Sur ordre royal
à Madoc.
— Quoi ? demanda ce dernier en accélérant le pas pour le rejoindre.
Il comprit aussitôt.
Trefor ap Gruffydd se tenait au milieu de la cour de Llanpowell, l’air aussi hardi et arrogant que s’il était chez lui.
16
Par tous les diables, qu’est-ce que Trefor faisait ici ?
Quel toupet ! Car aussi sûr que Dieu avait fait Adam, Roslynn ne l’aurait certainement pas invité au banquet.
D’ailleurs, elle le lui avait dit.
Avait-elle changé d’avis ? se demanda Madoc. Avait-elle pensé que ce pourrait être une façon de ramener la paix entre eux ?
Il avança à grands pas vers l’intrus, contournant les tables et les bancs déjà sortis pour le festin. Trefor l’observait en ricanant, le visage hautain.
Cela faisait près de six ans que Madoc n’avait pas vu Trefor de près, mais il n’avait pas changé, ou du moins pas beaucoup. Même s’il était un peu plus négligé et si son visage était un peu plus creusé, il était toujours le bel homme qui pouvait faire se pâmer de désir toutes les femmes entre ici et les îles Hébrides avec ses brillants yeux bleus, à l’iris cerclé de noir.
Ce n’était pas sa belle allure qui avait pu lui faire franchir les portes extérieures de Llanpowell, cependant, alors comment avait-il fait ? Madoc se jura en silence de découvrir qui était de garde. Les sentinelles qui avaient laissé entrer l’intrus le regretteraient.
Puis il remarqua le drapeau blanc, de trêve, enfilé dans la ceinture de son frère. Voilà comment il avait pu passer les portes : ses hommes respectaient ces symboles.
Trefor n’était pas venu seul. Rhodri et plusieurs autres hommes, des hors-la-loi et des brigands à en juger par leur aspect, se tenaient sur le côté près des écuries. Des soldats de Llanpowell, ainsi que les gardes postés sur les remparts, les surveillaient, visiblement prêts à attaquer si Madoc en donnait l’ordre.
— Salutations, Madoc, dit Trefor avec un signe de tête insolent quand il arriva près de lui. Je vois que tu attends de la compagnie, et en grand nombre.
— Oui, mais tu n’as pas été invité.
Du moins l’espérait-il.
— Depuis quand un frère a-t-il besoin d’une invitation pour venir dans la maison de son père et de son grand-père ? rétorqua Trefor, indiquant ainsi à Madoc qu’il n’avait pas été invité.
Si cela avait été le cas, il n’aurait pas manqué de s’en vanter.
Il s’approcha encore de lui, de telle sorte qu’ils se retrouvent nez à nez, les yeux dans les yeux.
— Quoi, un homme n’a pas le droit de rendre visite à sa demeure ancestrale, celle qui devrait être la sienne, un jour de fête, quand tous les voisins sont les bienvenus ? continua Trefor.
— La demeure que tu as perdue par ta conduite déshonorante, riposta Madoc.
— Le domaine que tu m’as volé, ainsi que la femme que j’aimais.
— Tu l’as perdue toi-même quand tu es arrivé en retard et ivre à ton mariage, débarquant tout droit d’un bordel.
Trefor fit passer son poids d’une jambe sur l’autre, comme un homme se préparant à se battre.
— Je n’ai jamais dit que c’était là que j’avais passé la nuit.
— Tu étais certainement trop soûl pour te rappeler aujourd’hui tes propres paroles, mais tu en étais assez sûr ce jour-là, répondit Madoc.
Il fit rouler ses épaules pour détendre ses muscles, comme il le faisait toujours avant un combat.
— Et tu ne te souviens sûrement pas non plus de l’horreur dans les yeux de notre mère, ou de l’expression honteuse de notre père.
— Ce que je sais, c’est que tu tenais ton excuse pour prendre enfin ce qui était à moi, accusa son frère en portant la main à la poignée de son épée. Tu avais attendu cette chance toute ta vie, espèce de mochyn égoïste, sournois et calculateur !
Madoc se saisit de la sienne.
— Qu’es-tu d’autre qu’un voleur et un scélérat, qui s’introduit sur mes terres pour me voler mes moutons et tuer mon bélier ? lança-t-il en retour. Ou bien vas-tu le nier, aussi ?
— J’ai tué ce bélier, c’est vrai. Une belle bête, je dois dire, comme l’épouse que John t’a envoyée, à ce que m’a dit Rhodri. Si j’avais su que John donnerait de telles récompenses à ses laquais, Madoc, j’aurais pu me vendre à lui moi aussi. D’après Rhodri, c’est la plus belle gueuse normande qu’un homme peut espérer bai…
La fureur de Madoc explosa et, dans un
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