Sur ordre royal
partis, les gardes pivotèrent pour surveiller l’extérieur des murailles tandis que les soldats retournaient à leurs tâches et les serviteurs, silencieux et affectés par la scène, se remettaient aux préparatifs du festin.
L’épaule douloureuse, du sang coulant d’une entaille près de son oreille, Madoc se tourna vers Roslynn.
— Vous ne l’aviez pas invité au banquet, n’est-ce pas ?
— Bien sûr que non, répondit-elle. Mais…
— Il n’y a pas de « mais » avec Trefor ! Il n’aura plus jamais l’autorisation d’entrer dans ce château ! Jamais ! Je ne veux même plus entendre mentionner son nom !
Elle pâlit un peu en hochant la tête.
— Comme vous voulez, Madoc. Laissez-moi voir cette coupure.
— Ce n’est rien, grommela-t-il en essuyant le sang de sa main.
— Vous avez déchiré votre tunique. Vous voudrez sûrement vous laver et vous changer avant d’aller chercher Owain.
— Je ne vais pas le chercher.
Ce petit pli qu’il connaissait bien apparut entre les sourcils de Roslynn.
— Vous avez certainement le temps de…
— J’ai changé d’avis. Ce sera trop d’excitation pour lui et ce ne sont pas les meilleures circonstances pour que vous fassiez connaissance, dit-il d’un ton sec, avant de pivoter sur ses talons et de quitter sa femme.
***
De maintes façons, la fête de la tonte à Llanpowell fut tout ce qu’une célébration de ce genre devait être. La nourriture était excellente, abondante et, pour les nobles, exotique. Beaucoup d’entre eux n’avaient jamais mangé d’anguilles cuisinées à la cervoise, de mouton préparé de cette façon, de soupe de poireaux agrémentée de ce mélange d’herbes et de légumes. Il y avait du bœuf rôti, du sanglier et des cailles cuisinés de façon experte, des ragoûts savoureux et plusieurs sortes de pains, dont certains présentaient des formes élaborées. En plus des flans et des douceurs, des fruits cuits et des tartes s’ajoutaient au menu et tant de vin et de cervoise coulaient dans les gobelets que c’était un miracle que tout le monde ne soit pas ivre avant que les tables ne soient débarrassées.
Les divertissements étaient également variés, excitants et amusants, des jongleurs que Roslynn avait engagés aux bardes et aux danseurs, sans parler du magicien qui sortait des oiseaux vivants de sa barbe.
Roslynn aurait dû être heureuse, fière et satisfaite du résultat de ses efforts.
A la place, elle était assise, se sentant misérable, à côté de Madoc qui frémissait toujours de rage et avait à peine prononcé un mot depuis le début du repas. Même si elle savait que cette rencontre avec son frère en était la cause, elle ne pouvait étouffer son appréhension à l’idée qu’il trouve quelque chose qui n’allait pas dans le banquet, et qu’il se remette en fureur.
Elle était déçue pour d’autres raisons, aussi.
Elle avait attendu avec joie de faire la connaissancede son fils, espérant établir des liens d’amitié avec lui avant que son propre enfant ne naisse, mais Madoc avait brusquement changé d’avis.
Et à en juger par la façon dont plusieurs des hommes de la garnison ne cessaient de la regarder, souriant comme s’ils partageaient une confidence, elle pensait que Madoc leur avait parlé de son état, bafouant sa promesse de garder le secret entre eux.
Aussi, en dépit de tous ses espoirs et de ses préparatifs soigneux, de tout le temps que cela lui avait pris, de tous les problèmes et les inquiétudes que ce banquet lui avait causés, la fête était gâchée pour elle avant même qu’elle n’ait commencé.
Lorsque les derniers plats furent desservis, son époux sombre et silencieux quitta la table haute pour aller rejoindre Ivor et quelques petits nobles gallois dans une autre partie de la grand-salle.
Roslynn remua nerveusement sur sa chaise, tentée de se retirer jusqu’à ce que Lloyd se glisse dans le fauteuil vide de Madoc.
— Une belle affaire que celle-là ! dit-il en guise de compliment. Mais j’ai tellement honte de mon neveu que je pourrais en cracher par terre !
— Il est regrettable que Madoc et son frère en soient venus aux coups, et que Madoc soit encore si courroucé à ce sujet, répondit Roslynn.
— Madoc n’a rien fait de mal, rétorqua Lloyd, visiblement déconcerté qu’elle ait pensé qu’il se référait à son époux. Il aurait dû réduire Trefor en chair à pâté, vu la façon dont il s’est
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