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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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saboteurs ont « par leurs actions
contre-révolutionnaires et de sabotage, par leur complaisance à l’égard des
koulaks et d’autres éléments garde blancs et petliouristes, spéculateurs, et
filous, tenté de faire capoter les tâches de l’État dans la collecte du blé [664]  ». Vouloir
sauver les paysans de la faim suffit au Guépéou pour transformer des cadres
soviétiques en disciples du nationaliste ukrainien Simon Petlioura, abattu en
1926.
    Au printemps de l’année 1932, le typhus ravage à
nouveau l’URSS, puis, à partir de novembre 1932, la famine frappe l’Ukraine,
le Kouban et le Kazakhstan. En deux ans, le typhus frappe plus d’un million d’individus.
Des paysans affamés attaquent les dépôts de blé, se ruent vers les villes dont
des détachements armés interdisent l’entrée, mangent leurs enfants ou des
cadavres hâtivement déterrés. Des villages entiers sont rayés de la carte. Une
chanson populaire décrit cette sinistre réalité aux dépens de Mikoian,
commissaire au Commerce : « Niet miasa, niet masla, niet moloka,
niet mouki, niet myla no zato iest Mikoian » (Il n’y a pas de viande,
il n’y a pas de beurre, il n’y a pas de lait, il n’y a pas de farine, il n’y a
pas de savon, mais en revanche il y a Mikoian). La crise économique et sociale
réduit l’assise sociale du régime. Dans une lettre d’août 1932,
Kaganovitch souligne les immenses retards dans le paiement des salaires et le
déficit budgétaire record, compensé par le recours massif à la planche à
billets.
    La famine ne détourne pas Staline de la mise au pas
idéologique de la société. Débarrassé des oppositions politiques ouvertes, il
se consacre au contrôle du monde intellectuel, auquel la surveillance policière
du Guépéou ne saurait suffire. En avril 1932, il décide de dissoudre l’Association
des écrivains prolétariens, dont le radicalisme verbal lui déplaît. Il met en
place une commission composée de Postychev, Kaganovitch et lui-même, qui
proclame et chapeaute un comité d’organisation d’une future Union des écrivains
ouverte à tous les littérateurs soviétiques. Il nomme à sa tête un
fonctionnaire des lettres, rédacteur en chef de Novy Mir, Gronski. Ce
dernier est, au sens propre, à tu et à toi avec Staline qui l’invite au Bureau
politique et lui fait attribuer 600 « rations » alimentaires (paiok) que Gronski distribue à sa convenance aux écrivains pour les libérer des soucis
matériels et les attacher au régime. Ce personnage central du monde des lettres
dispose, dit-il, du « meilleur paiok à Moscou », que Staline
lui reproche de distribuer avec trop de parcimonie. « Il me sermonnait
régulièrement en me reprochant d’être pingre et de soutenir trop peu la vieille
intelligentsia [665]  »
qu’il voulait se gagner.
    Mais avant de s’occuper sérieusement des écrivains, il doit
régler l’affaire Rioutine. La crise aiguë du régime a réveillé son ancien
partisan, exclu en septembre 1930, comme bien d’autres vieux opposants.
Rioutine a réuni, le 21 août, dans un appartement de la banlieue de
Moscou, une vingtaine de ces membres du Parti, anciens boukhariniens pour la
plupart. Il leur a soumis une longue analyse de la crise du Parti intitulée « Staline
et la crise de la dictature du prolétariat », ainsi qu’un court projet d’appel
à tous les militants, adopté lors d’une seconde réunion quelques jours plus
tard. Il veut fonder une Union – clandestine – des
marxistes-léninistes.
    Les deux textes contiennent une violente critique du régime
politique et de la dictature personnelle de Staline, produit d’un coup d’État
de type bonapartiste, selon leurs auteurs qui prônent la liquidation. Cinq ans
plus tard, un dirigeant tatar, Saguidouline, déclarera à Evguenia Guinzbourg,
qui partage cette analyse : « Koba c’est le 18 Brumaire. On
extermine les meilleurs militants du Parti qui faisaient ou auraient pu faire
obstacle à l’instauration définitive de sa dictature [666] . »
    Le portrait que brosse Rioutine de Staline, nourri de sa
fréquentation du Guide, est évidemment inspiré par l’amertume de l’homme déçu.
Ce « politicien sans principe […] intrigant et combinard », écrit-il,
est « limité et rusé, amoureux du pouvoir et vindicatif, perfide et
envieux, hypocrite et impudent, vantard et entêté ». Il a « d’abord
prudemment, puis de plus en plus audacieusement,

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