Spartacus

qu’il doit affronter les esclaves révoltés, en accusant cette fois une nette infériorité numérique. D’après Orose, Longinus y laisse même la vie car cet historien tardif rapporte que « Spartacus tua le proconsul G. Cassius écrasé dans une bataille ».

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    La mystérieuse volte-face
    Un fleuve qui emporte les espérances des esclaves
    A présent, la voie semble libre pour Spartacus. Plus aucune armée ne peut lui barrer la route des Alpes. Il suffit de traverser le Pô, dernier obstacle avant la liberté. Mais les choses ne se déroulent pas comme prévu. A vrai dire, ce qui se passe précisément à cet instant crucial de l’histoire demeure un mystère. De fait, aucun des auteurs anciens ne nous dit pourquoi Spartacus ne va pas plus loin. Les auteurs modernes ont donc cherché une explication plausible. Depuis le XVIII e  siècle, plusieurs traducteurs de Salluste se sont employés à remplir les vides des fragments de ses Histoires et, dans cet exercice, il semble que ce soit le président de Brosses qui ait proposé le premier l’idée d’un débordement du Pô pour expliquer l’arrêt puis la volte-face des esclaves 76 . Cette hypothèse reste vraisemblable et, dans ce cas, Spartacus et ses hommes doivent être stupéfaits par le spectacle qui s’offre à leurs yeux. Aussi loin que le regard peut porter, ce n’est qu’une immense étendue d’eau. Sur les bords du fleuve qui roule des flots boueux, aucune barque, pas la moindre embarcation. Les villes de la région sont informées depuis longtemps de l’approche de cette horde de 100 000 esclaves. Elles ont eu le temps de se barricader et d’accumuler des provisions afin de mettre les cités en état de se défendre. Une fois la défaite du proconsul connue, les citoyens de la province ont immédiatement retiré ou coulé tout ce qui flotte et aurait pu permettre de passer d’une rive à l’autre. Les câbles des bacs ont aussi été sectionnés et plus rien ne permet d’aller sur la rive nord du Pô, ni de traverser ses affluents méridionaux comme la Secchia, le Taro et la Trébie. Les auteurs ne précisent pas en quelle saison Spartacus arrive sur le fleuve. Cependant, il est vraisemblable qu’il ait quitté Thurium au mois de mars. De Thurium aux rives du Pô, son armée a pu couvrir 1 200 kilomètres, par des chemins souvent difficiles, en deux mois. Pour arriver en mai, il a donc fallu que Spartacus et ses milliers de combattants traversent l’Italie du sud au nord en un temps record. Là encore, cette performance confirme ses qualités de chef inflexible : même si 20 kilomètres par jour peuvent sembler peu de chose, ce rythme demeure une performance. En effet, il faut imaginer les interminables colonnes constituées par une armée de plusieurs dizaines de milliers d’hommes. De plus, Spartacus a dû privilégier les chemins de transhumance plutôt que les voies romaines. Eclairé dans sa progression par les bergers et les anciens courriers lucaniens, il est parvenu à maintenir la cohésion de cette troupe hétérogène, qui doit subvenir à ses besoins en pillant les pays qu’elle traverse.
    En admettant que les esclaves abordent les rives du plus grand fleuve d’Italie au mois de mai, ils ont la malchance d’arriver au moment de la fonte des glaces. Pour leur malheur, cette période de l’année est justement celle où le Pô a son débit le plus fort. A présent, quelles possibilités s’offrent à Spartacus ? A l’est, le fleuve se perd en de multiples méandres et débouche sur l’Adriatique. Il n’y a rien à espérer de ce côté-là. Un contournement du fleuve pourrait être envisagé par l’ouest. Mais vers le couchant, il faudrait traverser d’autres affluents. De plus, dans cette direction se dressent de puissantes forteresses romaines comme Plaisance et Parme. Avec Modène sur ses arrières, Spartacus doit redouter ces anciennes colonies… Leur population est exclusivement constituée de citoyens romains depuis 100 ou 150 ans. En 218, Plaisance résista même victorieusement à Hannibal, après sa victoire de la Trébie. Spartacus le sait. Non seulement ces villes ne se laisseront pas prendre mais elles sont capables de gêner la progression de l’armée en venant harceler ses arrières. Au-delà de ces villes, il y a la Ligurie puis, de l’autre côté des Alpes, la Gaule transalpine. Dans cette province, le proconsul Fonteius a déjà dû mettre ses légions en alerte. Celles-ci seront