Sur ordre royal
avance.
Roslynn frissonna. Alors que le moment de la naissance approchait, elle avait de plus en plus de mal à ne pas s’inquiéter au sujet de l’accouchement, aussi changea-t-elle de sujet.
— Combien de paniers de poissons avez-vous comptés ?
Sa mère lui avait dit qu’elle avait vu la poissonnière apporter une livraison dans la cuisine.
— Dix, répondit dame Eloïse.
— Voulez-vous ajouter cette livraison à la liste, ou dois-je le faire ?
— Je vais le faire, déclara sa mère en allant chercher la feuille de parchemin sur laquelle elles inscrivaient les marchandises qui arrivaient, lorsqu’elles les voyaient.
Malgré sa brouille avec Madoc, Roslynn n’avait pas l’intention de laisser l’intendant le duper, même si parfois des marchandises étaient livrées lorsqu’elles étaient occupées ailleurs, ou si elles ne se rendaient compte qu’un peu tard qu’un marchand était arrivé. En dépit de ces manquements, il y avait déjà plus de vingt-cinq livraisons qui ne correspondaient pas au montant inscrit par Ivor sur sa liste de paiements, dans le cabinet de travail. Roslynn s’était arrangée pour le vérifier.
Elle avait pensé avertir Madoc au bout de cinq différences, mais cela ne lui avait pas paru suffisant pour prouver que son homme de confiance le trompait.
Elle avait de nouveau envisagé de le mettre au courant à dix mais alors, ils approchaient de Noël et elle avait décidé d’attendre que les festivités soient passées. Non pas qu’il y ait eu beaucoup de réjouissances à Llanpowell cette année, et certainement pas autant que d’habitude, suspectait-elle. Tout le monde avait paru anxieux et d’humeur plutôt morne, même Lloyd. Les problèmes qu’ils rencontraient dans leur couple semblaient déteindre sur la vie du château.
Son père avait envoyé un petit coffre de bois qui était à elle quand elle était enfant, ainsi qu’un hochet de boisplein de haricots secs. Roslynn avait cousu pour Madoc une nouvelle tunique avec la laine du bélier noir ; elle lui irait sûrement mieux que celle avec laquelle il s’était marié, mais il ne l’avait pas encore portée ni même essayée, elle l’aurait parié.
Le matin de Noël, elle avait trouvé près de leur lit un berceau en chêne joliment sculpté que Madoc avait fabriqué lui-même, lui avait dit Lloyd à la messe, plus tard. Elle aurait voulu remercier son époux, mais il avait été absent la majeure partie de la journée, même si l’air était glacial et s’il avait neigé. Lorsqu’il était rentré, le festin avait déjà commencé et elle n’avait pas eu l’occasion de lui parler en privé.
— Je pense que nous avons assez d’informations pour parler à Madoc de nos soupçons, dit Roslynn en écartant de son esprit ces souvenirs pénibles. Je ne pourrai pas faire beaucoup d’autres visites au cabinet de travail d’Ivor pour vérifier les comptes. Je passe à peine par la porte, maintenant.
— Et vous ne devriez pas vous promener partout, ajouta sa mère.
Bien que Roslynn n’ait plus saigné ni été souffrante depuis son retour à Llanpowell, dame Eloïse lui recommandait constamment la prudence. Elle avait écouté les conseils de sa mère et accepté son aide aussi souvent que possible pour diriger la maison. Par chance, peut-être parce que la mère de Madoc était normande, dame Eloïse était appréciée et respectée et les choses s’étaient bien passées, même avec Ivor.
Roslynn ignora une autre crispation de son ventre.Son bébé était très actif et de tels mouvements n’étaient pas inhabituels.
— Voulez-vous demander à Madoc de venir ici ? demanda-t-elle à sa mère.
— Bien sûr.
La bouche de dame Eloïse s’abaissa aux commissures, comme toujours lorsqu’elle était soucieuse.
— Je serai heureuse de rester avec vous.
— Merci, mais ce sera pénible à entendre pour lui, aussi je pense qu’il vaudrait mieux que nous soyons seuls.
Il pourrait se mettre en colère, toutefois elle ne pensait pas qu’il lui ferait du mal alors qu’elle était enceinte jusqu’aux yeux. S’il était capable de lui en faire, pour commencer.
Heureusement, bien qu’elle n’ait jamais dit exactement à ses parents pourquoi son époux et elle ne partageaient plus la même chambre, sa mère ne protesta pas. Néanmoins, Roslynn était certaine qu’elle ne serait pas loin. Elle resterait à proximité, pour le cas où sa fille jugerait nécessaire de
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