Sur ordre royal
l’y avait poussé. Elle ne vivrait pas constamment anxieuse, constamment effrayée.
Alors, elle devait partir, comme elle n’avait pas eu le courage de le faire la première fois.
17
— Par saint Daffyd, sainte Bridget et tous les saints du pays de Galles, que diable s’est-il passé entre votre épouse et vous ? demanda Lloyd d’un ton échauffé, en tirant son neveu de sa paillasse recouverte d’une couverture dans la grand-salle. Elle quitte Llanpowell !
Madoc donna un coup de pied pour que son oncle lâche sa cheville.
— Nous nous sommes disputés, marmonna-t-il, se mettant debout en chancelant.
Il avait la bouche aussi sèche qu’un tonnelet vide depuis six mois, la tête douloureuse et l’estomac…
Mieux valait ne pas considérer son estomac et la quantité de cervoise qu’il avait avalée en essayant de ne pas penser à Roslynn, à Gwendolyn, à Trefor ou à Owain. Cette seule idée lui donnait la nausée.
— Elle vous quitte, Madoc ! cria presque Lloyd, faisant grogner et remuer les hommes qui dormaient encore autour d’eux. Elle rentre chez elle avec ses parents, c’est ce qu’elle a dit à Bron qui est venue me trouver en larmes parce qu’elle avait trop peur de vous le dire, la pauvre fille.
Cela ne pouvait pas être vrai. Roslynn ne le quitteraitpas. Il l’aimait. Il le lui avait dit, et si elle ne l’aimait pas encore, de son côté, il était sûr de lui plaire. En outre, elle portait son enfant.
— Elle ne peut pas s’en aller.
— Eh bien, c’est ce qu’elle dit, en tout cas. Et aujourd’hui , espèce de crétin au tempérament emporté ! Elle fait ses bagages !
L’expression de Roslynn lorsqu’elle lui avait dit de partir la nuit dernière et le ton de sa voix revinrent à Madoc avec la force d’un coup.
Ses propres douleurs et contusions oubliées, espérant ardemment que son oncle se trompe, il le laissa et se rendit immédiatement à leur chambre, grimpant l’escalier quatre à quatre comme il l’avait fait lors de sa seconde nuit de noces, courant derrière sa femme.
Il ouvrit la porte et constata avec désarroi que Lloyd avait raison : Roslynn faisait ses bagages.
— Vous vous en allez ?
— Oui. Je retourne à Briston avec mes parents, répondit-elle, aussi calme qu’une nonne tandis qu’elle le regardait avec une détermination qui le désespéra.
— Même si je vous fais des excuses ?
— Vous m’en avez déjà fait, Madoc. Mais combien de fois encore vous emporterez-vous ? Combien de fois encore aurai-je peur que cette fois , vous soyez assez hors de vous pour me frapper ?
— Je vous l’ai dit, je ne lèverai jamais la main…
— C’est ce que vous dites, et nul doute que vous le croyez. J’aimerais le croire aussi. Mais je vous ai vu attaquer votre propre frère comme si vous étiez prêt à le tuer de vos mains nues, alors comment puis-je enêtre certaine ? C’est impossible, hélas, et je ne vivrai pas avec cette incertitude. Plus jamais.
Quel nouveau châtiment était-ce là ? s’écria Madoc en lui-même. N’avait-il pas déjà assez souffert pour ses péchés ? Ne lui avait-il pas donné sa parole qu’elle n’avait rien à craindre avec lui ? Ne lui avait-il pas montré à quel point il tenait à elle ?
Et pourtant ce n’était pas suffisant.
— Vous ne me ferez jamais confiance, quoi que je fasse ? demanda-t-il.
Elle se détourna et se remit à ses bagages.
— Non.
Puis elle lui refit face et le chagrin qu’il lut dans ses yeux, bien plus dur à supporter que de la colère, le toucha en plein cœur.
— Ce n’est pas facile pour moi, Madoc. Je tiens beaucoup à vous, bien plus que je ne l’aurais jamais cru possible. Je souhaiterais de tout mon cœur que les choses puissent être différentes. Et vous avoir rencontré avant Wimarc. Mais ce n’est pas le cas.
Elle s’interrompit un instant, avant de reprendre d’une voix triste :
— Peut-être que si vous étiez un homme au tempérament égal, nous pourrions envisager de mener une vie heureuse ensemble. Mais alors vous ne seriez pas Madoc ap Gruffydd. Et je ne suis pas assez sotte pour croire que vous pourriez être différent, même si vous vous y efforciez. En bien ou en mal, vous êtes comme vous êtes, Madoc, et je suis comme je suis.
Il avait sa fierté et il ne la supplierait pas, se dit-il, mais il ne la laisserait pas non plus partir facilement.Pas Roslynn, la femme qu’il aimait. Il s’approcha d’elle
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