent même trembler de peur à l’idée d’affronter des gladiateurs armés jusqu’aux dents. A n’en pas douter, les escarmouches qui opposent la petite centaine de combattants réunis autour de Spartacus et les milices, guère plus nombreuses, qui leur sont opposées tournent facilement à la confusion des citoyens de Capoue. Si certains restent étendus sur le terrain, la plupart ne doivent pas insister longtemps et préfèrent s’enfuir en lâchant leurs armes. Plutarque souligne aussi que les gladiateurs leur enlèvent « beaucoup d’armes de guerre ». Ils s’en emparent avec joie et jettent leurs armes de gladiateurs « comme déshonorantes et barbares ». Même si ces lignes sont écrites longtemps après les faits, cette allusion est intéressante. D’une part, les armes de gladiateurs sont sans doute abandonnées plus pour leur caractère dégradant que pour leur efficacité, qui est réelle. D’ailleurs, à cette époque, peu de choses permettent de distinguer un bouclier de gladiateur samnite d’un bouclier militaire ; c’est donc pour renier leur condition ancienne que les gladiateurs rejettent leurs premières armes. D’autre part, un équipement uniforme convient sans doute mieux à des combats collectifs comme ceux que les hommes de Spartacus devront soutenir face à des troupes organisées. Enfin, cette histoire d’armes abandonnées semble indiquer que les rebelles ne sont pas encore très nombreux dans cette première phase de la révolte. Même si elle paraît indigne aux yeux de gladiateurs fugitifs, une arme reste une arme. Si Spartacus et ses compagnons s’en débarrassent aussi volontiers, c’est certainement parce que leur troupe est encore étroitement limitée aux quelques dizaines d’hommes issus du ludus de Capoue. Ces derniers, peut-être rejoints par quelques individus, forment alors une troupe de brigands qui vivent de rapines en se réfugiant sur les pentes escarpées du Vésuve. Nul doute que les glaives, les casques, les lances et les boucliers abandonnés par les miliciens suffisent à les équiper et à constituer une redoutable bande de guerriers. Malheur alors aux voyageurs isolés et aux domaines ruraux regorgeant de victuailles que ces gladiateurs devenus libres peuvent dépouiller en toute impunité avant de rejoindre leur base.
6
Une révolte qui prend une ampleur imprévue
Trois chefs à la tête des gladiateurs
D’après Plutarque, une fois arrivés sur le Vésuve, les gladiateurs fugitifs choisissent trois chefs. L’historien grec précise que « le premier d’entre eux était Spartacus ». Les autres historiens semblent admettre implicitement cette prééminence du Thrace. Appien nous a donné les noms des deux lieutenants de Spartacus. D’après lui, les esclaves ont « pour chefs en sous-ordre Oenomaus et Crixos, deux gladiateurs ». Issus comme Spartacus du ludus de Capoue, nous savons d’après Appien que Crixos, que les auteurs latins appellent Crixus, est gaulois. Ce nom semble d’ailleurs provenir d’une déclinaison du gaulois cassi – casses signifiant « le bouclé » ou « le crépu ». En l’associant à Crixus, les auteurs modernes font presque tous d’Oenomaus un autre Gaulois alors qu’aucun historien antique ne le spécifie. La réalité est peut-être un peu différente. D’après le poète Pindare,
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