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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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solennelles du gêneur
disparu, le 21 février, Molotov, Kossarev, Khrouchtchev, Stakhanov
prononcent des discours aussi glaciaux que le temps qu’il fait alors. Staline,
lui, ne rend pas hommage à son ancien compagnon. Son silence est un signe et un
signal. Peu avant ce suicide, trois agents du NKVD ont fait irruption chez
Boukharine pour l’inviter à quitter le Kremlin. Le téléphone sonne. Staline
demande : « Qu’est-ce qui se passe chez toi, Nicolas ? –
Des gens viennent m’expulser du Kremlin… – Envoie-les au diable [859]  ! »
lui recommande Staline ; les policiers s’éclipsent. Ce jeu donne une
bouffée d’espoir illusoire au condamné.
    Le plan de liquidation des militaires est bouclé au même
moment. À la mi-février 1937, Malenkov adresse à Staline une liste
détaillée des membres du commissariat à la Défense et des académies militaires
qui avaient soutenu l’Opposition de gauche dans les années 1920. Chaque
nom est suivi de la mention exacte des péchés de l’intéressé : « A
voté pour une résolution trotskyste », « a soutenu les thèses
trotskystes sur les questions de la vie interne du Parti », « partageait
le point de vue des trotskystes sur la question paysanne », « a voté
en 1921 pour la ligne trotskyste sur les syndicats », et autres variantes
des mêmes fautes.
    La réunion du Comité central s’ouvre le 23 février. La
veille, Staline a organisé une confrontation entre Rykov et trois anciens « droitiers »
qui l’accusent d’avoir voulu, en 1932, liquider le Secrétaire général. Depuis
une semaine, Boukharine a entamé une grève de la faim. Staline lui ordonne de
venir au plénum. Boukharine s’y traîne. Devant Staline, deux membres du Comité
central, Ouborevitch et Akoulov, lui serrent la main. Boukharine, pris de
vertige, s’effondre. Staline s’approche de lui et l’interpelle, souriant :
« Contre qui en as-tu avec ta grève de la faim, Nicolas ? Contre le
Comité central du Parti ? Regarde à quoi tu ressembles, tu es complètement
épuisé. Tu dois demander pardon au plénum d’avoir entrepris cette grève. –
À quoi bon si vous avez l’intention de m’exclure ? – Personne n’a l’intention
de t’exclure… Allez, Nicolas, demande pardon au plénum, tu as mal agi [860] . »
Boukharine accepte, mais le rapport introductif de Iejov ne lui laisse aucun
espoir…
    Ce plénum, véritable complot en trois actes, remplit une
triple fonction historique : développer la chasse au « trotskysme »,
dénoncé par Staline comme une entreprise d’espionnage, de sabotage et de
banditisme, préparer le troisième procès de Moscou contre Rykov et Boukharine,
terroriser l’appareil du Parti lui-même accusé de mollesse, d’absence de
vigilance, de complaisance vis-à-vis du « trotskysme », pour en
préparer l’épuration brutale.
    Le rapport de Iejov sur l’affaire Rykov et Boukharine ouvre
la séance. Mikoian le complète. Il déclare que Trotsky, Zinoviev et Boukharine « ont
créé un nouveau type d’individus, des monstres, pas des êtres humains, des
bêtes sauvages, qui, apparemment, intervenaient en suivant la ligne du Parti,
mais qui menaient en réalité un travail de sape sans principe contre le Parti [861]  ». La
parole est ensuite donnée à Boukharine, puis à Rykov, pour l’hallali.
Boukharine éperdu, la barbe hirsute, se débat au milieu des insultes et des
moqueries. Un moment, il hoquette : « Mais comprenez, ça m’est
difficile de vivre. » Staline commente, sarcastique : « Et nous,
c’est facile ? » Boukharine s’écrie : « Jamais je ne me
peindrai en saboteur, terroriste, traître, félon de la patrie socialiste. »
Patelin, Staline lui susurre : « Tu ne dois pas, tu n’as pas le droit
de te calomnier. Ce serait criminel […]. Il faut tout démontrer et ne pas se
contenter de répondre par des formules toutes faites, bourrées de points d’exclamation
et de points d’interrogation [862] . »
Puis, après la suspension de séance, il s’entretient avec lui dans les couloirs
et, lui laissant espérer un arrangement, lui propose, à nouveau, de présenter
des excuses au Comité central pour sa grève de la faim. Le lendemain,
Boukharine s’exécute : il s’excuse. Staline ricane : « C’est peu,
c’est peu ! » « Je demande au Comité central de m’excuser »,
sanglote Boukharine. Staline corrige : « De m’excuser et de me
pardonner. »

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