Sur ordre royal
conduit. Non, c’est de Trefor que j’ai honte. Je regrette de ne pas l’avoir corrigé plussouvent, quand il était petit. Oui, et avec une grosse ceinture en cuir ! Il était trop gâté et il l’est toujours.
— Les querelles de famille sont une mauvaise chose, agréa le père de Roslynn, qui était assis à la place d’honneur à la droite de Madoc. Elles finissent souvent par causer du malheur à toutes les parties concernées.
Quels que soient ses propres doutes, Roslynn ne voulait pas que ses parents s’inquiètent à son sujet, pas après tout ce qu’elle leur avait fait traverser.
— Je suis sûre que tout ira bien entre Madoc et moi, dit-elle pour les rassurer.
— Trefor n’a jamais rien fait de pire que de tuer ce bélier avant le mariage, confirma Lloyd. Néanmoins, venir ici ce matin aussi hardi que la ribaude d’un roi… Par tous les diables, qu’est-ce qu’il a donc, à harceler son frère de la sorte ?
Il secoua la tête.
— Madoc va devoir le tuer, m’est avis, avant qu’il ne puisse y avoir la paix.
— Sûrement pas ! se récria dame Eloïse, faisant écho aux pensées de sa fille depuis sa place à côté de son époux. Quoi qu’il se soit produit entre eux, ils restent des frères. Que l’un tue l’autre… ce serait un terrible péché.
— Oui, mais Trefor ne laisse guère de choix au pauvre Madoc. Quant à un frère monté contre un autre, regardez John et le sien, répondit Lloyd, en prenant le gobelet à moitié plein de Madoc pour le vider. C’est un exemple pour vous. Chacun à l’affût de tout ce qu’il peut prendre à l’autre. Toutefois, je n’aurais jamaispensé voir un tel conflit dans ma propre famille. C’est une pitié, et Trefor en est à blâmer.
Roslynn chercha son époux des yeux. De l’autre côté de la grand-salle, et sans jeter un seul regard dans la direction de son épouse, Madoc continuait à converser avec ses amis.
Roslynn porta une main à son front.
— Si vous voulez m’excuser, ma tête me fait souffrir. Trop d’excitation et de bonne chère, je pense.
Sa mère fut près d’elle en un instant.
— Ce n’est rien, dit Roslynn en réponse à son interrogation muette. La journée a été longue, voilà tout. Je suis sûre que j’irai bien demain matin. Je vous en prie, restez et profitez des divertissements.
Grâce au ciel, ou peut-être parce qu’elle voyait que cela ne servirait à rien, sa mère ne protesta pas et n’insista pas pour l’accompagner.
Quand Roslynn quitta la grand-salle, elle s’arrêta pour prendre congé des hôtes les plus importants des domaines voisins. Elle n’eut pas un regard pour son époux, et espérait même qu’il ne se rendrait pas compte de son départ. Elle n’avait pas envie d’être seule avec lui tant qu’il ne s’était pas calmé.
Une fois dans leur chambre, elle ferma la porte et s’y adossa un moment avant de pousser un soupir las et d’aller à sa table de toilette. Elle s’assit lourdement sur le tabouret avant de retirer son coûteux voile de soie.
— Etes-vous souffrante ?
Elle sursauta en entendant la voix de Madoc. Elle se retourna prestement. Il était debout sur le seuil et la regardait d’un air soucieux.
— Simplement fatiguée, répondit-elle en souhaitant qu’il s’en aille, même s’il ne semblait plus furieux.
Elle était vraiment harassée et avait envie de dormir. Ou du moins, de ne pas avoir affaire à son époux pour le moment.
— En êtes-vous sûre ? insista-t-il.
— Je sais comment je me sens, Madoc, répondit-elle avec impatience. De grâce, retournez dans la grand-salle et célébrez avec vos amis. Je suis sûre qu’ils voudront tous vous féliciter pour l’enfant que nous allons avoir.
Elle retint son souffle lorsqu’elle s’avisa de ce qu’elle avait dit et à quel point elle avait paru grincheuse. Elle ne devrait pas le réprimander alors qu’il avait été si courroucé un peu plus tôt. Sinon, il risquait de se remettre en colère, et contre elle, cette fois.
— Seuls quelques-uns le savent, marmonna-t-il, même s’il y avait une confirmation coupable dans ses yeux lorsqu’il entra dans la chambre et referma la porte. Je ne le leur ai pas dit de but en blanc, croyez-moi, mais je suis trop transparent. Ioan a deviné. Ceux qui sont au courant ont reçu l’ordre de ne rien dire à personne d’autre.
Elle se leva et alla à la croisée, incapable de se contenir malgré la nécessité de se montrer
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